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Le personnel médical face au Covid-19 à Oran : Faire reculer «l’ennemi invisible»

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Des médecins et des infirmiers d’Oran ont préféré renoncer à la chaleur de leurs foyers pour des chambres d’hôtel impersonnelles et anonymes.

Confinés loin de leurs familles, ils sont mobilisés au centre Covid19 de l’EHU «1er-Novembre» pour relever le défi : celui de sauver des vies en exposant la leur au danger. Incontestablement, la majorité des praticiens de la santé méritent toute la considération et la reconnaissance de la société pour avoir répondu, sans hésiter ou réfléchir, à l’appel. «C’est un devoir», se contente de dire le Pr Lellou, pneumologue de formation et coordinateur du centre Covid19 de l’EHU d’Oran. À 75 ans, il ne compte plus les heures de présence sur son lieu de travail. Tel un soldat sur le front, son seul souci : faire reculer «l’ennemi invisible». Toujours au chevet de ses patients, des cas confirmés de Covid19, le Pr Lellou, arrive au bureau dès 8h00 du matin pour ne repartir que vers minuit. Un rythme éprouvant. «La satisfaction de voir les gens guérir et rejoindre leurs familles en vaut la peine», précise-t-il, avec cette expression de sérénité qui ne le quitte jamais. Le calme et la sérénité de ce spécialiste qui se déplace d’une chambre de malade à l’autre, avec un minimum de protection, est presque déconcertant. «C’est un peu mon caractère. J’ai toujours eu cette capacité de contrôler mes émotions», reconnait-il. «Cette mission d’être auprès des malades du Covid19, je l’ai acceptée naturellement», explique sans regret ce spécialiste, estimant que «lorsqu’on prend la décision d’intégrer la corporation des blouses blanches, on doit se préparer à faire face à toutes les situations, même les plus difficiles».

S’exposer au danger de la contamination
Hanane est une jeune infirmière. Elle vit depuis plusieurs semaines une situation particulière. Réquisitionnée avec l’équipe du Pr Lellou, elle s’est vue obligée de se séparer de sa fille âgée d’à peine un an, pour la confier à ses grands-parents, cessant brusquement l’allaitement du bébé. «Un sevrage en catastrophe», regrette-t-elle, tout en reconnaissant qu’elle avait elle-même du mal à accepter cette soudaine séparation. Malgré son inquiétude, elle préfère positiver. «J’espère que la pandémie disparaitra pour qu’on puisse reprendre nos vies habituelles», avance-t-elle, avec un soupir qui en dit long sur la peine qu’elle endure, tout comme d’aut res mamans traversant ce genre de situations. «Nous avons toutes et tous des familles qui nous attendent et qui ont besoin de notre présence au quotidien t qui s’inquiètent pour nous», rétorque Nassima, une jeune infirmière qui a choisi volontairement de rejoindre l’équipe Covid19 de l’EHU. Travaillant au sein du service de chirurgie maxillo-faciale, elle fait le choix de rejoindre l’équipe du Pr Larbi Khemliche, chef de service de réanimation, réservé aux cas les plus graves du coronavirus. Le ton ferme et le regard déterminé, Nassima estime qu’elle ne fait que répondre à l’appel du devoir. «Le pays a besoin de nous», lance-t-elle d’une voix pleine de conviction et de fierté. Dans le service de réanimation, malgré la grande pression que vivent les équipes médicales, une certaine ambiance familiale se ressent. Dans une grande salle, autrefois réservée aux réunions, médecins et paramédicaux se retrouvent, discutent, plaisantent, rirent ou partagent les repas. «Cette ambiance nous permet de décompresser et de se ressourcer», reconnait le Pr Khemliche, qui passe beaucoup plus de temps à son poste depuis la mise en service du centre Covid19 à l’EHU. Si toutes les équipes médicales en charge des cas du Covid19 sont exposées, le risque est multiplié par 160 dans la salle de réanimation. Les soins des malades intubés exigent des médecins et des paramédicaux un contact très étroit. «Il n’y a pas que les soins à prodiguer, il faut changer les malades et les nettoyer», explique le même spécialiste. Ce chef de service, présent à son service toute la journée, sept jours sur sept, demeure un moment silencieux lorsqu’on l’interroge sur les risques d’exposition et la mort. Son flegme, affiché jusqu’alors, fléchit pour céder sa place à une vive émotion. Les quelques secondes que dure son silence semblent longues et interminables. Plongé dans la réflexion, il finit par lâcher : «la foi est mon seul refuge dans les moments de doute, de peur et d’angoisse». Malgré ses bonnes convictions et son incontestable professionnalisme, le Pr. Khemliche, père d’enfants en bas âge, se sent parfois vulnérable. «Dans ces moments où le bout du tunnel semble lointain, il n’y a que la foi qui peut nous redonner confiance «, dit-il d’une voix vibrante.

Se reposer, un vœu pieux
Le rythme de travail dans les services qui prennent en charge les cas Covid19 est souvent infernal. Les équipes médicales et paramédicales ne comptent plus leurs heures. Les chefs de service sont mobilisés toute la journée, tous les jours de la semaine et jusqu’à des heures impossibles. A la réanimation, les paramédicaux sont censé s assurer des brigades de six heures, mais une bonne partie choisit de prolonger les horaires de travail pour se consacrer entièrement aux patients. «Nous sommes plus utiles ici qu’à l’hôtel, où tout le monde est confiné», soutient Nesrine, une infirmière au service de réanimation. Au centre de tri, aménagé au niveau de la crèche de l’EHU, la chef de service, le Dr Tayeb, seule infectiologue de l’établissement hospitalier, est épuisée. Elle est le premier médecin à recevoir les cas suspects et confirmés comme elle se charge des premiers examens et de l’orientation du malade. Une trentaine de patients se présentent chaque jour au centre de tri. Après un entretien pour mesurer le risque d’exposition de ces personnes, selon les cas, certains subissent des tests rapides. D’autres des testes standards. Certains sont soumis à un scanner. Les autres sont priés de rentrer chez eux et de rester vigilants jusqu’à l’éventuelle apparition des symptômes. La mine épuisée, les yeux cernés et le regard vide, le Dr Tayeb continuera sur le même rythme jusqu’à la fin de sa journée. «C’est notre devoir. Les patients ont besoin de nous «, dit-elle, ajoutant qu’il n’est pas question pour elle de faillir à sa mission. Le repos ne fait pas partie de son programme ni de ses projets pour l’instant. «Lorsque tout sera fini, on verra», confie cette spécialiste, en se dirigeant vers les malades qui l’attendent.

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