S’il y a un secteur qui échappe à la réglementation et la législation c’est bien celui de l’audiovisuel. Il est vrai que ces dernières années une foultitude de chaînes de télévision pullulent le paysage médiatique national. C’est ce qui a donné naissance à une sorte de «débandade». Devant cet état de fait, le gouvernement veut se ressaisir et a promis de sévir contre l’informel.
Selon Sellal, il en existe une soixantaine de chaînes recensées par les autorités publiques. Elles éraient créées à la faveur de la promulgation de la loi sur l’audiovisuel qui consacre l’ouverture de l’espace médiatique. Cela étant dit, le secteur s’est enlisé dans une sorte de tohu-bohu qui donne lieu à des «dépassements» à travers la diffusion de programmes télévisuels qui «menacent» les valeurs de la société algérienne, comme l’a déploré, hier, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal. En effet, après avoir longtemps fermé les yeux sur cet état de fait, le gouvernement semble décidé à en finir avec cette situation de confusion. «La désinformation, les attaques contre la cohésion de la société algérienne avec des appels à la haine, au régionalisme et à la Fitna», tel est le constat fait par Sellal, qui s’est exprimé sur cette question lors d’une rencontre consacrée à une opération de destruction de supports audiovisuels piratés, tenue à Alger. Visiblement, ses propos sont loin d’être une démagogie, car, d’ores et déjà, le premier responsable de l’Exécutif national a fait savoir qu’il a instruit son ministre de la Communication, Hamid Grine, à procéder dans les plus brefs délais à l’assainissement du secteur. Il est bon de savoir que sur la soixantaine de chaînes de télévision qui diffusent sur le territoire national, seulement cinq ont été agréées par les autorités, a rappelé le Premier ministre. Il s’agit d’Ennahar TV, Echourouk TV, Hoggar TV, Dzaïr TV et El-Djazaïria, comme l’a fait savoir en février 2015 déjà le ministre du secteur. Mais, même étant autorisées d’activité, il semblerait que ce n’est qu’une partie remise, pour peu encore que les organes médiatiques se soumettent aux cahiers des charges se rapportant à la loi sur l’audiovisuel, a mis en garde le même responsable, qui veut, à en croire ses déclarations, imposer la loi dans toute sa rigueur. Selon Sellal, certaines chaînes TV ont dépassé les lignes rouges, à travers «le chantage, la diffamation, la violation du secret de l’instruction judiciaire et l’exercice de la pression sur les cadres de l’État», a-t-il accusé, sans cibler nommément les médias dont il est question par ces critiques. Sellal veut sévir contre les chaînes qui ne se conforment pas à la réglementation en vigueur et a invité son ministre à procéder à la fermeture de celles qui ne respectent pas les cahiers des charges, dont le projet est fin prêt, a-t-il révélé à ce titre. Et de préciser que la nouvelle loi a identifié clairement les droits et les obligations qui s’imposent aux opérateurs, s’agissant de ceux qui sont en exercice ou ceux désireux d’ouvrir une chaîne télévisuelle ou radiophonique. Même s’il a tenu un discours rassurant envers ceux qui sont en conformité avec la loi auxquels il a promis l’aide et l’encouragement de l’État, il n’en est pas de même pour ceux qui font fi à la réglementation. «Les chaînes qui y dérogeront se verront interdire l’activité en Algérie», telle est la sentence du chef de l’Exécutif qui a pressé son ministre à sévir contre les récalcitrants et à procéder avec célérité à l’assainissement de ce secteur. Néanmoins, quand bien même le respect de la loi est un principe irréversible, est-il question pour le gouvernement de serrer l’étau autour des médias de la télévision, dans le but d’exercer plus de contrôle sur l’information ? Il ne s’agit point d’une «remise en cause» du principe de la liberté d’expression ou de l’ouverture du champ audiovisuel, a assuré le Premier ministre qui a laissé entendre que les autorités ne font que cadrer l’activité comme cela se fait de par le monde entier. Entendre, le «laisser-aller» du gouvernement en quelque sorte ne doit pas être pris pour une quelconque absence de l’autorité de l’État. Et pour cause, allusion aux multiples «dérapages» constatés à travers les programmes de certaines chaînes, il s’agit par ce recadrage de «préserver la santé morale du pays», a expliqué Sellal pour justifier sa décision. Et de rappeler, à ce titre, que lorsque le gouvernement a autorisé l’ouverture de ces chaînes, il étaient attendu d’elles qu’elles s’auto-régularisent, mais peine perdu, a-t-il déploré, même s’il a avoué quelque part que le secteur a connu un « démarrage désordonné». Tout en rappelant la bonne foi de son gouvernement d’ouvrir le champ et de développer le paysage médiatique, il a néanmoins rappelé, que cela doit se faire de manière sereine et dans le respect de la loi et des règles de la déontologie du métier.
Farid Guellil