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Devant la récurrence des enlèvements meurtriers : faut-il surseoir au gel de l’exécution de la peine de mort ?

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Le rapt, le 21 juillet dernier, de la petite Nihal Si Mohand, a relancé le récurrent débat sur l’application de la peine de mort dans notre pays. Ou pour être plus précis, sur la nécessité d’en finir avec le gel de son application ; en vigueur, pour rappel, depuis 1993. Révoltée et profondément choquée par la récurrence du phénomène des rapts d’enfants, surtout quand ceux-ci se terminent par l’assassinat des victimes, une partie non négligeable de l’opinion publique nationale demande, pour ne pas dire, exige, une telle fin. Cela s’est, en effet, vérifié à chacune des graves affaires du genre qui ont, ces dernières années, défrayé la chronique nationale et mis en émoi quasiment toute la société. C’est la même demande pressante (de l’opinion publique) d’exiger, quand les auteurs n’avaient pas été encore jugés, leur condamnation à la peine capitale,et quand celle-ci a été prononcée, son application, qui a été, en effet, constatée après le dénouement tragique -dans l’ordre de leur occurrence et pour nous en tenir à ces seules affaires -du rapt, en décembre 2012, à Mahelma, dans la wilaya d’Alger, de la petite Chaïma ; de l’enlèvement, en mars 2013, dans un des quartiers de la Nouvelle-ville Ali Mendjeli de Constantine, de deux enfants, Ibrahim et Haroun âgés respectivement de 9 et 10 ans ; et du kidnapping, en septembre 2015, au chef-lieu éponyme de la wilaya de Mila, d’Anès, un enfant de cinq ans.

Une demande qui est manifestement appuyée par de larges secteurs de la classe politique et, pas uniquement, de ceux relevant de la mouvance islamiste. Ainsi que par des pans non négligeables de la société civile; dans son acception la plus large. Si l’argument religieux figure en bonne place dans l’argumentaire avancé par les « partisans » du «dégel» de l’exécution de la peine de mort, pour demander sa concrétisation, la révolte face à la récurrence d’un tel phénomène et le dégoût inspiré par cette véritable atteinte à l’innocence que constitue le rapt et le meurtre d’un enfant, semblent, en revanche, en être les éléments les plus marquants. Et ce, dans le sens où se sont eux qui ont le plus motivé la demande précitée desdits partisans. Cette quasi-unanimité constatée dans la position de l’opinion publique la plus large, à l’égard du « dégel » de l’exécution de la peine de mort n’est pas, loin s’en faut, observable dans le milieu des droits de l’Homme national. Entre la position quasiment idéologique défendue par maître Hocine Zahouane, président de l’une des deux ailes de la LADDH (Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme), et celle de maître Mokhtar Bensaïd, président de la LADH (Ligue algérienne des droits de l’Homme), il y a des différences manifestes. Qui tiennent au caractère tranché de la première et nuancé, de la seconde : les deux (présidents) ayant, en effet, mis en avant le caractère principiel de leur opposition à la peine capitale. Si Hocine Zahouane s’est montré réfractaire à tout « aménagement » dans une telle opposition qui serait motivé par la nature du crime commis et ce, quel qu’il soit, Mokhtar Bensaïd, en revanche, n’a pas fermé la porte à un tel « aménagement » quand il s’agit d’un rapt d’enfant suivi par l’assassinat de la victime. Ce qui ne veut aucunement dire que le premier est moins sensible que le second : les deux, là aussi, nous ont dit « être fortement bouleversés par ces crimes ». Pour le président de la LADDH, qui s’est appuyé pour l’affirmer sur nombre d’études menées à travers le monde, « la peine capitale n’a jamais été un moyen dissuasif».
De là, il a appelé « à la mise en œuvre d’autres moyens pour lutter contre ce phénomène » ; des moyens dont l’objectif, a-t-il expliqué, « est d’arriver à créer un climat qui rendrait la survenance de ce phénomène difficile ». Et qui présupposent, a-t-il ajouté, « l’implication de tous les secteurs et institutions de la société, tels entre autres, l’école et la mosquée, et la sensibilisation des familles et des enfants eux-mêmes ». Réagissant à notre remarque sur le fait que nombre de citoyens exigent le droit pour les familles affectées par de tels crimes à user, comme le prévoient les textes religieux, de « la Loi du Talion », le président de la LADDH, qui nous a rappelé en la circonstance qu’il était lui-même un ancien condamné à mort, nous a assez sèchement déclaré que son organisation «  ne peut pas être dans une vision grégaire ». Et d’ajouter plus explicite : « En tant que responsables, nous ne pouvons être entrainés par la meute ». Une remarque qui lui a fait dire que « dans tous les cas, la justice doit être rendue dans la sérénité ». Et, partant, qu’il fallait « à toutprix éviter les réactions à chaud ».
Dans la lancée et tout en rappelant les déclarations de Winston Churchill selon lesquelles « le niveau de civilisation d’un pays se mesure à l’aune de la manière dont il juge ses criminels », Hocine Zahouane n’a pas hésité un instant pour nous déclarer que, «dans le cas où le président de la République venait à autoriser l’application de la peine de mort pour les auteurs de rapts d’enfants, la LADDH s’y opposerait ». C’est là un des éléments de divergence avec la position affichée par son pair de la LADH. Invité à nous préciser la position de son organisation dans le cas où le président Bouteflika venait à prendre la décision susmentionnée, Mokhtar Bensaïd a été plus diplomate.
Et ce, dans le sens où il nous a déclaré que « dans la mesure où la peine de mort figure toujours dans le Code pénal, le Président a toute la latitude de prendre une telle mesure ». Sauf que, a-t-il tenu à nous le dire, « le dernier mot, dans l’application de la loi, doit revenir à la Justice ».
Ceci non sans insister pour dire qu’une telle mesure, « si elle venait à être prise, attirerait beaucoup de problèmes à notre pays ». Et ce, d’autant plus, a-t-il poursuivi, qu’il « est signataire d’un grand nombre de protocoles internationaux sur la question (de la peine de mort) ».
Mourad Bendris

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