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Sahraoui Benallal, DG de l’ONILEV, au « Courrier d’Algérie » : «mieux vaut gérer une situation de surproduction qu’une pénurie…»

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Sahraoui Benallal, directeur général de l’ONILEV (Office national interprofessionnel des légumes et viandes) est catégorique : la contractualisation des relations entre les différents intervenants dans la filière agricole est seule à même d’assurer un développement régulier et serein de celle-ci. Dans l’entretien qu’il nous a accordé hier, il nous détaille ses arguments, et nous parle des missions assignées à l’Office qu’il dirige.

Le Courrier d’Algérie : -Le premier contact, que nous avons eu avec vous, avait porté sur le problème soulevé dans certaines wilayas par des agriculteurs qui s’en sont plaints du stockage de la pomme de terre : y a-t-il un problème de stockage de ce produit à l’échelle nationale?
Sahraoui Benallal : -Le problème de stockage ne se pose pas. Le problème qui s’est posé était de savoir comment stocker le surplus de production enregistré. Les agriculteurs avaient demandé à accroître les quantités de pomme de terre à stocker, arrêtées lors de la réunion du Comité interprofessionnel ministériel (CIM), tenue en décembre dernier. Fixées à 40 000 tonnes, ces quantités ont été portées à 60 000 tonnes lors de la réunion tenue en début janvier, par le même Organisme. Je tiens à vous informer que les 40 000 tonnes arrêtées en premier ont déjà été stockées, alors que les 20 000 tonnes sont en cours de l’être. Il faut trouver des aires de stockage et définir les conditions dans lesquelles ces quantités supplémentaires arrêtées le seront. Il faut savoir que le stockage se fait dans des infrastructures qui n’appartiennent pas en propre à l’ONILEV, mais à des opérateurs aussi bien publics que privés, avec lesquels il est lié par des contrats. Et que le stockage, qui se fait dans le cadre du SYRPALAC (Système de régulation des produits agricoles de large consommation), ne concerne que les agriculteurs qui y ont adhéré sur la base, là aussi, de contrats.

– Dernièrement, le ministre a parlé d’une révision du SYRPALAC. Sur quoi portera cette révision. Et, question subsidiaire, a-t-elle été décidée sur la base de failles ayant été décelées ou du fait du développement constaté, ces dernières années, du secteur agricole et de l’augmentation de la production qui en a découlé?
– Avant de vous répondre, je voudrais faire l’historique de ce dispositif pour mieux faire comprendre aux lecteurs ses missions et ses objectifs. SYRPALAC a été mis en place dans une conjoncture difficile pour notre économie, du fait de la crise qui avait, alors, affecté l’économie mondiale. C’était en 2008. L’État n’est pas resté les bras croisés. L’objectif premier est de protéger les intérêts, et du producteur et du consommateur. Et ce, par le développement du stockage de tout surplus de production ; l’objectif étant de rassurer les agriculteurs, quant à l’existence d’un débouché sûr à leur production. Bien mieux, pour inciter les agriculteurs à y adhérer, les pouvoirs publics se sont engagés à prendre en charge les frais de stockage, et ce, par l’octroi de primes (de stockage) par kilogramme et par mois stocké. Les résultats ne se sont pas faits attendre confirmant l’efficience de ce système. Dont les protagonistes initiaux, outre les producteurs, ont été les DSA (Direction des services agricoles) des différentes wilayas et la SGP-PRODAL (Société de gestion des participations Productions animales»), une entreprise publique économique disposant, en propre, de moyens de stockage, qui, elle, dans certains cas, achète directement aux agriculteurs leur production ; l’ONILEV n’ayant été créé qu’en 2009, et n’est devenu, effectivement, opérationnel qu’en 2013. Et l’un des objectifs initiaux était d’assurer un approvisionnement régulier du marché durant les périodes de soudure.

– Et, à ce propos, quelles sont les missions de votre Office?
– L’ONILEV est chargé de la régulation du marché par le stockage du surplus de production. Et ce, sur la base de conventions avec des opérateurs publics et privés disposant d’infrastructures en la matière ; les opérateurs publics ayant, surtout, la charge de constituer les stocks de sécurité. Une charge dont ils s’acquittent par des achats directs, à des prix référentiels déterminés après étude, auprès des agriculteurs. Pour en revenir aux résultats précités, il faut savoir que la production de la pomme de terre, qui était de l’ordre de 1,5 million de tonnes en 2007, avoisine, aujourd’hui, les 5 millions de tonnes.

– Une augmentation qui a été obtenue grâce au SYRPALAC ?
– Bien sûr. SYRPALAC a débarrassé les agriculteurs qui y ont souscrit du souci, naguère récurrent, de trouver un débouché à leurs productions.

– Ils sont nombreux les agriculteurs qui y souscrivent…
-Grâce à l’action conjuguée de toutes les parties concernées, leur nombre est en constante progression.

– Pour rester avec la pomme de terre, on parle d’une forte production de saison. Votre Office s’est-il préparé à y faire face ?
– L’ONILEV est prêt à faire face à toutes les éventualités. Surtout qu’il n’agit pas seul, mais en concertation avec tous les intervenants dans le secteur : ministère, organismes, instituts techniques, agriculteurs et leurs représentants. Le développement du secteur agricole ne peut provenir que de la concertation permanente entre tous ceux qui y interviennent.

– Je voudrais revenir sur la révision annoncée du SYRPALAC. Qu’est-ce qui la motive ?
– SYRPALAC a atteint un de ses objectifs essentiels : l’augmentation de la production, à savoir. Et, partant, la disponibilité quasi permanente sur les étals des marchés de tous les produits agricoles. Présentement, nous sommes en train de planter onze mois sur douze et de récolter douze mois sur douze. C’est un fait que, honnêtement, nul ne peut nier. Une situation, entre autres, qui impose la révision de SYRPALAC pour mieux l’y adapter. Et là, je dois vous dire que je préfère, de loin, gérer une situation de surproduction qu’une situation de pénurie. Mais je dois reconnaître que des problèmes demeurent en aval. Tel celui de la commercialisation. Dont la résolution appelle l’intervention d’autres secteurs, entre autres, les départements du Commerce, des Finances, de l’Intérieur et de l’Industrie…

– Surtout que la spéculation sur certains produits demeure toujours…
– …cela ne relève pas de notre compétence. Nous nous occupons de l’augmentation de la production et du stockage de son surplus… Pour en revenir aux solutions aux problèmes de surproduction, la transformation en est une. Surtout que de nouvelles régions du pays sont devenues des régions de production agricole. Comme c’est le cas des Hauts-Plateaux et du Sud, et même du Grand-Sud. Des données qui ont quasiment rendu caduques les notions de «production de saison, d’arrière-saison…». Je vous l’ai dit : nous plantons onze mois sur douze et nous récoltons douze mois sur douze…

– Quels sont les autres produits sur lesquels votre Office intervient ?
– La semence de la pomme de terre, la tomate, l’oignon, l’ail, les viandes blanche et rouge…

– Pour la tomate, on a parlé, ces derniers jours, de grosses quantités qui ont été jetées par les agriculteurs d’une wilaya du Sud, et ce, faute de débouchés…
-…Non, il n’y a pas eu de tomates jetées, mais plutôt effondrement des prix. Et, là, je voudrais apporter deux précisions concernant ce problème : c’était une production précoce, et il semble que c’était de la tomate destinée à la consommation et non pas à la transformation ; la seule variété qui peut l’être (transformée) est la tomate industrielle…

– L’ONILEV a-t-il le même type de contrats avec les producteurs de tomate que ceux qu’il passe avec ceux de pomme de terre?
– Non. Il ne faut pas confondre. Il y a un programme spécial qui concerne la seule tomate industrielle. Nous signons des conventions avec des conserveries. Dont le nombre est en progression constante. De 16 en 2013, il est aujourd’hui de 20 conserveries avec lesquelles l’ONILEV est lié par contrat. Surtout que la production de cette variété de tomate est également en augmentation constante. Avant 2013, elle était de moins de 200 000 tonnes, en 2013, elle est montée à 330 000 tonnes, en 2014, à plus de 400 000 tonnes et, l’année dernière, à plus de 600 000 tonnes. Une production qui a été obtenue dans nombre de wilayas du pays, dont celles du Sud.

– Et pour les autres légumes ?
– L’ONILEV est toujours présent sur le terrain pour en réguler le marché. En 2013, l’Office est intervenu pour faire face à la surproduction enregistrée cette année. Nous avons alors stocké, au grand bonheur des producteurs, un peu plus de 110 000 tonnes…

– Qu’en est-il des viandes ?
– Les choses sont déjà rodées avec les producteurs de viande blanche. Et le sera sous peu avec ceux de viande rouge. Nous seront grandement aidés dans notre tâche par la mise en service prochaine des trois grands abattoirs en cours de réalisation dans les Hauts-Plateaux.

– Un mot pour conclure…
– Avant cela, je voudrais dire que l’exportation peut être une solution au surplus de production. Les agriculteurs de la wilaya d’El-Oued, avec l’exportation en direction de certains États du Golfe et de l’Espagne de certaines quantités de pomme de terre, ont montré la voie. Pour conclure, je tiens à réaffirmer, pour mieux en souligner les vertus, que les résultats obtenus par l’ONILEV sont le fruit d’une concertation suivie avec tous les intervenants dans le secteur agricole. Mais également de la contractualisation de toutes nos relations avec eux. Deux éléments qui sont les vecteurs de l’action des autorités nationales en charge du secteur agricole. Et qui lui ont permis de réaliser les progrès indéniables qu’il est en train d’accomplir depuis quelques années. Une dernière chose, si vous permettez. Je suis convaincu qu’un meilleur développement du secteur sera obtenu avec la création de coopératives, au niveau de chaque filière de production et entre les intervenants dans chacune d’elles.
Entretien réalisé par Mourad Bendris

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