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Burkina Faso : les lendemains du coup d’État

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Des élections « rapidement », une loi électorale « frustrante », l’enquête sur la mort de Sankara : des sujets déjà sur le feu en attendant la suite des événements. Au lendemain de la déclaration du général putschiste Gilbert Diendéré de vouloir « aller rapidement aux élections » dans un entretien accordé à l’AFP, la situation est calme ce vendredi matin à Ouagadougou, après la première nuit sous le couvre-feu imposé par les militaires putschistes qui ont renversé les institutions de transition du Burkina Faso. Le général Diendéré, ancien chef du RSP sous le régime Compaoré porté par les putschistes à la tête de leur « Conseil national pour la démocratie » (CND) y a précisé : « Nous n’avons pas encore d’échéance… mais nous pensons discuter de cela avec les acteurs qui sont concernés notamment les partis politiques et les organisations de la société civile ». Jeudi soir, le général Diendéré avait déjà commencé à recevoir des diplomates étrangers, selon l’AFP. « Dans tous les cas nous n’avons pas l’intention de nous éterniser, nous n’avons pas l’intention de rester », avait-il assuré. Pour rappel, homme de l’ombre jusqu’à présent, le général Diendéré avait été impliqué dans le coup d’Etat qui porta au pouvoir Blaise Compaoré, son mentor, en octobre 1987, coup d’Etat au cours duquel avait été assassiné le capitaine Thomas Sankara.

En ligne de mire, la loi électorale, « source de frustrations »
En attendant la suite des événements, le nouvel homme fort du Burkina a justifié le coup d’Etat par la « loi électorale qui a créé beaucoup de frustrations parmi les potentiels candidats », en référence à un nouveau code électoral controversé interdisant aux partisans de l’ancien président de concourir au prochain scrutin. Cette loi, adoptée par les autorités de transition, avait été invalidée par une cour de justice ouest-africaine. « Le président et les membres de l’exécutif encore détenus par ses troupes seraient « libérés », a-t-il ajouté sans plus de précisions.

Lendemain de couvre-feu à Ouagadougou…
La circulation, moins intense que d’habitude, a repris ce vendredi, même si de nombreux magasins sont restés fermés. La ville n’est plus étroitement quadrillée, comme la veille, par les hommes du Régiment de sécurité présidentielle (RSP). C’est cette unité d’élite de l’armée qui a pris le pouvoir, en accusant les autorités installées après la chute en octobre 2014 du président Blaise Compaoré, d’avoir dévoyé la transition, notamment en excluant les partisans de l’ex-homme fort des prochaines élections. Le couvre-feu a été respecté dans la capitale, mais pas dans plusieurs villes de province, notamment à Bobo Dioulasso (ouest), deuxième ville du pays, où des manifestants se sont rassemblés pour protester contre le putsch, ainsi qu’à Fada-Ngourma (est).

… et dans les régions
Les protestations se sont déroulées sans incidents, les forces de l’ordre n’ayant pas cherché à intervenir. L’armée, la police et la gendarmerie sont restées très discrètes depuis le coup d’Etat. Cheriff Sy, le président du Conseil national de la transition (équivalent du parlement), s’était déclaré jeudi président par intérim, le président et Premier ministre de la transition étant détenus par les putschistes, et avait appelé les autres unités de l’armée à s’opposer au coup de force du RSP, fort de 1.300 hommes et meilleure unité du pays. Alors que les organisations de la société civile actives dans le renversement de M. Compaoré avaient appelé à s’opposer au putsch, le RSP avait vivement dispersé jeudi les manifestants, avec un bilan d’au moins de trois morts selon une source hospitalière.

Le rappeur Smokey visé
Le studio d’enregistrement du rappeur « Smockey », un des fers de lance du « balai citoyen », a été en partie incendié par des hommes du RSP qui ont tiré sur la porte au lance-roquette, a indiqué à l’AFP la femme de l’activiste, qui s’est caché. Le général Gilbert Diendéré, qui a pris la tête d’un Conseil national pour la Démocratie (CND), devait recevoir ce vendredi le chef de l’Etat sénégalais Macky Sall, président en exercice de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), organisation qui a condamné le coup d’Etat, comme la totalité de la communauté internationale. A noter : la maison du général Diendéré, un très proche de Blaise Compaoré dont il fut pendant des années le chef d’état-major personnel et commandant du RSP, dans sa ville d’origine de Yako (100 km au nord-est de Ouagadougou) a été incendiée jeudi.

Quid de l’enquête sur la mort de Thomas Sankara ?
Selon notre confrère Jeune Afrique, « le juge d’instruction en charge de l’enquête sur l’assassinat de Thomas Sankara avait convoqué les avocats des parties civiles ce jeudi matin pour leur communiquer les résultats de l’autopsie du corps présumé de l’ex-président ». De quoi s’interroger sur le timing du coup d’Etat de ce mercredi. Toujours selon Jeune Afrique, « le juge d’instruction militaire François Yaméogo, chargé de l’enquête sur l’assassinat de Thomas Sankara, avait convoqué ce jeudi matin, à 9h00, les avocats des parties civiles impliquées dans ce dossier pour « prendre connaissance des conclusions des rapports de l’expertise balistique et de l’autopsie après exhumation des restes présumés » de l’ancien président et de ses douze camarades assassinés le 15 octobre 1987 à Ouagadougou ». Au regard des soupçons d’implication du général Diendéré dans l’affaire Sankara, on comprend les craintes de Mariam Sankara, la veuve de Thomas Sankara. Cela fait quatre mois que les résultats de cette enquête sont attendus depuis l’ouverture des tombes supposées de Sankara et ses proches par des experts burkinabè et français, fin mai, au cimetière de Dagnoën, à Ouagadougou. Étouffée par le régime Compaoré, l’enquête sur l’assassinat de Thomas Sankara avait été relancée par le régime de transition renversé jeudi par les militaires formant le Conseil national pour la démocratie (CND). Son président, le général Gilbert Diendéré, bras droit de Blaise Compaoré depuis plus de trente ans, est suspecté d’être impliqué dans l’assassinat de Thomas Sankara.

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