Dans une tribune bien sourcée et publiée tout récemment, l’émérite chercheur marocain, le professeur Aziz Chahir, a brossé un tableau noir de la situation socio-économique du Maroc. Tous les voyants sont au rouge contrairement à ce que tente de faire croire le régime. Résultat de la politique arbitraire et d’une diplomatie aux abois propres à Mohammed VI avec un Exécutif dirigé par l’affairiste Aziz Akhannouch comme facteur aidant, le Royaume court, aujourd’hui, à sa propre perte.
«Alors que la propagande officielle s’évertue en vain à dissimuler la léthargie de l’exécutif, le Maroc sombre dans une crise socioéconomique sans précédent », aborde Aziz Chahir, chercheur associé au Centre Jacques-Berque de Rabat et secrétaire général du Centre marocain d’études sur les réfugiés (CMER). Loin de verser dans la surenchère politique comme peut en témoigner l’analyse objective, bien documentée et étayée par des chiffres, la tribune du chercheur marocain est un véritable brûlot. D’abord contre la gestion des affaires du royaume par le régime de Mohammed VI qui, au prix d’une politique guidée par le triptyque « tyrannie-expansionnisme-normalisation », a broyé le peuple ainsi réduit à courir derrière une miche pour subvenir à ses besoins, comme lors des émeutes du Pain en 1981.
Renchérissement du coût de la vie, accentuation de la sécheresse, explosion de la facture énergétique et des prix des biens alimentaires à l’importation (orge et blé principalement)…, Aziz Chahir présente le tableau d’une situation socioéconomique au bord du précipice. Des marqueurs d’une crise traversée actuellement par le Maroc qui n’est pas sans rappeler à pire les émeutes d’il y a un peu plus de trois décennies, provoquées par « Les année de plomb » incarnées par Hassan II et marquées alors par la violence et la répression contre le peuple marocain.
Aujourd’hui, les indicateurs socioéconomiques sont au rouge et du reste « inquiétants », souligne le professeur qui cite le déficit des échanges de marchandises, la dégradation du déficit commercial, l’augmentation du taux de chômage – notamment celui des diplômés, qui est passé de 18,5 % à 19,6 % –, l’augmentation de la dette publique (près de 80 % du PIB), la baisse des réserves de change, ne couvrant que six mois d’importations de biens et services, ainsi que la diminution des investissements directs étrangers – seulement 10 milliards de dirhams (environ 1 milliard d’euros) –, en recul de 7 % comparé à l’année précédente, et la baisse du taux de croissance (1,1 % selon le FMI contre 3 % prévu précédemment). Dans ce sens, faut-il rappeler que le tarissement des ressources a poussé le Maroc à contracter, mai 2022, auprès de la Banque mondiale, une dette de 350 millions de dollars. C’est dire que le pays présente tous les ingrédients d’une implosion, à considérer en sus les facteurs exogènes récents qui sont liés à la normalisation avec l’entité sioniste et la guerre faite au peuple sahraoui.
La démission de M6 et les mesures « cache-misère » de l’Exécutif
Face à ce péril qui menace pourtant les propres fondements de son royaume, au moment où la contestation de la rue gagne en ampleur au vu de la gravité de la dégradation sur le plan social, Mohammed VI continue à narguer ses sujets en observant un silence qui en dit long sur ses priorités : à savoir suivre le fil rouge de sa politique consistant à siphonner les richesses du peuple. À ce titre, le professeur marocain note qu’ « il faut voir dans ce constat l’œuvre d’un pouvoir démissionnaire qui continue d’amasser les richesses et de mener un train de vie luxueux pendant qu’une grande partie des Marocains voit son pouvoir d’achat s’effondrer jour après jour. » Il ajoute que le roi M6 « ne daigne même pas se manifester et encore moins agir pour atténuer la cherté de la vie. Il est quand même extraordinaire que le monarque continue d’assister en spectateur à la flambée des prix des hydrocarbures qui profitent aux professionnels de la distribution », notamment « au chef du gouvernement, le magnat Aziz Akhannouch, lequel est en même temps le patron de la compagnie pétrolière Afriquia ! »
À l’immobilisme honteusement assumé par le palais de Rabat s’ajoute le silence complice du gouvernement Akhannouch qui, au lieu de s’occuper de la demande sociale, joue le protecteur des intérêts de l’oligarchie. « Des entrepreneurs politiques gèrent la chose publique, au grand dam des forces démocratiques opposées au régime, réduites au silence par les sécuritaires qui craignent la montée des protestations », dénonce Aziz Chahir, non sans mettre à nu les subterfuges du régime consistant à amadouer le peuple par la mesure dite « généralisation de la couverture sociale » et qui n’est à vrai dire qu’un « cache-misère ».
Farid Guellil