Le calvaire du TP Mazembe à l’aéroport de N’djili, à Kinshasa, met en lumière les dysfonctionnements logistiques dans le football africain. Entre vols annulés, nuits blanches et retards successifs, la délégation des Corbeaux a dû lutter contre bien plus que ses adversaires sportifs : la Royal Air Maroc leur a réservé un véritable parcours du combattant aux impacts désastreux.
Le TP Mazembe, habitué à gérer les grandes compétitions avec rigueur et professionnalisme, a vu sa préparation pour la 2ᵉ journée de la Ligue des Champions CAF sérieusement perturbée par une série de mésaventures aériennes. Mercredi 4 décembre, l’équipe de Lubumbashi quitte son fief avec un itinéraire clair : rejoindre Nouakchott via Kinshasa et Casablanca pour affronter Al Hilal dimanche soir. Cependant, ce qui devait être un voyage de routine et dans de bonnes conditions pour les sportifs et le staff s’est transformé en cauchemar logistique, non sans conséquences.
Tout commence jeudi matin à l’aéroport de N’djili. La délégation est prête à embarquer sur un vol Royal Air Maroc programmé à 6h15. Après avoir pris place dans l’avion, les passagers attendent trois heures sans explication avant d’être débarqués. La cause avancée, » un problème technique sur le Boeing 737-800 immatriculé CN-ROJ ». Les aiguilles de la montre tournent et à 10h30, , alors qu’ils attendaient de se voir enfin prendre le chemin vers le ciel, la nouvelle tombe : « le vol est annulé ». Selon des médias locaux et des sources spécialisées , « une pièce défectueuse devait être remplacée, nécessitant son importation depuis le Maroc le lendemain ». Pendant ce temps, si des passagers, notamment des médecins marocains et congolais, ont été hébergés dans un petit hôtel local », d’autres, dont les joueurs du TP Mazembe, ont dû passer la nuit à l’aéroport. Le vol initialement prévu à 6h15 est reprogrammé pour vendredi à 00h05. Cependant, ce n’est que le début des désillusions.
La journée de jeudi est marquée par une désorganisation totale. Quitter l’aéroport pour trouver un hébergement, réorganiser la logistique et maintenir la cohésion mentale des joueurs devient une priorité pour Lamine Ndiaye et son staff. Mais alors que l’équipe s’accroche à l’idée d’un départ imminent, un nouveau rendez-vous à l’aéroport vire au fiasco.
Jeudi soir, à 21h30, l’avion est prêt à décoller. Cependant, une fois aligné sur la piste, une alarme retentit dans le cockpit. Le pilote décide de revenir au tarmac. La délégation est une nouvelle fois débarquée à 3h00 du matin. Résultat : une deuxième nuit blanche pour les Corbeaux et, surtout, une correspondance pour Nouakchott manquée.
Royal Air Maroc dans le viseur
La gestion déplorable de la situation par Royal Air Maroc est au cœur des critiques. Malgré des annulations en série et des promesses non tenues, aucune communication claire n’a été faite auprès des passagers. Laisser des professionnels passer deux nuits blanches dans un aéroport, sans solution immédiate ni prise en charge adéquate, témoigne d’un mépris évident des engagements, des standards de service qu’une compagnie aérienne est sommée de garantir.
Ce fiasco et scandale qui frappent la Royal Air Maroc, deviennent encore plus préoccupant alors que le Maroc s’apprête à accueillir la Coupe d’Afrique des Nations 2025. Si compagnie marocaine et supposée vitrine du royaume, s’est vu clouer au sol et incapable de prendre en charge efficacement l’impact de cette situation impliquant le blocage des jours d’un club sportif en déplacement pour un match, qu’en sera-t-il pour la CAN, où des équipes et des centaines de supporters qui devront compter sur les vols de la Royal Air Maroc ? Des problèmes techniques peuvent survenir certes, mais l’abandon dans l’incertain et absence de prise en compte de la responsabilité engagée de la compagnie royale à l’encontre des clients durant des heures et jours, frappent de plein fouet non seulement la crédibilité et l’image de la Royal Air Maroc, mais aussi le Maroc. Dans ce cas précis, Royal Air Maroc a non seulement failli à son devoir d’assistance, d’accompagnement de ses passagers et de les ramener à bon port, elle a également compromis la préparation d’une équipe engagée dans une compétition internationale. Le Maroc ne cessant de promouvoir une image de « hub » africain, notamment en matière de transport aérien, l’histoire de l’avion planté au sol et sans suite, pour libérer les footballeurs de ce cauchemar de rater la compétition par des annonces trompeuses durant des heures de voir l’avion reprendre du service démontre une réalité différente. Royal Air Maroc, loin d’être à la hauteur des attentes de ceux qui la sollicitent des voyageurs africains, dont l’équipe du foot devant disputer un match décisif, il est à s’interroger si l’avion marocain aurait été cloué au sol en raison de soucis techniques sans recourir par la suite à dépêcher un autre si l’équipe de foot représentait un club de pays occidental.
Toute une préparation sabotée
L’impact de cette odyssée logistique sur la préparation de l’équipe est immense. Deux nuits passées dans les salles d’attente de l’aéroport, des heures d’incertitude et de stress, et l’incapacité de suivre une routine physique et mentale appropriée pour un match crucial. Vendredi après-midi, le moral est au plus bas, mais le staff tente de maintenir un semblant de normalité en organisant des exercices de réveil musculaire sur place.
Un vol pour Casablanca est finalement annoncé pour hier, à 4h00 du matin. Toutefois, la Royal Air Maroc ne garantit toujours pas à l’équipe une correspondance pour Nouakchott. Les joueurs restent suspendus à une série d’incertitudes qui compliquent davantage leur voyage et aussi leur condition physique et morale déjà affectées, depuis jeudi dernier.
Une plainte contre la RAM auprès de la CAF
Face à ce calvaire, la direction du TP Mazembe décide de saisir la Confédération africaine de football (CAF). L’objectif : dénoncer les conditions dans lesquelles se trouve l’équipe et les dysfonctionnements de la Royal Air Maroc. Le club estime que ces contretemps, causés par des problèmes techniques à répétition, nuisent gravement à sa préparation pour une rencontre aussi importante.
Le club a également demandé un report du match face à Al Hilal, prévu aujourd’hui, en raison des jours perdus en transit dans des conditions lamentables qui ont empêché les joueurs de suivre leur programme d’entraînement et la perte du potentiel acquis avant le début de leur cauchemars.
L’équipe a perdu de son potentiel bien avant le coup de sifflet du match ?
Le TP Mazembe a finalement décollé de Kinshasa hier, à 5h15, mettant fin à plus de 48 heures d’enfer. L’équipe espérait atteindre Nouakchott dans la soirée d’hier, à moins de 24 heures du coup d’envoi contre Al Hilal. Mais dans quel état seront-ils à l’arrivée ? La fatigue accumulée, le stress et l’absence de conditions optimales de récupération pourraient peser lourd dans la balance. Le football est un jeu d’endurance, de stratégie et de préparation. Mais pour les Corbeaux, ce match contre Al Hilal semble avoir bien commencé bien avant le coup de sifflet. Reste à savoir si l’équipe saura surmonter cette épreuve et offrir une performance à la hauteur de sa réputation.
Mohamed Amine Toumiat