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HOOLIGANISME, VANDALISME, SUPPORTERS « ULTRAS » ET CASSES POST-MATCHS : Pourquoi la violence dans les stades menace la sécurité de l’Algérie

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Reportage réalisé par Med Wali B.

L’Algérie n’échappe pas à la violence qui sévit dans le monde du football. À Alger, à Constantine, à Béjaïa, à Annaba et à Bordj BouArréridj… La liste des incidents dans les stades algériens s’allonge en cette fin de la première moitié du championnat. Pour les autorités et certains médias, autant d’occasions de rappeler l’urgence de réprimer et éliminer les «pseudo-supporters» qui gangrènent le football. Pourtant, les actes d’incivilités commis par les supporters impliquent des causes, des enjeux et des degrés de gravité très variés. Enquête sur ce fléau qui se déchaîne tous les week-ends dans le football local. Avant et pendant chaque rencontre, les supporters animent les tribunes afin d’assurer l’ambiance, il existe même des associations de supporters qui assistent aux compétitions sportives, dont le but est de soutenir de manière fanatique son équipe de prédilection. Ils sont connus pour être les plus fervents supporters, les plus exigeants vis-à- vis de la prestation des joueurs notamment. Dans le foot, on les appelle les «ultras». En cas de défaite ou d’une contre-performance de leur équipe, la tension monte d’un cran, d’abord à la fin de match, mais aussi à la sortie du stade, comme ce fut le cas mardi dernier au stade 5- juillet 1962 d’Alger, qui a été le théâtre de scènes de violences inquiétantes et condamnables, lorsque le Mouloudia club d’Alger (MCA) s’est incliné (0- 1) à domicile face à l’USM Bel Abbès (USMBA), ce qui a provoqué la colère des supporters algérois, dont certains ont arraché les sièges du stade avant de les jeter sur le terrain. Résultat : une quarantaine de personnes, dont 18 policiers, ont été gravement blessées à l’issue de cette empoignade. Le bilan fut funèbre et reflète la gravité de ce fléau qui nuit au développement du pays et à la sécurité des individus. Il faut dire que cette violence met à l’échec toutes les tentatives entreprises par la Fédération algérienne de football (FAF), et de la Ligue de football professionnel (LFP), pour éradiquer ce fléau, de plus en plus persistant à chaque saison. Les affrontements de mardi dernier ont donné lieu à des violences inouïes immortalisées dans des vidéos diffusées massivement sur les réseaux sociaux. En effet, dans un communiqué établi par la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN), il est précisé que : «lors de ces violences, 18 policiers ont été blessés, dont 4 grièvement, ainsi que 22 supporters et 10 véhicules de la police, une ambulance de la protection civile et un véhicule particulier ont été endommagés.» La même source souligne que : «42 supporters ont été arrêtés, pour troubles à l’ordre public, port d’armes blanches ou possession de drogues et psychotropes.» Par ailleurs, une enquête est ouverte «sur l’authenticité de la vidéo partagée en masse sur les réseaux sociaux, montrant un comportement inapproprié de certains agents de maintien de l’ordre lors de l’exercice de leurs fonctions», annonce la DGSN. Sur cette vidéo, on voit des policiers en civil et en tenue, munis de matraque, utiliser à leur tour comme projectiles les chaises en plastique dont ils sont la cible. On y voit aussi un jeune supporter à terre être violemment matraqué par plusieurs policiers. Cependant la police, disant enquêter sur de possibles violences policières.

Des jeunes s’opposent aux forces de l’ordre à Bab El Oued
Jeudi soir, soit juste après la fin du match de championnat, comptant pour la 15e et dernière journée de la phase aller, opposant l’USM Alger au CS Constantine (2-1), des scènes de violence se sont reproduites à Bab El Oued (Alger). à la sortie des supporters du stade Omar-Hamadi de Bologhine. Des supporters du MCA étaient sortis pour s’en prendre à la poignée de supporters du CSC, lesquels étaient venus assister au match contre l’USMA. Il y a une sensibilité pour ne pas dire une rancune de la part des supporters du Mouloudia à l’encontre de ceux du CSC à cause de ce qui s’était produit l’année dernière à Constantine lors du match de Coupe d’Algérie JSK-MCA, surtout quand un supporter du Mouloudia avait été noyé dans des eaux usées. Le comportement des inconditionnels du MCA s’est aussi expliqué par la scène de violence à l’encontre du supporter du Mouloudia par des policiers qui l’avaient tabassé à la fin du match MCA-USMBA de mardi dernier. Plusieurs vidéos ont été partagées sur les réseaux sociaux des différents affrontements qui ont opposé les jeunes de Bab El Oued à Alger, aux forces de l’ordre. Ainsi, les ultras du Mouloudia avaient profité du match USMA-CSC pour s’en prendre à des policiers; d’où ces scènes de violence à Bab El Oued…

Nacer Djabi, sociologue : «La violence est due aux problèmes socio-économiques»

De son côté, Nacer Djabi, sociologue, nous a affirmé, dans une conversation téléphonique, que le phénomène de la violence dans les stades était inacceptable et étranger à la société algérienne, indiquant que : «Cette violence dans nos stades est essentiellement due aux problèmes socio-économiques et politiques, au chômage, au manque de moyens de loisirs et d’évasion», a-t-il signalé. Selon notre interlocuteur : «Le stade est la seule place où les jeunes peuvent exprimer, extérioriser leur désarroi. Mais à la moindre erreur le supporter algérien devient de plus en plus agressif. Aussi, ce n’est pas uniquement le supporter qui est violent, c’est plutôt toute l’atmosphère du stade. Quand vous venez à 6 heures du matin, et la rencontre se déroulera à 18 heures, le supporter souffrira le martyr durant toute ces heures, vu qu’il n’a absolument rien et je ne vais pas parler sur les conditions… » Le spécialiste en sociologie urbaine a ajouté, dans le même contexte, que l’acte de violence est basé sur l’action collective. «D’aucuns agissent individuellement, avant que l’action ne se fasse en s’appuyant sur le collectif. » Pour que le phénomène de la violence soit freiné, Djabi a appelé les responsables du football algérien à prôner une nouvelle stratégie s’appuyant principalement sur la sensibilisation. «Les comités de supporters sont les premiers concernés par la sensibilisation. Avant chaque match, il faut diffuser les scènes de violence sur les écrans géants avec un discours sensibilisateur. Je pense que ce sera un des aspects qui vont tempérer, dans un premier temps, les ardeurs. Concernant les instances qui gèrent notre football, il est indispensable de parrainer des initiatives visant, avant chaque match, à regrouper des supporters de chaque club. Le football a été auparavant une occasion de renforcer les liens d’amitié, pas d’envenimer les choses. D’ailleurs, nous sommes arrivés à un état psychologique fébrile du supporter majoritairement animé d’un sentiment de vengeance. J’espère que la FAF et toutes les parties concernées puissent retenir la leçon», a-t-il conclu.

Samir Laâlam, entraîneur et journaliste : «la tricherie et la corruption poussent les jeunes à la violence»
Pour connaître les causes qui poussent les supporters à user de la violence dans les stades, nous avons pris attache avec Samir El Hachemi Laâlam, entraîneur titulaire d’un diplô- me CAF C, et journaliste. Ce dernier a tenu à nous accorder ces déclarations à propos de la violence qui revient dans les tribunes des stades algériens. Toujours aussi affecté par tous les malheurs qui frappent le football algérien, il nous dira à ce sujet : «Les scènes de violences qu’on a vues dans nos stades n’honorent pas le pays, on a hissé très haut l’image de l’Algé- rie à l’étranger, il ne faut pas la ternir, soyons sportifs». Pour lui, les raisons qui poussent les jeunes à avoir un comportement agressif lors des rencontres de football sont liées, à la tricherie et la corruption dans le milieu footballistique. Il dira : «Ces raisons sont également liées à la mauvaise gestion des clubs et l’inadéquation des infrastructures sportives. L’organigramme du football en Algérie est sale, tout le monde est responsable de la violence et non seulement les supporters», a-t-il articulé. Avant de poursuivre : «En tant qu’éducateur, je suis terriblement choqué de ce qui se passe dans nos stades. Vous savez que les présidents des clubs, les joueurs, le président de la Ligue et celui de la FAF, même certains journalistes sont responsables du comportement des supporters dans les gradins, parfois certains articles et reportages diffusés dans les médias sportifs chauffent les esprits, ou même une déclaration d’un responsable, alors que le supporter ne peut pas subir plus de pression sur les tribunes, vu que les conditions depuis la vente des billets jusqu’à la fin de match sont tellement vulnérables, et franchement je ne veux pas vous donner des exemples là-dessus». Ajoutant : «La presse doit continuer à travailler dans le sens de la formation, de l’éducation et de l’information du public, des joueurs, des encadreurs et des dirigeants sportifs. Cette action de la presse va servir à sensibiliser l’environnement du football. Le gouvernement, de son côté, doit prendre enfin très au sérieux ce phénomène qui guette nos stades et nous prive de supporter dans la quiétude nos équipes préférées.» Avant de conclure, Samir Laâlam nous a dit ceci : «Le sport, qui est un facteur d’unité, ne doit absolument pas devenir un facteur de division, à travers les scènes de vandalisme aux retombées fâcheuses et que l’intrusion des supporteurs dans les stades peut constituer un véritable danger pour les vies humaines, d’où l’impératif de prendre des mesures fermes à l’encontre des équipes dont le public est à l’origine des actes de violence commis au niveau des stades.»
M. W. B.

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