Les sauveteurs ont poursuivi dimanche les recherches dans les décombres d’une prison au Yémen, cible deux jours auparavant d’une attaque qui a fait au moins 70 morts, des humanitaires insistant sur la responsabilité d’une coalition militaire sous commandement saoudien.
Certains secouristes ont dégagé les débris avec leurs mains, d’autres ont fouillé le centre de détention contrôlé par les rebelles Houthis dans leur fief de Saada dans le nord du pays en guerre depuis 2014. Dirigée par l’Arabie saoudite, la coalition, dont sont membres les Emirats arabes unis, est intervenue en 2015 au Yémen pour soutenir le pouvoir et stopper la fulgurante avancée des rebelles Houthis qui contrôlent aujourd’hui la majeure partie du Nord et la capitale Sanaa. « Les opérations de secours se poursuivent » dans la prison détruite vendredi par une frappe aérienne, a indiqué à l’AFP un porte-parole du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), Bachir Omar. Les secouristes « sont toujours à la recherche de « personnes disparues ou mortes ». Les Houthis et des ONG ont accusé la coalition d’avoir ciblé la prison. Le chef de l’ONU, Antonio Guterres, a lui aussi semblé confirmer la responsabilité de la coalition en dénonçant vendredi « les frappes de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite contre une prison à Saada ». Mais la coalition, qui contrôle l’espace aérien du Yémen, a nié samedi toute responsabilité, accusant les Houthis de « désinformation ».
« Personne ne peut contester » Des témoins ont affirmé avoir entendu vendredi le bruit d’avions survolant le secteur de la prison suivi de trois fortes explosions. « Personne ne peut contester qu’il s’agit d’une frappe aérienne, tout le monde à Saada l’a entendue », a affirmé un membre du personnel non identifié de MSF, cité dans un communiqué de l’ONG tard samedi. « J’habite à un kilomètre de la prison et ma maison a tremblé à cause des explosions. » « C’est la dernière d’une longue série de frappes aériennes injustifiables de la coalition emmenée par l’Arabie saoudite contre des écoles, des hôpitaux, des marchés, des fêtes de mariage et des prisons », a accusé Ahmed Mahat, chef de la mission de MSF au Yémen. Selon cette ONG, la frappe a tué au moins 70 personnes et blessé 138. Un hôpital proche de la prison n’a pas suffisamment de lits et « des blessés gisent par terre », a indiqué un de ses membres. Le « ministère de la Santé » relevant des Houthis a fait état de 82 morts et 266 blessés, un bilan invérifiable dans l’immédiat de source indépendante. Jeudi, la coalition a reconnu avoir frappé la ville portuaire de Hodeida (ouest) aux mains des Houthis, par où transite la majeure partie de l’aide internationale au pays confronté à l’une des pires crises humanitaires au monde. Trois enfants ont péri, selon l’ONG Save the Children, et internet est coupé depuis dans tout le pays. Les frappes au Yémen sont survenues après une attaque au drone et au missile des Houthis le 17 janvier contre des installations à Abou Dhabi, qui a fait trois morts. Les Emirats avaient promis de riposter.
Pas de drones
Signe des inquiétudes persistantes, les Emirats ont interdit pendant un mois à partir de samedi l’utilisation de drones dans le pays. Grand rival régional de l’Arabie saoudite, l’Iran soutient les Houthis mais dément leur fournir des armes et nie régulièrement les accusant saoudiennes et américaines en ce sens. Samedi, la marine américaine a annoncé avoir intercepté un bateau transportant 40 tonnes d’engrais, dont les composants peuvent servir à fabriquer des explosifs, en provenance d’Iran.
Il a été arraisonné dans les eaux internationales du Golfe d’Oman sur un parcours utilisé par les Houthis pour s’approvisionner en armes, selon elle. En plus de sept ans de guerre, toutes les parties au conflit ont été accusées de « crimes de guerre » par des experts de l’ONU. Mise en cause pour de multiples « bavures », la coalition a reconnu des « erreurs » et accuse les rebelles d’utiliser les civils comme boucliers humains. L’ONU tente en vain depuis plusieurs années de mettre fin à ce conflit dévastateur qui a fait, selon elle, 377.000 morts et poussé une population de 30 millions d’habitants au bord d’une famine à grande échelle.