Le président italien Giorgio Napolitano a démissionné mercredi, tirant sa révérence à 89 ans après avoir été pendant près d’une décennie un garant de stabilité et lançant une course à la succession qui semble très ouverte. M. Napolitano, élu en 2006 et très respecté dans le pays, avait été réélu en 2013 faute d’accord entre les partis sur un successeur, mais n’avait jamais fait mystère de son intention de quitter sa fonction bien avant la fin du septennat en 2020 en raison de son grand âge et de sa santé. Le chef de l’Etat, dont les pouvoirs sont limités en Italie, «a signé ce matin, à 10H35 (09H35 GMT) l’acte de démission de sa charge», a annoncé la présidence dans un bref communiqué. La lettre de démission a été transmise à la présidente de la Chambre des députés, Laura Boldrini, chargée de convoquer l’assemblée des «grands électeurs» dans un délai de 15 jours, au président du Sénat, Pietro Grasso, qui assurera l’intérim et au chef du gouvernement. Une majorité des deux tiers des quelque 1.009 «grands électeurs» — députés, sénateurs et 58 représentants des régions — est requise pour être élu lors des trois premiers tours, puis la majorité simple à partir du 4ème tour. Le chef du gouvernement, Matteo Renzi, a plusieurs fois promis ces dernières semaines qu’un candidat serait élu au 4ème tour. Son Parti démocrate (PD) dispose d’un minimum de 415 sénateurs et députés, auxquels s’ajoutent plusieurs dizaines d’alliés. Mais en 2013, plus d’une centaine de membres du PD avaient refusé de voter pour leur ancien chef Romano Prodi.
Un accord avec Silvio Berlusconi sur une personnalité de centre-gauche est possible, mais la gauche du PD risque de rechigner une nouvelle fois et de chercher plutôt une personnalité susceptible de plaire aux anti-partis du Mouvement 5 étoiles de Beppe Grillo.
«Un arbitre équilibré et sage»
M. Renzi a reconnu que la recherche d’un successeur serait «délicate et difficile» et a souhaité l’élection d’un «arbitre équilibré et sage, un garant des institutions, au-dessus des partis». «L’élection du président de la République, comme celle du pape, est complètement imprévisible, et contrairement à un conclave, n’a même pas le soutien du Saint Esprit», raillait cependant mercredi La Stampa dans son éditorial. «Le chef du gouvernement et sa majorité devront lutter pour cette élection mais je suis convaincu qu’il en sortira un président capable de donner à ce pays et à sa majorité politique actuelle destinée à faire les réformes toute la force qu’avait mise Giorgio Napolitano», a déclaré à l’AFP Francesco Clementi, professeur de droit constitutionnel à l’Université Luiss à Rome.
Parmi les noms qui circulent figurent à nouveau M. Prodi, l’ancien chef du gouvernement Giuliano Amato, l’ancien maire de Rome Walter Veltroni, les ministres Pier Carlo Padoan (Economie) ou Roberta Pinotti (Défense), mais aucun ne semble en mesure de faire consensus.
Souvent cité, le président de la Banque centrale européenne Mario Draghi a déclaré à l’hebdomadaire allemand Die Zeit que ce n’était «pas (son) travail». Et l’ancienne commissaire européenne Emma Bonino, possible outsider, a annoncé lundi qu’elle souffrait d’un cancer. S’exprimant mardi lors de sa dernière sortie publique en tant que président, Napolitano a souhaité que le pays soit «uni et serein» dans un monde «difficile», en évoquant les attentats qui ont fait 17 morts la semaine dernière en France. à une petite fille qui lui demandait s’il était content de rentrer chez lui, cet ancien membre du Parti communiste italien et vétéran de l’antifascisme qui doit fêter ses 90 ans en juin a répondu: «Bien sûr que je suis content, le moment est arrivé». «Ici (au Quirinal), on est bien, tout est très beau, mais c’est un peu une prison. Chez moi je serai bien, je pourrai me promener», a-t-il expliqué.