La classe politique marocaine, tétanisée par les pratiques du Makhzen et l’impact du processus de normalisation des relations diplomatiques avec l’entité sioniste, commence à sortir de sa léthargie pour exprimer clairement son rejet du rétrécissement du champ des libertés individuelles et des nombreuses atteintes aux droits de l’Homme.
La récente déclaration du Mouvement Justice et Bienfaisance (harakat El-Adl Wel-Ihsane), qui avait formé avec le parti islamiste Justice et développement une coalition pour permettre à El-othmani de diriger le gouvernement marocain sortant, à la suite de l’incarcération et la condamnation, pour une publication sur sa page Facebook, à six mois de prison ferme du jeune blogueur Yasser Al-abadi, traduit l’irritation de la classe politique qui s’interroge sur les réelles motivations du Makhzen qui se livre à une véritable chasse aux sorcières contre toutes les voix discordantes. «C’est une énième honte qui s’ajoute au passif triste et douloureux des autorités marocaines en terme de respect des droits de l’Homme et le respect du droit à l’expression », indique la déclaration du mouvement Justice et Bienfaisance qui est en train de voir ses rangs se renforcer par l’arrivée massive de cadre et de militants du PJD, « déçus par ces politiques dangereuses et les compromissions de sa direction qui ont conduit à la normalisation des relations avec Israël et à la paupérisation de larges couches de la société marocaine », ont indiqué des observateurs marocains. Dans une déclaration publiée sur sa page facebook, sous l’intitulé « le Maroc en déclin », le mouvement dénonce le déclin des droits de l’Homme et le recul sans précédent des libertés et le droit à l’expression au royaume ». Il souligne que la politique répressive du Makhzen a fait taire toutes les voix discordantes émanant des journalistes et des blogueurs ». Dans ce cadre, il faudra rappeler que le même constat a été établi, il y a quelques jours par le journaliste opposant, Ali Lamrabet, qui avait dénoncé l’embrigadement, par le Makhzen, des organisations syndicales et des syndicats de la presse pour les pousser à adopter ses thèses et à applaudir ses décisions. « J’attendais de la solidarité de mes confrères journalistes marocains, mais je n’ai reçu que condamnation et délation », avait-il indiqué pour expliquer comment le Makhzen est en train de mettre sous sa coupe les organisations syndicales, des associations de la société civile et des partis politiques pour tenter de tuer dans l’œuf la grande vague de condamnation des politiques des autorités, en gestation, notamment en matière de normalisation avec l’État hébreu. Il y a lieu de rappeler, dans ce cadre, que le jeune blogueur Yassir Al-Abidi a été condamné pour une simple publication sur les réseaux sociaux dans laquelle il avait commenté la gestion hasardeuse et les pratiques autoritaristes du régime marocain, dont l’arrestation et la torture de personnes, durant le confinement sanitaire du Covid-19. Pour le mouvement, la condamnation du blogueur traduit la profondeur de la crise morale dans laquelle patauge le régime marocain, confirmant une fois de plus son caractère cynique. Poursuivant son constat, le mouvement a souligné que la politique adoptée par le Makhzen n’a produit que frustration et déception chez les citoyens, précisant que les images des enfants marocains qui fuient le pays illégalement vers d’autres pays en quête d’un ciel plus clément est la meilleure preuve de l’échec total des autorités et désormais de leur illégalité. Ce constat est un véritable réquisitoire et au-delà de la virulence des propos qu’il contient, il constitue une vision que partage une large majorité de marocains qui relèvent le caractère illégal des autorités qui gèrent le pays. Cela laisse supposer que le palais royal est sur une véritable poudrière qui risque d’exploser à n’importe quel moment. La crise économique, la pandémie, la normalisation des relations avec l’État hébreu et le faste dans lequel vit la famille royale et sa périphérie, ont fragilisé le sentiment de soumission aux décisions du commandeur des croyants qui risque de voir son trône ébranlé dans les prochains jours par un large mouvement de contestation sociale. Le mouvement estime que le plus triste dans ce paysage sinistre « est que les autorités marocaines poursuivent, toute honte bue, leur fuite en avant et verrouillent désormais tout canal ou voix contradictoires, affirmant que cette démarche va à l’encontre de ce qui se passe à l’échelle mondiale où la garantie des libertés gagne de plus en plus du terrain. À rappeler que le Maroc, qui ferme souvent le classement des pays en terme de respect des droits de l’Homme, a décidé récemment de renforcer son arsenal juridique pour criminaliser désormais toute manifestation ou voix contestant sa politique de normalisation avec l’entité sioniste. Mais cela ne semble pas affecter la détermination du peuple marocain qui continue, chaque jour que Dieu fait, de manifester son rejet de tout rapprochement avec Israël.
Slimane B.