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Ce que les Algériens vont manger et ce qu’ils vont dilapier inutilement : 500 milliards de centimes jetés dans les poubelles

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Malgré le fait, heureux pour l’Algérie, que les prix du baril observent depuis quelques semaines une courbe ascendante, la récession économique s’est inscrite dans la politique du gouvernement, de sorte que ce mois sacré de Ramadhan intervient dans un contexte particulier, avec notamment la hausse des prix des produits importés et l’absence d’autres produits blacklistés par le gouvernement Ouyahia.

Ramadhan 2018 débute donc pour 40 millions d’Algériens ; si c’est le mois du renouveau spirituel et de la rahma, il est aussi, pour les Algériens, hélas, le mois du surplus de dépenses, des stocks de guerre et des approvisionnements en denrées alimentaires, une frénésie qui se termine après le f’tour par le gaspillage chronique que tous vivent et constatent, et dont les poubelles, qui s’entassent comme autant de monticules de détritus, en sont les témoins privilégiés.
Selon Hadj Tahar Boulanouar, président de l’Association nationale des commerçants et artisans, qui était, lundi dernier, invité du « Forum du Courrier d’Algérie », les Algériens vont consommer quelque 10 millions de quintaux de fruits et de légumes et environ 8 millions de tonnes de viandes durant le Ramadhan. Le bon côté à signaler, c’est que pour les consommateurs, il n’y a pas de pénurie cette année, comme il n’y a pas eu de flambée des prix, hormis certains produits qui ont doublé ou triplé de prix, voire plus ; Hadj Tahar Boulenouar affirme que compte tenu du début des récoltes des produits agricoles de pleine saison il ne sera observé aucune pénurie durant ce mois sacré et bien au-delà, et les stocks mis en réserve sont là pour faire le contrepoids à toute action de spéculation de la part de certains commerçants cupides.
La spéculation n’a pas porté cette fois-ci, du fait des contrôles opérés, et si certains (rares) légumes atteignent déjà des pics, comme la tomate, qui passe de 50 à 170 DA (700% d’augmentation en une semaine), d’autres touchent le fond, comme l’ail (60 dinars contre 2000 dinars le Ramadhan 2017). La volatibilité du marché a été moins marquée que la saison passée par une récolte abondante et par un contrôle rigoureux du ministère du Commerce. Concernant le gaspillage, il y a peut-être à s’attendre à le voir, cherté et crise obligent, en proportions moins effarantes que précédemment. Pour Hadj Tahar Boulanouar, président de l’Association nationale des commerçants et artisans, «il y a une grosse dépense d’argent et un gaspillage coupable de la part des gens; il faut y remédier en régulant le marché et en impliquant les ministères compétents, car au final ce sont autant les achats à tout-va que le grand gaspillage quotidien qui vident les étals et font monter les prix des produits alimentaires ». Il prévoit quelques 500 milliards de centimes comme coût du gaspillage durant ce mois pourtant de piété et modération. Pour Zebdi, au contraire, «le consommateur ressent cette batterie de lois répressives déterrées avant Ramadhan par le ministère du Commerce comme une situation anormale et réagit de manière anormale en s’approvisionnant à outrance, d’où la hausse de la demande dans un marché saturé, et cela se répercute par une flambée des prix ». Bon an, mal an, les chiffres donnés par les Associations des consommateurs laissent perplexes. Achats à tout-va, mais aussi mise dans la poubelle à tout-va. On achète trop, on mange avec les yeux, et en fin de journée, beaucoup de choses, cuisinés en surplus ou achetées «inutilement» finissent dans la poubelle. Les chiffres donnés, à titre illustratif, par l’Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA) par exemple, sont ahurissants. 4 milliards de baguettes sont achetées pendant le Ramadhan dont 120 millions finissent dans les poubelles. 120 millions de pains c’est l’équivalent de 1200 millions de DA (à raison de 10 DA la baguette seulement, sans tenir compte des augmentations), soit le coût d’un ou de plusieurs projets d’intérêt général.
Pour le lait, le constat est encore plus amer, alors qu’on vient de sortir de la «crise du lait» au niveau national. Jugez-en : 12 millions de litres se retrouvent dans les poubelles chaque Ramadhan, selon l’Ugcaa, qui évalue les achats des Algériens en lait à 150 millions de litres au cours de ce mois.
Même constat pour les viandes, fruits et légumes avec des achats qui dépassent largement ceux effectués au cours des autres mois de l’année. Ce qui fait qu’au total, selon les statistiques de l’Ugcaa, le montant du gaspillage atteint les 5 milliards de DA, soit l’équivalent du montant nécessaire pour la réalisation des infrastructures de base ou pour développer des projets de recherches agricoles ou scientifiques.
Espérons qu’à la faveur de la crise économique, les Algériens sauront mettre chaque dinar sur l’achat nécessaire et dépenser plus en actes de probité et de civisme. Le mois sacré de Ramadhan tire sa sacralité du renouveau de l’esprit et de l’âme et non pas de l’embonpoint du ventre et du tube digestif.
F. O.

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