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Élection présidentielle en France : François Fillon, le candidat de «l’honnêteté», touché en plein cœur

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Le prétendant à l’Elysée a assuré, jeudi soir, qu’il renoncerait « s’il était mis en examen » dans le cadre des soupçons d’emploi fictif de sa femme.

François Fillon arrive sur le plateau du journal de TFI pour répondre aux accusations concernant l’emploi fictif de son épouse, le 26 janvier.
Il se démène pour tenter d’éteindre l’incendie. François Fillon, candidat à l’élection présidentielle, dans la tourmente après les suspicions d’emploi fictif visant sa femme, a lancé la contre-offensive, jeudi 26 janvier, pour tenter de tordre le cou à ces assertions.
Sur le front judiciaire, d’abord. L’après-midi, l’avocat du candidat de la droite à la présidentielle a annoncé avoir livré des premiers éléments à la justice afin de prouver que Penelope Fillon a bien travaillé au service de son époux. Sur le front médiatique, ensuite. L’ex-Premier ministre s’est exprimé au journal de 20 heures de TF1.
S’il a reconnu que son épouse travaillait à ses côtés « depuis 1981 », date de son premier mandat électif, il a vigoureusement contesté les révélations du Canard enchaîné, assurant que le travail réalisé par sa femme en tant qu’attachée parlementaire était « légal », « réel » et «parfaitement transparent ».

Accusations potentiellement dévastatrices
Signe que l’heure est grave, à peine deux mois après son triomphe à la primaire, M. Fillon a évoqué un possible renoncement, assurant qu’il ne serait pas candidat à la présidentielle « s’il était mis en examen ». Tout en évoquant au passage une «manœuvre » pour « l’abattre ». Un registre digne de la communication de crise.
Depuis l’annonce de l’ouverture d’une enquête préliminaire, la veille, le candidat sait qu’il joue gros. Outre le fait que cette affaire tombe mal avant son grand meeting à Paris, dimanche 29 janvier, censé relancer sa campagne, c’est surtout la nature des accusations portées contre lui qui est potentiellement dévastatrice. En instillant le doute sur son « honnêteté », qui constitue l’un des deux piliers de son identité politique avec la « vérité », elles l’atteignent en plein cœur. Quelle que soit l’issue de l’enquête judiciaire, ce sont les fondements même du fillonisme qui sont aujourd’hui ébranlés. « Cette affaire constitue un vrai danger pour François Fillon et peut compromettre sa campagne, car elle sème le poison du soupçon autour de sa probité, alors que ce marqueur était son principal point fort », analyse Yves-Marie Cann, directeur des études politiques à l’Institut Elabe.
La polémique a pour effet de brouiller profondément l’image que s’est forgée le candidat de la droite depuis le début de sa carrière, en 1981 : celle d’un responsable politique intègre, qui ne transige pas avec la probité. Un atout majeur dans le contexte de rejet croissant des responsables politiques, sur lequel il a su capitaliser.

Se différencier de Nicolas Sarkozy
Après son duel fratricide face à Jean-François Copé, fin 2012, il avait su jouer habilement de cette carte pour restaurer son image, sévèrement écornée, et accréditer l’idée que son rival lui aurait « volé » son élection. «En trente ans, mon nom n’a jamais été associé à une affaire ou à un comportement contraire à l’éthique », se vantait-il en novembre 2014.
Rebelote lors de la campagne de la primaire : M. Fillon s’est posé en candidat de « l’honnêteté » pour se différencier de Nicolas Sarkozy, ciblé par plusieurs informtions judiciaires, et d’Alain Juppé, condamné en 2004 dans l’affaire des emplois fictifs de la Mairie de Paris. A chaque intervention ou presque, il avait mis cet argument en avant. Lors du débat d’entre-deux-tours face au maire de Bordeaux, il s’était montré formel : « On ne peut pas diriger la France si on n’est pas irréprochable (…). On est des hommes politiques, on n’est pas des citoyens comme les autres. »
Un positionnement payant : ses électeurs du premier tour de la primaire avaient cité « l’honnêteté » comme la deuxième qualité de M. Fillon qui les avait poussés à voter pour lui, selon un sondage Elabe pour BFM-TV, réalisé le soir du 20 novembre 2016. Et 45 % des électeurs fillonistes avaient cité ce critère pour justifier leur choix de vote, contre 16 % chez ceux de M. Juppé et 6 % pour ceux de M. Sarkozy.
Déjà, en mars 2016, une étude de l’IFOP sur l’image de M. Fillon avait démontré que « l’honnêteté » était citée par les Français comme sa qualité numéro un, devant le courage et la sympathie. Lorsque Le Monde était allé à la rencontre des électeurs du vainqueur de la primaire à Angers, l’un d’eux avait insisté sur ce point : « François Fillon ne traîne pas derrière lui des casseroles comme d’autres candidats à droite. »

Une campagne en perte de vitesse
Ce positionnement revendiqué lui revient désormais comme un boomerang. « Est-ce que vous imaginez Mme de Gaulle accepter un contrat d’emploi fictif ? », a ironisé Yannick Jadot, candidat Europe Ecologie-Les Verts à la présidentielle, mercredi, en détournant la phrase lâchée par M. Fillon en août 2016 à destination de M. Sarkozy : «Qui imagine le général de Gaulle mis en examen ? » A la suite de cette lourde charge, le député de Paris avait assumé, le 5 septembre 2016 sur RTL : « L’exemplarité est nécessaire pour gouverner notre pays, et d’autant plus nécessaire qu’il va falloir le redresser, c’est-à-dire demander des efforts aux Français. »
Des propos désormais plus compliqués à tenir pour celui qui prône la rigueur en matière de gestion de l’argent public…

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