La ville de Hodeida, port stratégique de l’ouest du Yémen et principal front du conflit, reste le théâtre de violents combats et raids aériens qui mettent en péril la trêve conclue en Suède sous l’égide de l’ONU entre forces loyalistes et rebelles Houthis.
Hier, des échanges de tirs sporadiques étaient rapportés par des habitants de cette cité des rives de la mer Rouge qui constitue le point d’entrée des opérations humanitaires au Yémen, pays pauvre ravagé par des années de guerre. «On entend les bruits de raids et d’échanges de tirs sans pouvoir les localiser», a dit un des habitants joints par téléphone, sous le couvert de l’anonymat. Mais ce sont surtout les affrontements et raids aériens de la nuit, les plus violents depuis l’annonce du cessez-le-feu jeudi, qui inquiètent, les belligérants s’accusant d’en porter la responsabilité. Au moins 29 combattants, dont 22 rebelles Houthis, ont été tués dans ces combats, a affirmé à l’AFP un responsable pro-gouvernemental. Ce bilan n’a pu être confirmé de source indépendante jusqu’à présent. Sept rebelles ont en outre été capturés lors d’une offensive des Houthis contre la localité d’Al-Douraihimi, à environ 20 km au sud de Hodeida, a ajouté la même source. L’agence de presse Saba contrôlée par les Houthis a de son côté affirmé que l’aviation de la coalition menée par l’Arabie saoudite continuait de procéder à des raids aériens dimanche dans la province de Hodeida. Elle a accusé les forces pro-gouvernementales d’avoir bombardé samedi soir des quartiers résidentiels de la ville. Tout en notant que les combats avaient baissé d’intensité à l’aube, un habitant de Hodeida a confirmé le caractère «violent» des affrontements de la nuit. Il a noté que le bruit d’avions survolant la ville avait été entendu toute la nuit.
«Réussite»?
Des combats sporadiques avaient été signalés dès vendredi soir dans les quartiers est et sud de Hodeida, au lendemain même de l’annonce du cessez-le-feu conclu en Suède entre les rebelles et les forces loyales au président Abd Rabbo Mansour Hadi. Selon les termes de cet accord, le cessez-le-feu devait pourtant entrer «immédiatement» en vigueur à Hodeida, ville tenue par la rébellion et qui constitue le principal point de fixation du conflit depuis des mois. Le retrait des combattants est lui prévu dans les «prochains jours». Même si la fragilité du processus est connu de tous, les rebelles Houthis avaient qualifié samedi de «réussite» l’accord conclu en Suède au terme des premiers pourparlers depuis 2016. Outre une trêve à Hodeida, cet accord prévoit un échange de quelque 15.000 combattants faits prisonniers ainsi que des mesures pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire à Taëz (sud-ouest), ville aux mains des loyalistes et assiégée par la rébellion.
«Premier pas vital»
Les pourparlers inter-yéménites doivent par ailleurs reprendre fin janvier pour tenter de définir un cadre de négociation en vue d’un règlement global. Depuis 2014, la guerre au Yémen a fait au moins 10.000 morts et des millions de personnes sont menacées de famine dans ce pays où sévit «la pire crise humanitaire du monde», selon l’ONU. La guerre oppose les partisans du gouvernement soutenus depuis 2015 par une coalition militaire dirigée par l’Arabie saoudite aux rebelles Houthis soutenus par l’Iran, le grand rival chiite de Ryad. Conscient de la fragilité de l’accord, l’émissaire de l’ONU au Yémen, Martin Griffiths, a réclamé dès vendredi le déploiement au plus vite d’observateurs internationaux à Hodeida et dans des ports de la province. «Permettre à l’ONU d’avoir un rôle dirigeant dans les ports est un premier pas vital. Nous devons voir cela arriver dans les jours qui viennent», a argué M. Griffiths lors d’une liaison vidéo avec le Conseil de sécurité depuis ses bureaux établis en Jordanie. Selon des diplomates, quelque 30 à 40 observateurs pourraient être déployés à Hodeida, ville d’environ 600.000 habitants. Dans le conflit yéménite, d’autres points de blocage persistent, notamment celui concernant l’aéroport de Sanaa. La capitale elle-même est entre les mains des rebelles Houthis depuis 2014. Lors des pourparlers de Suède, aucun accord n’a été trouvé sur cet aéroport international dont l’ouverture est réclamée avec insistance par les rebelles et qui est soumis à un embargo de fait de la coalition.