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Procès de l’autoroute est-ouest : nouveau report

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Le procès de l’autoroute Est-Ouest, lié à une vaste affaire de corruption, a été relancé, hier, par le tribunal criminel près la Cour d’Alger, en présence de la majorité des prévenus parmi lesquels, Madjdoub Chani, homme d’affaires algéro-luxembourgeois, principal accusé, en détention provisoire depuis 2009. Le président de la séance, Tayeb Hellali, a ouvert l’audience à 9h45 avant d’appeler les prévenus à comparaître devant la barre. Cette affaire concerne 23 accusés, dont 16 personnes physiques et 7 Groupes étrangers, notamment Cojaal (Japon), Citic-CRCC (Chine), SM INC (Canada), Isolux Corsan (Espagne), Garaventas (Suisse), Pizarotti (Italie) et Coba (Portugal). Ces prévenus doivent répondre à plusieurs griefs retenus à leur encontre, liés à la corruption pour des faits qui remontent à 2009 parmi lesquels, constitution d’association de malfaiteurs, blanchiment d’argent, transfert illicite de capitaux, dilapidation des deniers publics etc. À noter que quatre (4) personnes, dont Medjdoub Chani, sont en détention depuis 2009, alors que deux autres sont en fuite à l’étranger. Lorsque le juge a appelé les témoins par leurs noms, il a relevé que neuf (9) personnes seulement sur dix-sept (17) se sont présentées. Durant le procès, la salle d’audience affiche complet. Un silence olympien a caractérisé les travaux de ce procès, jusqu’à ce qu’un retentissement d’une sonnerie vient gâcher la quiétude des présents, mais surtout celle du juge. «Eteignez vos portables, il s’agit d’une affaire grave et sérieuse. Agents policiers, appliquez-vous, exigez le respect de la discipline !», clame le président de la séance pour affirmer son autorité judiciaire, dans un procès qui s’annonce d’ores et déjà tendu. Pour rappel, l’affaire a été reportée, après s’être ouverte le 25 mars dernier, en raison de l’absence des avocats de Medjdoub Chani, dont Philippe Penning de Luxembourg, et le Français William Bourdon. Cette fois-ci, ces derniers se sont présentés. L’Agence nationale des autoroutes (ANA) s’est constituée partie civile dans cette affaire, a indiqué le juge, avant qu’il n’appelle son représentant et ses témoins, au nombre d’une dizaine, à se présenter. Hellali a tenu à regretter l’absence d’une partie des témoins, tout en rappelant leur liberté absolue de se présenter ou non. Avant l’entame des plaidoiries, le président de la séance a vérifié la présence des traducteurs qu’il appelle d’ailleurs à se placer proche de lui. Me Tayeb Belarif s’est présenté devant le juge et lui a demandé de faire venir les agents de la police judiciaire, le juge d’instruction et le procureur général en tant que témoins, les seuls, selon lui, qui puissent éclairer sur le dossier d’instruction de MedjdoubChani, dont ils ont eu notamment la charge. Une première levée de séance a été observée.
Après sa reprise, le juge a rejeté la requête de la défense en raison de sa non-conformité avec la procédure pénale, et a annoncé la poursuite des travaux. Me Belarif revient à la charge pour récuser la constitution du Trésor public comme partie civile, étant donné que l’ANA s’est déjà constituée. «L’ANA est une entreprise autonome sur le plan financier. Ceci dit, c’est elle qui est préjudiciable et non pas le Trésor», a indiqué un membre du collectif des accusés. Le représentant du Trésor a intervenu pour battre en brèche l’argument de la défense. Il a tenu à expliquer qu’effectivement l’ANA dispose d’un fonds propre, mais qu’elle est financée en partie par la Trésorerie de l’État. «Nous avons le droit de se constituer, décidez, Monsieur le président», a-t-il formulé sa demande au juge. Ce dernier indique que la décision sera prise au cours des travaux de ce procès. L’un des avocats a dénoncé le jugement qu’il qualifie de «deux poids deux mesures», en s’interrogeant pourquoi les entreprises étrangères sont accusées en tant que personnes morales, alors que ses dirigeants sont les responsables des faits de corruption.
Il poursuit sa plaidoirie en demandant l’annulation des poursuites contre son client Sid-Ahmed Tadjeddine Addou. Il a précisé que son client a travaillé conformément à la réglementation étrangère. Le juge a demandé l’avis du représentant du ministère public.
Ce dernier, après avoir rappelé que la loi ne peut poursuivre la personne physique de l’entreprise, et que les faits concernent des entreprises de droits étrangers mais dont les faits se sont déroulés en Algérie. Et, enfin, il a ajouté que le blanchiment d’argent est un acte criminalisé par la législation, avant de rejeter la demande de la défense. «Nous demandons l’annulation des poursuites en raison de l’absence des témoins de Chani», a indiqué un autre avocat de la défense. Me Abderrahmane-Amine Sidhoum a intervenu pour demander d’appliquer la procédure judiciaire pénale au nom du pouvoir de la loi et de la vérité. En effet, il a révélé que le collectif de la défense détient des preuves qui pourraient secouer les consciences.
Il a dénoncé le non-respect de la procédure, en relatant les conditions dans lesquelles Chani a été interpellé, selon lesquelles, il a été arrêté par la police judiciaire le 16 septembre 2009 pour n’en réapparaître que le 28 du même mois. Il a précisé que durant les 20 jours de détention dans un «lieu secret», Chani a subi la torture, l’agression…, a-t-il dénoncé. «La loi de la procédure pénale protège les personnes contre les détentions avant de les écouter par le procureur. Or, aucune preuve sur le P-V de l’interrogatoire n’en fait référence», a-t-il regretté. L’avocat français Me Bourdon s’est présenté et a commencé à s’exprimer en langue française. Le juge lui a demandé de parler en arabe, puisqu’il est en Algérie, lui a-t-il signifié. Un interprète lui a été désigné. Me Bourdon a fait savoir que l’affaire est entre les mains de la juridiction du Luxembourg. «L’Algérie ne dépend pas du tribunal du Luxembourg», a répondu Hellali. «Chani est aussi citoyen luxembourgeois», a ajouté l’avocat français avant d’indiquer qu’il est tout juste une décision qui «honore la juridiction algérienne». Le juge a levé la séance à 12h30. La reprise de l’audience s’est faite vers 14h. Me Sellini, bâtonnier d’Alger, a invité Me Bourdon de respecter le tribunal et l’a même menacé dans le cas contraire de lui retirer l’autorisation de plaider. L’avocat français est revenu à la charge pour demander l’annulation des poursuites à l’encontre de Chani. Le président de la séance le rappelle à l’ordre, et lui réitère que les faits se sont déroulés en Algérie, donc l’affaire sera traitée par le tribunal algérien.
Le procureur a intervenu pour sa part pour demander la poursuite du procès, en rejetant la requête de la défense, celle-ci a menacé de se retirer de l’audience si leur requête n’est pas satisfaite. Le juge a demandé à la défense d’attendre sa décision, avant d’affirmer que le procès se poursuivra.
Un avocat intervient pour dénoncer ce qu’il qualifie d’une tentative de manipulation de l’affaire par un collectif d’avocats étrangers. Le président de la séance s’est adressé à Chani, en lui indiquant qu’il a été abandonné par ses avocats. Le principal accusé dans cette affaire a affirmé avoir déposé plainte d’abord auprès de la justice algérienne, et qu’il s’agit d’une affaire politique dont il a été «utilisé». Et contre toute attente, il a lâché : «Je veux me défendre seul, mes avocats ne me servent à rien, je veux la poursuite du procès», a-t-il déclaré, larmes aux yeux, pendant qu’il raconte les conditions «arbitraires» de son arrestation. À l’heure où nous mettons sous presse, le procès se poursuit.
Farid Guellil

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