Le référendum sur le projet d’amendement de la Constitution du 1er novembre prochain, date coïncidant avec le 66e anniversaire du début de la Révolution de 1954, constitue une étape cruciale dans l’édification de l’Algérie nouvelle et d’un État de droit auquel aspire le peuple à travers le Hirak du 22 février. Le référendum sur la révision constitutionnelle constituera l’aboutissement d’une des priorités majeures que s’est assignées, au lendemain de son élection, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, en vue de jeter les bases de l’Algérie nouvelle.
C’est parti pour le chantier de « La Nouvelle Algérie », promise par le président Abdelmadjid Tebboune, avec le lancement officiel, aujourd’hui, de la campagne référendaire sur le projet de révision constitutionnelle, dont le texte final a été adopté par les deux chambres parlementaires. Projet phare du quinquennat du président, le projet de révision de la Constitution, qui sera soumis au référendum le 1er novembre prochain, est élaboré par un groupe d’experts en Droit constitutionnel, sur la base de 5.018 propositions d’amendement émanant de différentes franges de la société, de personnalités nationales et de forces politiques. Le texte, adopté le 6 septembre dernier en Conseil des ministres, avant de recevoir l’approbation des deux chambres du Parlement, successivement le 10 et le 12 du même mois, constitue l’un de ses principaux engagements politiques devant jeter les bases d’un « État moderne au service du citoyen » et « rétablir la confiance » entre le peuple et ses institutions. « Le référendum constitue une étape phare dans l’histoire de notre pays et un jalon essentiel pour l’édification de la nouvelle République en tant que projet de société ambitieux, pour lequel s’est engagé le président de la République lors de sa campagne électorale et qu’il concrétise aujourd’hui sur le terrain », a déclaré Kamel Feniche, président du Conseil constitutionnel, dans une allocution prononcée lors des travaux du Colloque international sur le thème « La Constitution au service du citoyen: Grands axes de l’amendement constitutionnel », tenus au Centre international des conférences (CIC). Cette nouvelle mouture de la Loi fondamentale vise, selon le Premier ministre Abdelaziz Djerad, à séparer l’argent de la politique, lutter contre la corruption et mettre l’Algérie « à l’abri des dérives autocratiques et hégémoniques qu’elle a connus par le passé ». De ce fait, la campagne référendaire sur le projet de révision constitutionnelle, qui durera jusqu’au 28 octobre, sera « conforme aux critères mis en place par l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE) et à la législation et l’organisation en vigueur. «Les conditions du déroulement de la consultation populaire du 1er novembre seront les mêmes que celles dans lesquelles s’est déroulée l’élection présidentielle du 12 décembre 2019, marquées par la transparence et l’impartialité», a affirmé Mohamed Charfi, président de l’ANIE, soulignant que l’Autorité qu’il dirige veillera sur «la transparence et l’impartialité» du référendum. «Les moyens matériels et logistiques nécessaires sont mobilisés pour que le référendum se déroule dans la sérénité et la régularité » a-t-il précisé. Pour étayer ses propos, Mohamed Charfi a révélé qu’un protocole a été mis en place afin de permettre à la direction de l’ANIE de suivre en temps réel le déroulement de l’élection. «Nous allons reprendre la même organisation et les mêmes procédures avec la possibilité du président de l’Anie de suivre en direct le scrutin grâce au réseau de visioconférence mis en place à cette occasion», fait-il savoir. «Ce qui nous permettra une plus grande réactivité et une prise en charge immédiate à d’éventuels problèmes qui peuvent se poser le jour du scrutin», a-t-il ajouté. En dépit des assurances du président de l’ANIE, force est de signaler que cette campagne intervient dans une conjoncture particulière impactée par la pandémie du Covid19. Pour rappel, l’Algérie a recensé, en date du 5 octobre, 52 270 cas de nouveau coronavirus depuis la fin février, dont quelque 1 768 décès, mais elle observe une lente décrue des infections quotidiennes depuis plusieurs semaines. Certes, le Pr. Abderrahmane Benbouzid, ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, tout en regrettant « un certain relâchement dans la rue » s’est voulu rassurant en affirmant, depuis Oran que « l’Algérie a gagné la bataille contre le Covid-19 mais la vigilance demeure toujours de mise pour ne pas tomber dans une deuxième vague », appelant « la population à rester consciente et à continuer à appliquer les gestes barrières pour éviter une deuxième vague ». En effet, il y a lieu de regretter, ces derniers temps, un certain « je-m’en-foutisme » d’une grande majorité de la population qui a délaissé le port du masque, les gestes barrières et la distanciation physique notamment depuis la levée progressive du confinement et la réouverture des lieux publics. Ce qui laisse la porte ouverte à un risque d’une deuxième vague, notamment avec la rentrée scolaire, prévue le 21 octobre, et la réouverture des frontières, lors des meetings prévus dans le cadre de la campagne référendaire sur le projet de révision constitutionnelle. Des meetings devant être animés par « ceux qui sont pour et ceux qui sont contre le projet d’amendement de la Constitution » comme le précise Mohamed Charfi, président de l’ANIE.
Quid des acteurs de la campagne
Conformément aux règles d’organisation des réunions et des manifestations publiques fixées par l’ANIE, la campagne électorale sera animée par le staff gouvernemental qui doit transmettre le programme de la campagne électorale au président de cette autorité, les partis politiques disposant d’un groupe parlementaire au niveau des deux Chambres du Parlement ou de 10 sièges entre les deux Chambres du Parlement ou des sièges au sein des Assemblées populaires locales dans au moins 25 wilayas. En outre, les associations nationales jouissant d’une représentation effective au moins au niveau de 25 wilayas sont autorisées, pour la première fois, à faire campagne, au même titre que certaines personnalités politiques. Néanmoins, les partis politiques et les associations nationales doivent présenter à l’ANIE des documents justificatifs et un résumé des axes d’intervention. Par ailleurs, l’ANIE procédera en coordination avec l’Autorité de régulation de l’audio-visuel (ARAV) à la définition du temps de parole réservé aux intervenants dans les médias audiovisuels publics.
La technologie au service de la démocratie
Dans un monde où les taux d’abstention alarment, de plus en plus de voix s’élèvent pour une démocratie participative : la technologie apparaît alors comme une opportunité de taille pour élargir massivement le nombre de participants à la décision publique. Aussi, l’ANIE, dans un souci d’éviter la propagation du Covid-19, a décidé que la campagne référendaire peut-être menée par voie d’affichage, de distribution de dépliants, de correspondances et de tous les moyens écrits ou électroniques. Dans ce cadre, les médias lourds (télévision et radio) et les réseaux sociaux sont appelés à jouer un rôle prépondérant lors de cette campagne de sensibilisation. D’autant qu’aujourd’hui, il est banal de constater que les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) ont envahi notre quotidien. Toutefois, « l’opération de sensibilisation et la campagne référendaire, qu’il s’agisse de médias audiovisuels ou par affichage, les moyens écrits ou électroniques sont soumis à une habilitation préalable de l’ANIE étant chargée exclusivement de la préparation, l’organisation, la gestion et la supervision des élections et des référendums » note l’Autorité électorale qui précise qu’à « ce titre, tous les intervenants de la campagne référendaire sont tenus de respecter les dispositions législatives et réglementaires en vigueur».
La parole à la société civile
Une première en Algérie. « Au vu de la place importante qu’elle occupe au sein du projet d’amendement constitutionnel, la société civile avec ses différents acteurs est au premier rang et devient le premier défenseur du projet d’amendement constitutionnel », a déclaré le Conseiller auprès du président de la République chargé du mouvement associatif et de la communauté nationale à l’étranger, Nazih Berramdane, dans son allocution lors des travaux du colloque national sur le rôle de la société civile dans la lutte contre la corruption. Aussi, le mouvement associatif sera autorisé, pour la première fois, à animer des meetings populaires, destinés à sensibiliser les citoyens de l’importance de la large participation au référendum sur la nouvelle Constitution, d’organiser et d’encadrer toutes les activités rentrant dans le cadre de la campagne pour le rendez-vous du 1er novembre» prochain, a déclaré Mohamed Charfi, en marge d’une rencontre sur «la conscience démocratique et l’essor de la société», organisée par l’Observatoire national de développement des parcours électoraux et le renforcement de la démocratie, au musée régional du moudjahid de Médéa. La participation du mouvement associatif à la campagne «ne doit pas être exploité par ce dernier pour devenir des formations politiques bis», mais un acteur dont l’action est consacrée exclusivement au service du pays et du citoyen», a-t-il affirmé.
À chacun son argument
Alors que Mohamed Charfi invite les Algériens à participer massivement dans le suivi et le contrôle des bureaux de vote, certaines voix appellent soit au boycott, soit à voter contre le projet de révision de la Constitution. Si les partis politiques à l’image du Front de libération nationale (FLN), du Rassemblement national démocratique, du Parti de la liberté et de la justice (PLJ), et du parti Al Bina, estiment que « le référendum sur le projet de révision de la Constitution le 1er novembre prochain est une étape principale et importante dans le processus de réforme politique dans le pays », d’autres, à l’instar du parti Nahda, du Mouvement de la société pour la paix (MSP), et du Parti de la justice et du développement (PJD), tout en ne s’opposant pas dans la forme au processus de révision constitutionnelle, rejettent le contenu et appellent à voter « non ». Une manière de préparer leur éventuelle participation aux élections législatives et locales anticipées annoncées par le Président Tebboune pour la fin de l’année. En somme, il appartient au peuple de trancher sur la question de son avenir d’autant plus que les dindes n’apprécient guère les fêtes de Noël.
Smail Rouha