Le nouveau Premier ministre, Abdelaziz Djerad, nommé samedi dernier, par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a la délicate charge de former un nouveau gouvernement qui, à la fois, devra avoir la compétence de gérer les affaires du pays, sur tous les niveaux, et surtout la résolution de l’équation du Mouvement populaire en marche depuis plus de 10 mois.
Pris de court par une avalanche d’évènements du moins inattendus, dont la disparition du chef d’état-major de l’ANP, le défunt Ahmed Gaïd Salah, et le bruit de bottes à nos frontières avec, notamment la crise libyenne, le nouveau chef de l’Exécutif ne va certainement pas tarder à former son staff, pour un retour à la gestion institutionnelle, qui fait défaut depuis l’avènement de la protesta.
Depuis le début du soulèvement populaire, porteur de revendications légitimes, le pays s’est retrouvé coincé par une gestion « intérimaire », menée par un chef de l’état par intérim, Abdelkader Bensalah, et un gouvernement chargé de gérer les affaires courantes du pays. Et c’est peut-être pour toutes ces raisons que le défunt Gaid Salah a pris sur ses épaules la mission du retour à des institutions élues et légitimes, d’où son obsession de maintenir le cap sur l’agenda électoral ayant débouché sur l’élection du nouveau président Tebboune, bien-que fragilisé par un faible taux de participation à cette élection controversée.
Maintenant que le pays s’est doté d’un Président du moins sorti des urnes, et un nouveau Premier ministre, le temps est plutôt à la formation d’un nouveau gouvernement, censé remettre le pays sur les rails et répondre aux doléances du mouvement citoyen. La balle est ainsi dans le camp du pouvoir.
L’ancien SG de la Présidence de la République sous Liamine Zeroual, Abdelaziz Djerad, devrait réfléchir, mille fois, sur la composante de son staff qui, à travers une toute petite fausse note, pourrait « saboter » tout le processus de redressement du pays, et porter le coup de grâce à toute l’entreprise de Tebboune. Le mouvement citoyen suit de près l’évolution de la situation, et les personnalités qui figurent dans le futur Exécutif, sont la clé même qui peut ouvrir ou, justement, fermer la porte du dialogue avec le Hirak. Le moindre faux pas de la part du nouveau Premier ministre pourrait élargir, davantage, le fossé qui sépare le mouvement du pourvoir actuel. Le nouveau locataire d’El Mouradia semble vouloir aller dans le sens de l’apaisement et la nomination de Djerad s’inscrit dans cette logique. Car cet ancien conseiller diplomatique au Haut Conseil de l’état (HCA), est un proche du mouvement populaire et de ses revendications, à en croire ses récentes déclarations. Dans une intervention sur les ondes de la Chaine 3, tout au début de la révolte pacifique, l’ancien directeur de l’école nationale d’administration a plaidé pour une réponse sereine « aux revendications légitimes des citoyens » en application des articles 7 et 8 qui stipulent que le pouvoir constituant appartient au peuple et que les Institutions émanent de lui et, de lui seul. Le Premier ministre ira-t-il jusqu’au bout de ses convictions en diapason avec le mouvement, sachant qu’au moment de ses déclarations pro-hirak, il n’était pas encore au service du pouvoir ? Ou va-t-il tourner le dos, maintenant qu’il a intégré les arcanes du pouvoir ? Difficile de le dire certes, mais à la lecture des évènements sur la scène nationale, il est aisé d’en déduire que rien ne pourra se faire en dehors d’un dénouement du bras de fer pouvoir-mouvement citoyen. La perte de 650 000 postes de travail est la conséquence directe de l’avènement du mouvement citoyen qui s’est soldé par l’arrestation de plusieurs chefs d’entreprises et autres responsables pour des affaires de corruption, et dont les répercussions néfastes ont été ressenties, de plein fouet, par des employés appartenant aux différentes entreprises, après la mise sous les « verrous » des patrons d’entreprises, dont les avoirs ont été également bloqués. Pour dire que l’influence du mouvement populaire est indissociable des autres secteurs sensibles du pays. Autrement dit : Toute relance effective des chantiers; inscrits sur le carnet de Tebboune, reste tributaire de la suite à donner aux aspirations du peuple, à travers un dialogue sincère et inclusif, qui ne peut être amorcé en dehors de la libération de tous les détenus d’opinion et politique de l’après 22 février. Une condition sans laquelle l’offre de dialogue du président Tebboune sera inévitablement tuée dans l’œuf.
Brahim Oubellil
PREMIER MINISTèRE
Djerad nomme un directeur et un chef pour son Cabinet
Le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, a procédé, hier, à la nomination de MM. Brahim Bouzeboudjen et Mohamed Lamine Saoudi Mabrouk en qualité respectivement de directeur de Cabinet et de chef de Cabinet, a indiqué hier un communiqué des services du Premier ministre. « Le Premier ministre, Monsieur Abdelaziz Djerad, a procédé, ce dimanche 29 décembre 2019, à la nomination et à l’installation de Messieurs Brahim Bouzeboudjen et Mohamed Lamine Saoudi Mabrouk en qualité respectivement de directeur de Cabinet et de chef de Cabinet », précise la même source.
R. N.