Des dizaines de milliers de manifestants pro-démocratie ont bravé hier l’interdiction des autorités et marchaient dans les rues au coeur de Hong Kong, au lendemain de violents incidents lors d’un précédent rassemblement interdit dans une ville près de la frontière chinoise.
La foule s’est rassemblée dans la mégapole durant l’après-midi et, alors que la police n’avait autorisé qu’un rassemblement statique dans un parc, s’est vite éparpillée pour marcher dans les rues. Ce qui laisse craindre de nouveaux affrontements au moment où la contestation du gouvernement pro-Pékin de Hong Kong entre dans sa huitième semaine. Une partie des manifestants s’est dirigée vers l’est et le quartier commerçant de Causeway Bay où ils ont érigé des barricades et bloqué une artère principale tandis que les magasins et centres commerciaux tiraient le rideau. Un autre groupe est parti à l’ouest vers le Bureau de liaison du gouvernement chinois à Kong Kong, gardé par d’importantes forces de la police anti-émeutes. Des manifestants avaient jeté dimanche dernier des oeufs et inscrit des graffitis sur le bâtiment, suscitant une vive réaction de Pékin qui a dénoncé des actes «absolument intolérables» et appelé à «punir les coupables». Dimanche, la tension était palpable en fin d’après-midi alors que policiers et manifestants se faisaient face. «Je me sens tellement déchiré, je vois des jeunes qui sacrifient leur avenir pour Hong Kong», a confié à l’AFP en fondant en larmes Marcus, un étudiant de 22 ans. La veille, de violents incidents avaient éclaté à Yuen Long, ville proche de la frontière chinoise, à l’issue d’une manifestation interdite rassemblant des dizaines de milliers de personnes. Elles protestaient pacifiquement contre l’agression de militants pro-démocratie le dimanche précédent, attribuée à des triades, des gangs violents, et qui avait fait 45 blessés selon des sources hospitalières. Mais en soirée des face-à-face tendus ont opposé des groupes de manifestants souvent casqués à la police anti-émeutes qui a utilisé du gaz lacrymogène et des balles en caoutchouc avant de charger à la matraque. Dans la gare de la ville, là même où s’était produite l’agression attribuée aux triades, des mares de sang sur le sol témoignaient de la violence des heurts.
Défi à Pékin
De sources hospitalières, 24 personnes ont été blessées dont deux grièvement. La police a fait état dimanche de 13 arrestations. Max Chung, jeune militant à l’origine de la demande d’autorisation pour cette manifestation à Yuen Long, a notamment été interpellé pour incitation à un rassemblement illégal. L’attaque dimanche dernier contre le Bureau de liaison du gouvernement chinois à Kong Kong avait constitué un nouveau défi à l’autorité de Pékin après le saccage début juillet du Parlement hongkongais. Hong Kong est dorénavant pris dans «un cercle vicieux», a déclaré à l’AFP la députée pro-démocratie Claudia Mo. «L’usage de la force s’intensifie des deux côtés mais il existe un déséquilibre majeur puisque la police possède des armes létales». Hong Kong, haut lieu de la finance internationale, est plongé depuis le 9 juin dans la pire crise de son histoire récente. Des millions de personnes participent à de gigantesques manifestations pacifiques contre le gouvernement local pro-Pékin. Parallèlement des affrontements sporadiques opposent contestataires radicaux et policiers. Le mouvement est parti du rejet d’un projet de loi désormais suspendu visant à autoriser les extraditions vers la Chine puis s’est élargi à des revendications plus larges de réformes démocratiques, sur fond d’inquiétude générée par l’ingérence jugée grandissante de Pékin dans les affaires intérieures de l’ancienne colonie britannique rétrocédée à Pékin en 1997. Pékin a condamné les violences «absolument intolérables» mais laissé les autorités locales régler seules la crise.