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Théâtre : la pièce « Cadavre et chien » présentée à Alger

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La générale de la pièce de théâtre « Cadavre et chien », une tragi-comédie qui met à nu l’absence d’humanisme et l’éloignement des valeurs communes gage d’une vie apaisée, a été présentée jeudi soir à Alger dans une atmosphère affligeante.

Les spectateurs, peu nombreux de la salle Mustapha-Kateb du Théâtre national Mahieddine-Bachtarzi, restés cloués sur leurs sièges, 65 mn durant, ont pu apprécier un spectacle poignant, mis en scène par Sid -Ahmed Kara, sur un texte écrit par Boukhobza El Abed, inspiré de « Cadavre sur le trottoir » du dramaturge syrien Saadallah Wannous (1941-1997). Dans une scène suggérée, deux combattants de la révolution, restés vivre sur leur champ de bataille après l’indépendance de l’Algérie, décident des années après de venir se recueillir sur les tombes de leurs frères tombés au champ d’honneur, répondant ainsi à une invitation qui leur est apparue dans leurs rêves. Portant toujours leurs accoutrements de maquisards, l’un d’eux, pris d’émotion, meurt sur le chemin menant au cimetière des martyrs. Son compagnon d’armes s’apprête alors à l’enterrer près de ses frères de combats disparus. La surprise du moudjahid, campé par Amine Ben Mohammed, fut grande lorsqu’il se heurta au refus catégorique du gardien, rendu par Khaled Mnaouar, lui même agissant sous les ordres du directeur du cimetière, interprété par Rabie Mechlouf, qui subissait la colère de ses ordonnateurs malveillants suggérée par des aboiements de chiens. Poussant l’absurdité à son paroxysme, le directeur du cimetière proposa d’acheter le cadavre pour en extraire le cœur resté chaud, après avoir été arraché devant le regard impuissant du moudjahid qui finira par confier le sort de son compagnon inerte (représenté par un mannequin) au public. Devant des situations insoutenables, les échanges entretenus ont été marqués par l’exercice de la métaphore et les expressions allusives donnant ainsi de la modération à la puissance des faits qui dénotaient de tout l’égarement de l’âme et la perte de valeurs posés en un nouvel ordre établi au nom de visions égocentriques et d’opportunisme. Dans des dialogues au rythme ascendant et soutenu, Amine Ben Mohamed et Rabie Mechlouf, distribués pour la première fois, ont su porter le texte dans toute sa densité, soutenus par l’inépuisable Khaled Mnaouar, un revenant dont le personnage comique évoluant entre intrigue et soumission a donné de l’équilibre à la gravité du spectacle. La scénographie, signée Hmida Belalem, par ailleurs metteur en scène et formateur, a créé les atmosphères lugubres pertinentes à la trame soutenue par des bruitages et un fond musical renvoyant à la méditation des faits relatés. Dans un décor unique représentant un cimetière, des pantalons (grandes pièces de tissus suspendues de haut en bas) blancs tachés de gris ont suggéré les colonnes en marbre d’un monument funéraire érigé à la gloire des martyrs de la révolution, frappés d’un éclairage feutré bleuâtre et blanc plantant une ambiance glaciale et macabre. Dans une synergie créative, Sid Ahmed Kara, Boukhobza El Abed et Hmida Belalem, qui par ailleurs oeuvrent de manière effective à la réussite de chaque édition du Festival national du théâtre amateur de Mostaganem (Fnta), ont su monter un « spectacle citoyen », de l’avis des spectateurs présents, qui renseigne sur « la nécessité de respecter la mémoire et la vie humaine », a renchéri le metteur en scène. Produit par la coopérative « Praxis » de Miliana, le spectacle « Cadavre et chien » partira en tournée prochainement en Tunisie.

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