Le ministre de la Justice et garde des Sceaux, Belkacem Zeghmati, a présidé hier, au siège du ministère, une réunion avec les cadres centraux de son département, les présidents des cours et les commissaires d’État auprès des tribunaux administratifs, pour examiner les voies et moyens permettant l’amélioration des prestations et le rendement du secteur, à travers, notamment la modernisation de son fonctionnement, prélude à la généralisation de la numérisation de tous les services de la Justice.
Au cours de son discours d’ouverture en cette occasion, le ministre Zeghmati a surtout dévoilé quelques axes de la feuille de route du secteur dans le cadre du Plan d’action du gouvernement en charge d’exécuter le programme du président de la République, Abdelmadjid Tebboune.
Révision des textes de fonctionnement de la Justice et du CSM
À ce propos, M. Zeghmati, a assuré que la révision des textes fondamentaux du fonctionnement de la Justice ainsi que les lois qui régissent le Conseil supérieur de la Magistrature (CSM), constituent l’autre face de la nouvelle orientation pour le secteur, portée dans une feuille de route pour la réforme de la Justice, à travers la mise en œuvre des mécanismes, protégeant l’indépendance du Juge, son intégrité et une reconnaissance de son statut social. Toutefois, ajoute la même source, l’indépendance de la Justice ne peut avoir lieu, sans que le juge ne soit totalement libéré de plusieurs entraves, dont celles ayant trait à un arsenal de textes qui, après plusieurs années d’exercices a montré ses limites, illustrées par l’absence d’une Justice qualitative. Plus explicite, le ministre de la Justice a rappelé la nécessité d’aller à un amendement des textes du code civil et administratif ; une mission, a-t-il encore souligné, attribuée aux différents groupes de travail, dont celui chargé justement de réviser ce volet où les membres étaient instruits, selon lui, d’effectuer le travail en se basant sur les fondements de la société algérienne, avec comme appui, l’expérience des pays étrangers en la matière, en plus de la contribution de tous, chacun dans son domaine de compétence entre spécialistes en droits, partenaires de la justice, universitaires et toutes les autres entreprises en rapport avec le fonctionnement de la Justice. À titre d’exemple sur l’échec de la politique actuelle en raison de ces textes, qui demande une refonte, sans trop tarder, le ministre fait savoir, en se basant sur des données chiffrées, que le nombre des jugements délivrés avec refus formel de porter plainte a atteint les 50,64%, soit (30 776) affaires, et ce, entre 2015 et 2019, alors que les jugements prononcés avant même de statuer sur l’affaire, a atteint les 14,21% (8 634 affaires) et, par conséquent, les jugements prononcés sur des affaires sans refus de plainte ne dépasse pas le seuil des 35,15%, ce qui est donc insignifiant, aux yeux du ministre, d’où l’impératif de procéder à l’amendement de ces textes.
Vers la levée de l’obligation de traduire en arabe les documents fournis
« L’exigence de la traduction des documents délivrés avec une autre transcription que l’Arabe est contradictoire avec la réalité en Algérie car, il est inconcevable de demander aux citoyens (partie plaignante) en litige avec l’administration de traduire ces pièces pour la simple raison qu’elles étaient fournies par cette même administration », a expliqué M. Zeghmati qui juge aussi que cette démarche coute beaucoup d’argents aux justiciables, ce qui constitue aussi une contradiction avec le principe de la gratuité des affaires juridiques en litige, tout en donnant, dans le même contexte, libre cours au groupe chargé de rédiger des amendements, qu’ils jugent nécessaires et d’agir en toute liberté dans leurs propositions sans aucune contrainte.
De la numérisation pour la performance
Concernant le volet relatif à la généralisation de la numérisation des services de son département, notamment pour les tribunaux administratifs ; la numérisation des fichiers (dossiers) juridiques est une priorité absolue qui nécessite, en premier lieu, une évaluation de l’état de modernisation du travail juridique dans ces tribunaux comme un prélude à sa généralisation. « De ce côté, je tiens à préciser que cette démarche ne se limite pas à l’introduction de nouvelles fonctions et mécanismes pour la gestion des dossiers juridiques, mais plutôt du secteur dans son ensemble, où les besoins des juges et des justiciables, la défense et l’administration de la Justice seront prises en charge en fonction des orientations des services techniques du ministère en plus des considérations liées à la technologie disponible dans le pays », a poursuivi M. Zeghamati dans son allocution d’ouverture.
Le droit de regard des tribunaux administratifs
M. Zeghmati a assuré, par ailleurs, que la loi attribue aux juges des tribunaux administratifs le droit de regard sur les recours contre les décisions du pouvoir administratif, pour garantir le bannissement de l’injustice envers le citoyen dans des différends avec la justice. Pour ce faire, la constitution dispose d’une batterie de mesures d’obligations que les juges sont sommées de respecter, dont la protection de la société, de ses droits ainsi que les droits fondamentaux des personnes. Et en contrepartie, le juge est protégé par la loi contre toutes formes d’interférences, pressions ou autres manœuvres visant à saboter l’accomplissement de ses missions, ou cherchant à influencer l’orientation de son jugement. Il a surtout tenu à expliquer, toujours dans le même ordre d’idée, que les tribunaux administratifs, dont le juge assisté du commissaire d’État sur des questions relevant de ses compétences pour une gestion équitable des affaires litigeuses, en procédant à l’application rigoureuse des lois, le juge ne détient aucunement le statut de procureur de l’administration et ne doit en aucun cas trancher sur des questions par des positions tendancieuses.
Le ministre de la Justice et garde des Sceaux, Belkacem Zeghmati, devait présenter, cet après-midi, devant l’assistance, la feuille de route de son département, établie dans le cadre du Plan d’action du Gouvernement Abdelaziz Djerad et en exécution du programme du chef de l’État, Abdelmadjid Tebboune.
Brahim Oubellil