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Syrie Fuir l’EI de peur de devenir bouclier humain

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Lorsque Saada al-Aboud a vu les jihadistes du groupe Etat islamique (EI) transporter des armes dans son village, à une trentaine de kilomètres de leur bastion syrien de Raqa, elle a préféré fuir avec sa famille de peur de servir de bouclier humain. « Les combattants de Daech (acronyme arabe de l’EI) ont positionné leurs armes lourdes dans notre village et se sont installés au milieu de nous. S’il y avait une frappe, nous étions la cible », explique à l’AFP cette femme de 45 ans originaire d’al-Hicha, à 40 km au nord de Raqa.

Comme pour les autres habitants, les jihadistes ne l’ont pas laissé, partir. « Nous avons dû fuir à travers champs avec nos enfants et les personnes âgées. Que pouvions-nous faire? Nous avons tout laissé derrière nous », raconte cette paysanne assise à l’arrière d’un pick-up, le menton tatoué, vêtue d’une robe noire et coiffée d’un foulard. Le village était déjà contrôlé par l’EI, mais face à l’offensive lancée samedi par l’alliance arabo-kurde des Forces démocratiques syriennes (FDS) soutenue par les frappes aériennes d’une coalition internationale dirigée par Washington, les jihadistes ont installé des pièces d’artillerie. Au troisième jour de l’offensive, les FDS sont parvenues à 36 km de Raqa en s’emparant d’une poignée de villages et de hameaux. L’opération coordonnée en Irak et en Syrie a pour but de faire tomber le « califat » autoproclamé en juin 2014 par le chef de l’organisation extrémiste sunnite, Abou Bakr al-Baghdadi. Les combats dans cette région inhospitalière du nord de la Syrie ont poussé des dizaines d’habitants à fuir le territoire sous contrôle de l’EI et à se diriger vers le Nord-ouest, à bord d’une vingtaine de pick-ups et camionnettes. « Nous avions peur des avions et des combattants de l’EI », témoigne Wazira al-Jily, 34 ans, elle aussi coiffée d’un foulard noir, originaire d’Al-Touwaila. « Quand les raids ont commencé, nous nous sommes débarrassées de nos burqas (…) et nous sommes parties », ajoute cette femme entourée d’enfants à l’arrière du pick-up.

«Nous mourions de faim»
La plupart des jeunes femmes sont coiffées de foulards aux couleurs vives, bleu, rose ou vert et portent sur elles leurs bijoux. Souvent, elles sont souriantes et paraissent soulagées. Certains ont détalé à mobylette, d’autres sont partis à pied avec leurs moutons et leurs chèvres. Les combattants des FDS les ont stoppés à quelques kilomètres d’Aïn Issa, leur quartier opérationnel, vérifiant leurs identités et fouillant leurs affaires afin d’éviter toute tentative d’infiltration par les jihadistes. Les membres de l’EI ont déjà utilisé à plusieurs reprises la tactique meurtrière consistant à faire sauter des voitures piégées, ce qui suscite la méfiance des FDS. Les civils attendent patiemment la fouille avec leurs sacs. Des combattants des FDS offrent des boissons gazeuses. « Dieu merci, nous sommes libres. La situation était terrible », affirme Mohammad Mahmoud Ismaïl, assis sur une mobylette conduite pas son fils.
« Un sac de pain coûtait 400 livres syriennes (0,80 USD). Nous crevions de faim », assène-t-il. « Si vous vous rasiez, vous étiez condamné à une amende de 30.000 LS (60 USD), jeté en prison, la carte d’identité confisquée et pour la récupérer il fallait suivre des cours sur la loi islamique. » Dans un autre véhicule, une femme d’une cinquantaine d’années fume avec délectation une cigarette. « Elle vaut tout l’or du monde », exulte Hiza al-Attiya en aspirant la fumée. Fumer était interdit par l’EI.

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