Le sommet du G5, réuni à Nouakchott, a convenu d’accélérer la lutte contre les groupes terroristes au Sahel tout en admettant l’ampleur des défis. Le président français, Emmanuel Macron, a estimé que les forces françaises et celles des pays du Sahel regroupés au sein du G5, avaient réussi à « inverser » le rapport de force dans la zone dite des trois frontières (Mali, Burkina Faso et Niger) où ils ont concentré leurs opérations contre les groupes se réclamant de l’État islamique ces derniers mois. « La victoire est possible » au Sahel, a-t-il dit. Il faut pour cela « amplifier » la dynamique récente, en particulier veiller au retour de préfets, de juges, de policiers dans des zones échappant désormais à tout contrôle étatique.
À l’issue de ce sommet, le tableau demeure sombre dans la région entraînée par une spirale amorcée en 2012 dans le Nord du Mali. Les violences djihadistes et intercommunautaires, qui ont fait des milliers de morts et causé une grave crise humanitaire, persistent. Les États n’exercent plus leur autorité sur de vastes territoires. Les trafics prolifèrent et la crise menace de s’étendre au-delà du Sahel, à la Côte d’Ivoire entre autres pays menacés. Certes, des « progrès significatifs » ont été accomplis, a précisé le président mauritanien Mohamed Ould Ghazouani, hôte du sommet . Mais ils sont « insuffisants eu égard à l’ampleur des défis à relever. L’extrémisme violent sous toutes ses formes continue à sévir dans plusieurs zones de l’espace du G5 Sahel et s’étend de manière inquiétante » à d’autres régions, a-t-il souligné. M. Ghazouani, dont le pays assume la présidence du G5 Sahel, recevait ses homologues burkinabé, malien, nigérien, tchadien et français pour faire le point six mois après le sommet de Pau (France), où ils avaient décidé d’intensifier l’effort commun pour reconquérir le terrain perdu.
Le sommet de Nouakchott était présenté, comme l’occasion de préparer l’avenir sur la lancée de Pau et de poursuivre l’effort consistant à associer à la lutte le plus grand nombre de partenaires, en particulier européens, par exemple au sein de « Takuba », un groupement de forces spéciales censées accompagner les Maliens au combat. La réunion avec les chefs d’État des pays du Sahel a ainsi été élargie aux organisations internationales, au président du Conseil européen et aux chefs de gouvernement allemand, espagnol et italien, par visioconférence pour la plupart.Le secrétaire général de l’Onu y a également pris part via internet. Pour rappel, à Pau, les présidents s’étaient entendus pour resserrer les rangs. Depuis, la France a augmenté les effectifs de Barkhane de 500 militaires pour les porter à 5 100. Elle et ses partenaires ont multiplié les offensives dans la zone des trois frontières, revendiquant la « neutralisation » de centaines de djihadistes. Autre succès, la mort dans le Nord du Mali du chef d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), de Abdelmalek Droukdel, tué par les forces spéciales françaises. Mais, par ailleurs, les groupes djihadistes étendent leur emprise au Burkina Faso, qui s’enfonce dangereusement. Chacun admet que les gains réalisés peuvent être annihilés en l’absence d’avancées jugées indispensables sur des fronts autres que militaire, comme la reconstruction politique et civile. Le président mauritanien a souligné « l’évolution préoccupante » de la crise libyenne, l’une des causes majeures de la dégradation sahélienne selon lui. Il a également évoqué l’impact du Covid-19, qui « a déstructuré nos économies fragiles déjà accablées par le fardeau de la dette » et réitéré la « forte demande d’annulation immédiate de la dette de nos États ». Le prochain sommet du G5 devrait se tenir au début 2021.
M. Bendib
