L’Espagne tente de se comporter en hub gazier régional, en revendant à la France et au Maroc, du gaz naturel qu’elle importe. Un porte-parole de la société espagnole “Enagas” a toutefois tenu à faire savoir que le gaz qui est vendu au Maroc à travers le gazoduc Maghreb-Europe (GME), en sens inverse, n’est pas le gaz algérien reçu par le Medgaz. “Il y a des garanties qui prouvent que ce gaz n’est pas algérien”, a-t-il insisté, cité par Reuters.
L’Algérie avait averti qu’elle couperait l’approvisionnement de l’Espagne si ce pays revendait au Maroc le gaz algérien. Le 27 avril, le ministère de l’Energie et des Mines avait confirmé que tout acheminement de gaz naturel algérien livré à l’Espagne, dont la destination n’est autre que celle prévue dans les contrats, sera considéré comme un manquement aux engagements contractuels, et par conséquent, pourrait aboutir à la rupture du contrat liant la Sonatrach à ses clients espagnols. C’est ce que l’on appelle la «clause de destination». L’Algérie réagissait à une information, par message électronique, donnée au ministre de l’Energie et des Mines, Mohamed Arkab, par son homologue espagnole, Mme Teresa Ribera, concernant la décision de l’Espagne d’autoriser le fonctionnement, en flux inverse, du GME. En dehors de ce cas, l’Algérie reste un fournisseur fiable de l’Espagne. Le 23 avril dernier, abordant le volet énergétique dans les relations avec ce pays, lors de sa rencontre périodique avec des représentants de la presse nationale, le président Abdelmadjid Tebboune avait rassuré le peuple espagnol que l’Algérie « ne renoncera pas à son engagement d’approvisionner l’Espagne en gaz, quelles que soient les circonstances ». « Nous devons faire la distinction entre le gouvernement espagnol et l’État espagnol avec lequel nous avons des liens très forts. Nous exigeons l’application du droit international afin que les relations reviennent à la normale avec l’Espagne », a-t-il ajouté. Il a expliqué que l’Espagne n’a pas le droit « d’offrir un pays colonisé à un autre pays ». Le président de la République avait rappelé que l’Algérie « entretient de bonnes relations avec l’Espagne ». La position exprimée par le chef du gouvernement, Pedro Sanchez, sur la question sahraouie, « a changé la donne », dans les relations énergétiques algéro-espagnoles. C’est ce qu’avait fait observer le journal espagnol El-Mundo qui notait, au moment des faits, que l’Espagne a perdu ses positions comme hub gazier du Sud de l’Europe. El Mundo se référait au contrat gazier, qu’il a qualifié de « colossal », signé par l’Algérie avec l’Italie. L’Algérie « opte pour ce pays comme grand allié énergétique européen », constatait le journal espagnol qui a rappelé que l’Espagne recevait de grandes quantités de gaz algérien, la prédestinant à devenir une grande plateforme de gaz pour l’Europe. « Le gazoduc qui traverse le Maroc est fermé, le Transmed avec l’Italie se déclenche », avait conclu El-Mundo. Autre répercussion : la question du prix du gaz algérien vendu à l’Espagne. Début avril, dans une déclaration à l’APS, le président-directeur général du Groupe Sonatrach, Toufik Hakkar, à propos des exportations gazières vers l’Europe, avait souligné que « depuis le début de la crise en Ukraine, les prix du gaz et du pétrole explosent. L’Algérie a décidé de maintenir, pour l’ensemble de ses clients, des prix contractuels relativement corrects. Cependant, il n’est pas exclu de procéder à un «recalcul» des prix avec notre client espagnol ». Evidemment, il s’agit d’une révision à la hausse. Cette déclaration est intervenue, on s’en souvient, après le revirement surprenant, et pour le moins inamical, voire hostile à l’Algérie, du Premier ministre espagnol sur la question du Sahara occidental, après le rappel pour consultations de l’ambassadeur algérien à Madrid. Les négociations sur le prix du gaz entre la partie algérienne et la partie espagnole ont lieu dans le cadre de la révision périodique prévue en fonction du développement des marchés, par les clauses d’indexation incluses dans les contrats gaziers à long terme liant les deux pays.
M’hamed Rebah