Longtemps mise sous le sceau de l’inconnu, la question de révision de la Constitution qui a fait couler beaucoup d’encre, depuis le lancement des consultations autour de son amendement en juin 2014, a été évoquée, hier, par Abdelaziz Bouteflika. En effet, dans un long message rendu public à l’occasion de la célébration de l’indépendance du pays et de la fête nationale de la jeunesse, qui coïncide avec le 5 juillet (aujourd’hui, Ndlr), le chef de l’État a indiqué que ce projet «est en phase de finalisation ultime». Même si cette phrase à la fois furtive et laconique n’en précise pas plus sur les échéances de cette révision, elle vient au moins confirmer que ce qui était considéré comme mise à l’index de la Loi fondamentale, ne s’agit «finalement» que d’une question de calendrier et de temps. C’est du moins ce qui échappe d’une lecture furtive de ce propos.
Elle confirme également les prérogatives qui échoient au chef de l’État concernant cette question, comme cela a été déjà dit par nombre de leaders politiques des partis au pouvoir. À ce titre, à en tenir compte des déclarations des présidents des deux chambres parlementaires sur la question, il est fort à parier que ces deux responsables n’ont pas été tenus informés de l’évolution de la question. Au même titre d’ailleurs que les patrons des deux partis à majorité électorale que sont les FLN et le RND, qui ont chacun de son côté, s’est targué s’être dans le secret des dieux en annonçant des échéances à tout bout de champ, avant que le temps ne les contredise. À l’origine du black-out observé autour du projet donc, il était peu dire donc d’avancer que la révision de la Loi suprême du pays est mise exclusivement sous les auspices de la présidence de la République. Il a fallu attendre une année plus tard, après avoir mené les consultations avec les différents acteurs et partenaires nationaux, pour que le chef de l’État ne s’exprime à nouveau pour assurer là encore qu’il tient toujours à son projet. À ce propos, Bouteflika rappelle ses restructurations engagées dans différents domaines et qui concourent, selon lui, à la «consolidation de l’État de droit». Le président de la République a précisé aussi que la Constitution confortera ces réformes. Laisse-t-il entendre par là que la révision de la Loi fondamentale n’interviendra qu’après l’achèvement des réformes ? Mais puisque le projet est dans sa phase «finale» gageons de dire que son adoption n’est qu’une question de….jours, ou peut être même si tel sera le cas, deux questions qui méritent d’être posées, qui attendent des réponses et demeurent en suspens. Il s’agit du contenu de la mouture de ce projet et de la procédure de sa révision, notamment parlementaire ou référendaire.
Le développement passe par la «stabilité»
Il est presque inconcevable de voir le chef de l’État faire l’impasse sur une situation économique qu’il reconnaît lui-même être inquiétante. En effet, la crise prévalant au pays est marquée par la chute drastique des cours pétroliers mondiaux. Cette situation sévit depuis une année déjà, en juin 2014. Les conséquences de cette fluctuation affectent sérieusement les revenus de la trésorerie de l’État, à tel point qu’en décembre dernier, Bouteflika a réuni en Conseil restreint les membres du gouvernement, où il avait insisté sur la nécessité d’observer un certain nombre de mesures.
En somme, il a appelé à la rationalisation des dépenses publiques et à la relance de la machine productive nationale. D’ailleurs, à travers ce dernier message, le chef de l’État n’a fait que rappeler ses appréhensions et renouveler ses recommandations afin de «traverser cette perturbation économique mondiale», a-t-il souligné. Sinon, le chef de l’État met encore en garde le gouvernement en l’invitant à faire preuve d’une «rationalisation accrue» quant à la gestion des finances publiques. Attendu pour la circonstance, le discours de Bouteflika n’a fait référence à aucune solution «magique» pour transcender la crise, mais appelle bien son exécutif à une gestion budgétaire basée sur le « goutte-à-goutte», car, a-t-il ajouté, plus question de compter sur les «quelques réserves de changes accumulées». En abordant justement le deuxième point lié au plan d’austérité décrété depuis décembre dernier, celui notamment de la diversification et l’intensification de la production hors hydrocarbures, Bouteflika a invité la jeunesse de retrousser ses manches, pour ainsi dire, à relever les défis économiques de l’heure inhérents aux technologies et à la compétitivité. Pour le chef de l’État, cette jeunesse formée et compétente est un potentiel qu’il faudra valoriser. Même si, par ailleurs, il a reconnu l’existence de tracasseries administratives devant lesquelles butent les initiatives juvéniles, Bouteflika a promis d’endiguer ce phénomène.
Il s’agit pour lui de pesanteurs bureaucratiques qui devraient être levées pour libéraliser l’acte d’investir, lequel, s’engage le chef de l’État à mettre à l’abri des fléaux parasitaires de la fraude, a-t-il précisé. Pour cette dernière, le gouvernement s’est lancé dans une véritable bataille pour étouffer le marché informel afin de préserver l’économie nationale. Bouteflika parle d’une fraude qui représente le facteur contraignant numéro un de «l’investissement économique honnête», a-t-il formulé. Tout en rappelant la politique d’investissement adoptée par l’État, Bouteflika a appelé à suivre l’exemple des pays qui ont la même vision idéologique que l’Algérie. Pour lui, si ces pays sont des «puissances» aujourd’hui, c’est parce qu’ils ont mobilisé les capacités nationales publiques et privées et ont recouru à l’investissement étranger.
Enfin, le président de la République a indiqué que le développement passe par un «climat national stable», avant d’appeler le camp de l’opposition à formuler des initiatives alternatives et des propositions politiques, pour semble-t-il, s’assurer d’une stabilité politique interne.
Farid Guellil