La dernière sortie médiatique du ministre sud africain des Sports démentant catégoriquement la décision prise par son pays de soutenir la candidature de l’actuel N°1 de l’instance morale du football africain, le Camerounais Hayatou, vient relancer le débat quant à la fin de règne d’un président décidément pas comme les autres et qui aura régné en maître absolue sur la discipline la plus populaire sur le continent.
Le dictateur ne doute pas
En pleine polémique née de la médiocre prestation de l’Equipe Nationale d’Algérie lors de la défunte CAN au Gabon, et alors que tous les regards sont braqués sur la bâtisse de Dely Brahim, siège de la Faf, les discussions faisant rage concernant l’avenir de son chef charismatique, Raouraoua, qui maintient entier le suspense quant à son vœu de se lancer dans la course à son auto-succession lors de l’AG Elective prévue fin mars prochain, un autre rendez-vous électoral (vraisemblablement, et drôle de coïncidence, à la fin de la première moitié du même mois, on avance la date du 16) tout aussi important, mais engageant cette fois à un niveau plus élevé, l’Afrique du football lors d’un scrutin devant décider si oui ou non, le continent fera enfin valoir son désir de changement et mettra hors d’état de nuire (c’est le terme) l’indéboulonnable vieux lion, qui comme l’indique l’appellation de la sélection de son pays, a su prouver ses qualités insoupçonnables d’indomptable, en dirigeant les affaires d’une main de fer. Issa Hayatou, en dictateur, sera-t-il comme toujours incontournable à l’issue de ce énième conclave où il partira, fort de son emprise quasi-totale sur un système bien huilée, en grand favori ? Au moment donc où la préparation bat son plein, sur fond de règlements de comptes par procuration visant la gestion Raouraoua, pour une AGE de la Faf très spéciale, et avant de connaître l’avenir du président en exercice (il se dit, en «off», que tous les signes sont là pour un changement inscrit à la logique mise en place pour pousser ce dernier à la sortie et on n’en serait plus très loin au vu des informations en provenance et de Dely Brahim et des cercles qui lui sont proches le donnant pour partant certain), et au moment où l’Algérie du football joue une partie décisive sur un autre terrain où le jeu de coulisses fait rage (on parle ici de la course au Comité Exécutif de la Caf, les chances algériennes étant défendues par celui qui mènera des saisons durant le dur combat d’un entrisme dont il n’est plus utile d’en rappeler les résultats au plus haut niveau de décision en Afrique) loin des résultats de son Equipe nationale qui essuie des tirs de barrages et en passe de voir s’effondrer des années de travail et une dynamique clairement remise en cause après le douloureux intermède gabonais, la tendance (c’est du moins le vœu des tenants du tout – local ) voulant que l’on efface tout et l’on recommence en se permettant le suprême luxe de jeter le bébé avec l’eau du bain. Avec les conséquences fâcheuses que cela devrait impliquer sur le tableau de marche d’une sélection (et donc une génération de haut niveau et portant de surcroit dans le cœur les couleurs du pays) qui nous aura, ne l’oublions pas (un rappel pour ceux qui ont la mémoire courte) valu bien des satisfactions, les jours de Hayatou, à moins de nouveaux rebondissements, semblent comptés.
La preuve par… huit ?
Le sort presque «scellé» comme le suggère, au risque de nous tromper, cette célérité du gouvernement sud africain à remettre les choses à leur place en niant, en des termes claires, la volonté de son pays (du moins pas avant de passer au verdict de l’isoloir qui peut nous réserver, spécificités africaines obligent et comme le veut la tradition, bien des surprises), son total appui à l «Empereur» maintenant que des voix s’élèvent un peu partout pour lui couper la route et l’envoyer à la retraite après près de trois décennies portant sa griffe.
Décrié de toutes parts et contrairement donc aux précédents mandats joués à mains levées et loin de toute contestation, Hayatou, lâché par ses plus grands supporters parmi l’auguste assemblée, serait, disent des sources sûres, plus qu’en danger lui qui, assuré cette fois qu’on ne lui déroulera plus le tapis rouge, est indirectement invité à préparer ses valises. Des soucis à se faire pour une candidature habituée (le vieux lion camerounais, passé maître dans l’art inégalé d’user de la carotte et du bâton), à passer comme une lettre à la poste. Si on dit toute proche la fin de parcours pour Hayatou à la tête de la CAF (l’empereur, et la remarque vaut le détour et pourrait peser lourd dans la balance, a, et l’histoire de tels mouvements est toujours là pour le souligner, plus d’un tour dans son sac) ne s’avoue pas vaincu à l’avance comme il ne sortira pas facilement d’une forteresse (pardon, sa tanière) bâtie à sa taille et autre manigances dont il a le secret en plus de la compromission de nombre de ses pairs. Un lion sûr de ses forces et surtout capable de démentir et balayer, d’un tour de manchette, les rumeurs et repartir pour un autre mandat.
Sans discussion. Sans concurrent valable, tout le monde se dérobant le moment venu pour prêter allégeance et préserver quelques intérêts. Et la question qui se pose avec acuité à un peu plus d’un petit mois pour un nouveau test qu’on pourrait qualifier de joué à l’avance ? Compromis un huitième (une éternité, pour dire combien le «dictateur», comme aiment à le qualifier ses détracteurs et autres amis intimes dont l’ambition s’est limitée à de simples faire valoir, des figurants à la recherche du moindre petit strapontin) mandat de suite à la … suite (à prouver, leurs auteurs risquant des représailles et l’intéressé connaît bien la méthode pour se défaire de ses adversaires affichant leur désir de sortir de la ligne de conduite du « guide», si tant est il en existe) d’actions menées par certaines parties ne dépassant pour l’heure pas les seules colonnes de presse.
Clap de fin ?
En démentant ce qu’il considère comme des rumeurs «infondées», le ministère sud africain ne précise pas les pensées de la fédération spécialisée qui le représente. Ne dit pas clairement si le pays de Mandela, qui accueille cette semaine une réunion conjointe entre le président de la Fifa (ça vaut le détour et on aimerait en savoir un peu plus sur l’ordre du jour, le vrai, ainsi que sur les intentions de la structure dirigée par le successeur de Blatter) et un certain nombre de fédérations du continent, travaillerait à la destitution (par les urnes) de Hayatou en menant campagne contre lui. Un Hayatou (dont le nom est lié à une série de scandales, en tête la grave atteinte aux règlements régissant la rétrocession des droits de retransmissions T.V de la CAN au groupe français «Lagardère Sports» et ce, dans une opacité «unanimement» dénoncée, mais pas trop) qui n’en démord pas et prépare la riposte. Passe aux actes et fait reculer les représentants de l’Afrique australe qui devaient se réunir, sous la bannière de la Cosafa (lire Conseil des Associations de Football en Afrique Australe), pour débattre justement des prochaines élections. Une «marche arrière» qui dénote, si besoin est, de la puissance du «chef» et de l’impuissance affichée dès lors qu’il donne les ordres même si l’on sent un petit vent de contestation souffler sur la maison de verre du Caire où il officie en maître absolu des lieux, à lire la réaction de certains de ses adversaires n’ayant pas apprécié ses menaces en lui rappelant, entre autres, que la Caf, tout inféodée qu’elle est à sa personne, ne peut agir en dehors des principes édictés par la Fifa, autant que l’impérieuse nécessité de s’y conformer, notamment sur les volets liés au respect des droits de l’Homme et de la liberté d’expression. Un Hayatou imperturbable car tenant tout le monde en laisse.
Comme lorsqu’il décidera, à sa seule convenance, de changer les lois en vigueur concernant la condition d’âge lui permettant de briguer (c’est le sujet brûlant) un huitième mandat avec l’espoir, bien sûr, de se présenter en super favori, pour ne pas dire, en candidat unique à sa succession en dépit de l’activité débordante de son concurrent (jusqu’à quand et jouit-il vraiment de cette confiance en mesure de lui permettre de créer la surprise ?), le Malgache Ahmed Ahmed qu’on croit bénéficier de l’appui, avancent des gorges profondes, du N°1 de la Fifa dont les dernières sorties en Afrique peuvent le suggérer, mais sans, encore une fois, afficher publiquement sa préférence.
Les jeux sont-ils d’ores et déjà faits, l’heure pour Hayatou de rendre les clefs de la maison par une succession aussi tranquille que la révolution qu’on dit imminente ? L’agitation constatée sur tous les fronts, ajoutée à l’entrée en scène du président la Fifa, a cela de particulier qu’elle constitue un effet d’annonce. Un baromètre des plus sérieux. Il n’y a, comme on dit, jamais de fumée sans feu. à moins que. Les prochains jours nous en apprendront plus. En attendant, l’empire Hayatou est bien en place. Qui vivra verra pourrait-il rétorquer…
Par Azouaou Aghiles