Les travaux du Forum du dialogue inter-libyen, parrainé par l’ONU ont commencé hier, lundi, dans la capitale tunisienne, à l’effet d’arriver à un règlement définitif de crise libyenne. Les pourparlers, intervenant après le cessez-le-feu durable signé entre les belligérants dont l’accord a eu l’assentiment de l’ONU, devra ouvrir la porte à un retour à la légalité constitutionnelle et à l’organisation d’élections dans ce pays en proie aux violences depuis 2011.
Le dialogue inter-libyen verra, en sus, la présence des représentants du Parlement de Tobrouk et du Haut conseil d’État, la participation de plusieurs personnalités libyennes issues de différentes circonscriptions, sur la base des principes d’exclusivité, de représentation géographique, ethnique, politique, tribale et sociale équitable. 75 participants représentant 13 factions libyennes prennent part au dialogue de Tunis, qui devra déboucher sur la désignation d’un président du conseil libyen, de deux vice-présidents et d’un chef du gouvernement. La cheffe de mission onusienne par intérim en Libye, Stéphanie Williams, a qualifié, dimanche soir, le dialogue politique de Tunis, « comme la meilleure occasion depuis 2014, pour réaliser les vœux des Libyens ». « Nous avons le sentiment qu’il y a une volonté auprès des participants au dialogue libyen, de présenter des concessions pour l’intérêt de la Libye », a-t-elle dit, incitant les protagonistes libyens présents à la conférence de Tunis « à se hisser au niveau de l’instant ». Le dialogue de Tunis vise « à parvenir à une position unifiée à même de déboucher sur des élections nationales dans les délais les plus proches, en vue de rétablir la souveraineté de la Libye, et de conférer la légalité démocratique aux institutions libyennes ». La mission des Nations unies avait annoncé le 23 octobre dernier que les deux protagonistes en Libye étaient parvenus à un accord de cessez-le-feu, dans le cadre des pourparlers de la commission militaire mixte, qui s’est tenue à Genève (Suisse). Les mercenaires et les combattants étrangers devaient quitter la Libye trois mois après la signature de cet accord, qualifié par l’émissaire onusienne, « d’un premier pas décisif vers un règlement intégral de la crise libyenne ».
Le dialogue de Tunis devra consolider cet accord, pour un règlement intégral de la crise. Ce dialogue fait suite à des mois de calme relatif dans ce pays qui a sombré dans le chaos après la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011. Le mois dernier, les deux principales parties au conflit ont signé un accord de cessez-le-feu historique, ouvrant la voie à une reprise de la production pétrolière, économiquement vitale, et à des progrès dans les négociations politiques. sssssHier, à l’ouverture des pourparlers de Tunis, l’émissaire par intérim de l’ONU en Libye, Stéphanie Williams, s’est montrée optimiste en déclarant : « aujourd’hui, nous sommes en phase de voir une nouvelle Libye, après des années de divisions, de guerres et de destructions ». « Nous allons de l’avant avec des pas fermes, confiants en les multiples processus supervisés par la mission des Nations unies, en s’appuyant sur la détermination et la volonté du peuple libyen, et aussi son droit de protéger sa patrie et souveraineté et sauvegarder les richesses de son pays, pour passer des périodes de transition vers une période de certitude », a-t-elle ajouté. Elle a souligné que « la route jusqu’à ce jour n’était pas facile, mais l’accord de cessez-le-feu (signé à Genève le 23 octobre denier) est venu pour réunir les conditions favorables pour que nous soyons tous ensembles aujourd’hui, malgré la réalité imposée par l’épidémie de coronavirus en Libye, Tunisie et dans le monde entier », remerciant les participants à ce dialogue et aussi leur engagement « de trouver des solutions consensuelles à la crise ».
Mises en garde contre la division de la Libye
Le président tunisien, Kaïs Saïed, dont le pays accueille cette rencontre, a déclaré, à l’inauguration des travaux de cette réunion, qu’« il n’y a pas lieu d’imposer une tutelle sur le peuple libyen, sous aucun titre, ni aucune forme que ce soit, comme il n’est pas question ici de la division de la Libye ». Il a qualifié ce Forum du dialogue inter-libyen de « prélude à une nouvelle légitimité issue de la seule volonté du peuple libyen », a rapporté l’agence tunisienne officielle TAP. Il a insisté sur l’obligation de se concentrer sur l’édification d’une Lybie unifiée, et qu’il n’est « pas question de diviser la Libye, surtout que certains commencent d’ores et déjà à parler de l’Est et de l’Ouest, mais le peuple libyen est un », mettant en garde, en même temps, contre le danger de ce discours, non seulement sur le Libye, mais sur l’ensemble de la région ». « Cela pourrait être une première tentative déguisée pour diviser ce pays frère, et d’autres pays voisins. Ce que la Tunisie rejette catégoriquement », a-t-il averti. Il a souligné l’importance de trouver des solutions pacifiques, étant donné que les guerres et les batailles n’engendrent que des rancunes qui ne disparaitront qu’après des décennies », qualifiant le peuple libyen de peuple le plus homogène et étant capable, par la volonté de ses enfants, de surmonter tous les obstacles, « à condition qu’aucune force étrangère n’interfère dans ses affaires ». « Le devoir aujourd’hui exige que chacun soit convaincu que la solution ne peut venir des canons (…). Mais de faire en sorte que le peuple libyen retrouve sa totale souveraineté et puisse jouir de son droit à l’autodétermination », a-t-il ajouté. Il a expliqué que « nous vivons aujourd’hui un moment historique, voir même un rendez-vous avec l’Histoire, dont il n’est dans l’intérêt de personne de le rater », notant que « Forum fait partie des efforts fournis depuis des mois, sous les auspices de l’ONU, afin de parvenir à une solution pacifique et fixer des procédures claires et des dates précises ». Kaïs Saïed a suggéré aux participants de ce Forum, qui devront mener cette période de transition, de s’engager de ne pas se présenter pour occuper un poste au sein des institutions qui seront mises en place dans la prochaine Constitution », estimant que cette interdiction de se présenter protégera tout le monde des tensions ou de servir une partie au dépend de l’autre ».
Juste reconnaissance à l’ « approche référence » de l’Algérie
L’approche algérienne consistant en l’organisation des élections libres et transparentes et l’instauration d’institutions légitimes dans ce pays est, selon plusieurs experts, « la principale référence » pour le règlement de la crise libyenne. Dans ce sens, le directeur du Centre d’études libyen « Astrolabe », Abdessalam al-Rajihi a salué, dans une déclaration à l’APS, le rôle « distingué et sage » de l’Algérie dans la résolution de la crise libyenne ainsi que ses interventions « positives » en faveur du peuple libyen, affirmant que « l’approche algérienne qui prône la tenue d’élections et l’instauration d’institutions légitimes dans ce pays voisin constitue la base de la résolution de la crise libyenne ». À ce propos, al-Rajihi a rappelé que le Président de la République, Abdelmadjid Tebboune, avait mis l’accent sur l’impératif d’aller vers des élections en Libye, ce qui représente « la véritable revendication du peuple libyen ». « L’Algérie a tendu sa main aux Libyens, apporté son assistance dans la mesure du possible et œuvré de son mieux à écarter les interventions militaires étrangères, en soutenant une solution politique réunissant les belligérants libyens pour faire cesser les hostilités », a relevé le chercheur, soulignant que « le peuple libyen n’oubliera jamais le soutien de l’Algérie durant cette épreuve ».
Hamid Mecheri