La visite de l’envoyé personnel du secrétaire général des Nations unies pour le Sahara occidental, Staffan de Mistura, qui l’a entamée par ses rencontres avec les deux parties en conflit, le Maroc et le Front Polisario, a été une première, depuis 1991, pour un émissaire, car ces derniers , sont en guerre, depuis, 13 novembre 2020. Après ces deux escales, à Rabat et aux camps des réfugiés sahraouis, le diplomate italo-suédois s’est rendu, hier, à Nouakchott, (Mauritanie), et sera aujourd’hui, à Alger, pour des entretiens avec les responsables des deux pays voisins au Sahara occidental, pays observateurs.
Si avant ce déplacement, voire dès sa nomination octobre dernier à ce poste et sa prise de fonction début novembre dernier, le responsable onusien savait déjà que sa mission sera semée d’embûches, lui qui a vu ses prédécesseurs jeter l’éponge, au terme de ses rencontres avec le Maroc et le Front Polisario et leurs déclarations respectives, le responsable onusien vient de saisir amplement le sens des déclarations de son prédécesseur à ce poste, l’américain Chistopher Ross.
Celui-ci qui a eu à superviser un long processus de négociations entre Rabat et le Front Polisario, a affirmé, la veille des rencontres entre De Mistura avec les responsables du Maroc , jeudi dernier et le Front Polisario, dimanche passé, que la partie marocaine est responsable de l’impasse et de l’échec des missions de l’ensemble des prédécesseurs de Mistura à ce poste . Le diplomate américain a déclaré, en effet que « de 2007 à 2019, mon prédécesseur, mon successeur et moi-même avons parrainé 15 sessions entre les deux parties (Front Polisario/Maroc). Malheureusement, rien de ce qu’on pourrait appeler des négociations n’a eu lieu au cours de ces réunions et vous pouvez demander pourquoi ? » . Eh bien, poursuit Ross « c’est assez simple.
Le Polisario est venu à chaque session prêt à discuter des deux propositions (la sienne et celle du Maroc), mais le Royaume est venu avec une condition préalable majeure : qu’il ne discute que de sa propre proposition», alors que les résolutions du Conseil de sécurité sommant les deux parties à aller sur des négociations «sans conditions préalables et de bonne foi». Aussi la tâche de De Mistura est non seulement difficile mais elle intervient, dans un contexte particulier pour celui qui vient d’occuper novembre dernier, un poste, demeurant vacant depuis 2019, date de la démission de son prédécesseur, Horst Köhler et il est le premier émissaire qui rencontre les deux parties en conflit, le Front Polisario et le Maroc, en temps de guerre, déclenchée, 13 novembre 2020, suite à la violation par l’armée marocaine des Accords de cessez-le- feu de1991 de l’ONU , dans la zone tampon de Guerguerrat, au Sahara Occidental.
Le responsable onusien a eu à entendre des responsables marocains, jeudi dernier, la même approche, à l’origine des échecs des ex- émissaires du SG de l’ONU pour le Sahara occidental, dont Christopher Ross, comme il l’affirme dans sa déclaration précitée. La Maroc a en effet réitéré , jeudi dernier, à Staffan De Mistura, cette même approche, indiquant « soutenir la reprise d’ un processus politique sur la base des fondamentaux du Royaume » balayant d’un revers les fondamentaux des Nations unies et des textes de sa Charte, sur lesquelles s’articulent et s’encadrent la mission de l’envoyé personnel du SG et aussi le mandat de la mission de l’Onu pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (Minurso), s’agissant d’une question de décolonisation inscrite à l’ONU et à l’Union africaine (UA).
Côté sahraoui, les responsables du Front Polisario, à leur tête son secrétaire général, président de la République sahraouie démocratique, (Brahim Ghali, ont réaffirmé au responsable onusien, non seulement l’attachement du peuple sahraoui à son droit légitime et indéniable à l’autodétermination mais aussi, de l’impératif rôle de l’Onu, de celui du Conseil de sécurité ainsi que de l’envoyé onusien à faire valoir le droit international, seule voie pour venir à bout aux souffrances du peuple sahraoui, depuis 1975 et au conflit qu’il l’oppose au Maroc, sur le Sahara occidental.
Avec les responsables mauritaniens et algériens, il est certain que De Mistura a été invité à jouer un rôle garantissant la primauté de l’application de la légalité internationale dans ses efforts pour un processus politique de règlement entre le Front Polisario et le Maroc, car c’est la seule issue, pour De Mistura, pour réussir là où ses prédécesseurs ont échoué. Et pour y parvenir le Conseil de sécurité est appelé à peser et amener le Maroc à se plier à la légalité internationale, il y va du rôle de ce conseil et de sa mission en matière de paix et de sécurité dans le monde et donc sur le continent africain.
Karima Bennour