Les éditeurs algériens sont unanimes à affirmer que le livre de littérature générale, de débats et de recherche, continue à se battre pour trouver la place qu’il mérite au milieu des lecteurs.
La conjoncture économique actuelle ne facilite pas les choses, s’accordent-ils à dire, tout en qualifiant la situation de «catastrophe livresque laissant inspirer de l’angoisse quant à l’avenir du livre».
C’est en tout cas le point de vue de Tarik Djerroud, romancier et éditeur (Tafat édition) qui pense que le livre littéraire se bat et fait de la résistance devant le livre religieux, classé au hit parade des livres préférés des Algériens, suivi du manuel parascolaire. Rencontré, hier, au Sila, Djerroud a fait part de son regret de voir un nombre réduit de lecteurs. Essayant tout de même de rester optimiste sur cette question, l’éditeur estime que l’avenir du livre reste entre les mains de l’Éducation nationale. Après la cellule familiale, dira-t-il, le lectorat doit se former à l’école qui est selon ses qualifications «une pépinière» où les futurs adultes devraient être initiés à la lecture. Parlant de la conjoncture économique actuelle du pays et ses répercussions sur le secteur de la culture, notre interlocuteur qualifie la situation de catastrophique. «Il y a un naufrage dangereux qui inspire de l’angoisse», confie-t-il, avant d’ajouter que le secteur de la culture qui a besoin de soutien plus que jamais serait en train de payer les frais de cette situation. Aussi, parmi les difficultés auxquelles font face les maisons d’édition, Tarik Djerroud cite essentiellement l’indisponibilité du papier. Il y a un certain choix pour la qualité du papier qui n’est souvent pas disponible, explique-t-il, mais quand cette qualité existe le prix serait exorbitant. Cela amène, ajoute-t-il, à payer le livre cher et ça crée d’amblée des problèmes de vente.
«Malgré cela, on essaye de notre mieux de faire l’équilibre». En outre, notre interlocuteur, souligne l’indisponibilité des correcteurs. «La majorité des maisons d’édition peinent à trouver des correcteurs qui effectuent un travail de qualité», relève-t-il. Cependant, selon lui, une maison d’édition qui produirait des livres pertinents et de qualité pourrait faire face à tous ces problèmes et résister sur le marché.
Concernant, par ailleurs, le bilan des 5 premiers jours d’exposition, Tarik Djerroud a fait savoir que ces journées ont été marquées par une petite influence. Cependant, le chiffre d’affaires augmentait chaque jour davantage. Il a noté, toutefois, que «généralement» et comme chaque année c’est lors des derniers jours que les gens achètent le plus. «Les derniers week-ends, nos recettes explosent», a-t-il indiqué. Pour cette année, Djerroud a félicité la pertinence des organisateurs du Sila qui ont coïncidé le Salon avec le 1er-Novembre. Cette 21e édition connaîtra cinq jours de grande influence ce qui permet aux gens de venir des régions lointaines. Pour ce qui est de Tafat édition, elle a été fondée en 2010 avec une production de publication de littérature généraliste (poésie, romans, documents historiques) et ce, en trois langues (français, arabe, tamazight), note pour conclure Tarik Djerroud. Un peu plus loin, on retrouve le stand de «Flites édition» peu connue, mais dont l’idée reste originale et nouvelle en Algérie puisqu’elle est spécialisée dans la production de livres et de romans anglais pour les étudiants. Flites Daoud, représentant de cette maison d’édition, remarque pour sa part la diminution de l’intérêt vers le livre d’une année à une autre. Il fait état, en outre, du manque flagrant de librairies qui ont pour la plupart baissé leurs rideaux et changé d’activités. En termes de vente, Flites remarque, également, une diminution comparativement aux années précédentes, mais reste toutefois optimiste quant à l’avenir du livre en Algérie, malgré la situation économique difficile. Légende édition est du même avis. Houari Meriem, responsable de la maison d’édition évoque les conséquences directes de la crise sur les prix des livres. Elle souligne également le manque d’intérêt des lecteurs vis-à-vis du livre littéraire, contrairement aux livres de cuisine, de religion ou des manuels parascolaires. Le lectorat algérien n’est pas encore assez bien formé», relève-t-elle.
Ania Nait Chalal