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Accès aux plages algéroises : la gratuité au prix symbolique

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«Accès à la plage gratuit», pouvait-on lire sur un panneau levé par les services de la wilaya d’Alger. Ici, c’est la plage Méditerranée, de la station balnéaire d’El Djamila, ex-La Madrague, située à l’ouest d’Aïn Bénian, sur l’extrémité de la bande littorale du Grand Algérois.

C’était hier, au milieu d’une matinée, aussi clémente pour les estivants qu’elle l’est pour les traîne-la-patte. L’instruction est formelle, qu’en-est-il de son effet sur le terrain ? Virée dans quelques plages de la Capitale.
En mai dernier, le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Bedoui, a pris une décision qui aurait mis fin à la «gestion» des plages par les particuliers. Il faut dire que des opérateurs privés, pas peu-véreux, imposent leur diktat aux humbles visiteurs, qui convoitent chaque saison estivale la grande bleue. Ils font office de propriétaires-devins d’espaces, pourtant, sont l’apanage de dame nature, qui a gratifié ses occupants, les humains, de ce qu’elle recèle de plus beau. C’est dire que la razzia des privatisations à tout bout de champs, et sans scrupule surtout à tout point de vues, est poussée jusqu’à défier les autorités publiques. Une sorte d’obsession à vouloir s’octroyer et squatter un patrimoine naturel et collectif, dans l’unique but de s’assurer une gagne de l’argent. Et de quelle manière ! De la façon la plus illicite qui soit, de surcroit, au détriment des bourses des citoyens, désarmés qu’ils sont devant ce fait accompli. Par leur instruction, donc, les pouvoirs publics ont invité les autorités locales à reprendre le contrôle sur les plages et à ne plus accorder d’autorisations aux exploitants particuliers en trait avec la gestion. Il s’agit par là de permettre aux vacanciers un accès libre et gracieux dans ces lieux de détente et de relaxation par excellence. Le constat relevé à Aïn Bénian fait un cas édifiant pour mesurer l’impact de la nouvelle mesure, mise en place par les autorités. En ce début de semaine, tôt la matinée, cette cité littorale se réveille sous la densité active de la circulation routière et de la mobilité des personnes. En revanche, hormis les cafétérias, l’activité commerciale en général est timide à cette heure-ci. Il fallait attendre la mi-matinée pour assister à l’ouverture des premiers rideaux des magasins. Une boutique, en particulier, attire notre attention. On y vend du matériel de loisir nautique, des jet-ski, notamment.
On y propose aussi des services de maintenance et de réparation de ces véhicules aquatiques qui serent de navigation dans le large. Ils sont convoités par les vacanciers fortunés et les personnes les plus nantis, entendre, comme l’atteste les prix de ces produits : 100 à 250 millions de centimes l’unité. Mais, le sujet importe peu, puisque l’objet de la visite est à accorder aux estivants lambda. Il s’agit de relever l’appréciation des visiteurs en matière d’accessibilité dans les plages, après la mesure de gratuité introduite par les pouvoirs publics, et le degré de son suivi de celle-ci sur le terrain. «Gratuité dites-vous ? C’est de la foutaise. On ne peut pas empêcher le privé de s’accaparer des espaces et des biens collectifs, quand bien même l’État en est garante de leur préservation. Désormais, tout s’achète…», a fait remarquer, l’air sceptique, Ali, patron du magasin en question, la soixantaine. À quelques mètres des lieux, un panneau d’indication montre le chemin d’accès vers la plage «Méditerranée», en direction de laquelle nous nous dirigeons à bord d’un véhicule de service.

Fini le diktat des fraudeurs ?
Il est 11 heures. Au courant de la route, on aperçoit peu d’estivants qui empruntent le trajet. Même si, une fois arrivés sur les lieux, l’avis est vite-fait contredit par la masse corpulente des vacanciers, allongés tout au long de l’étendue ensablée. Quoi de mieux que de passer son congé au bord de la mer, d’autant plus que l’entrée n’est pas échangée contre quelques billets, lorsqu’encore la personne dépouillée de son argent a à faire à des gangs. En effet, l’accès à la plage est monnayée jusqu’alors contre 1000 DA, voire le double de cette somme dans certaines plages réputées être la chasse gardée d’escrocs et autres individus peu soucieux de condition humaine et du respect d’autrui. Toutefois, a-t-on fini, aujourd’hui, avec ces pratiques frauduleuses, pour le moins que l’on puisse dire ? Sur place, aussitôt le véhicule garé, trois jeunes postés à l’avant-garde, braquent leur regard en notre direction. Visiblement, c’est le premier sentiment immédiat qui hante l’esprit des estivants d’emblée. «Payer l’entrée». Finalement, plus de peur que de mal, puisque les bonhommes en question ne sont autres que les agents saisonniers recrutés par les autorités locales, dans le cadre de la saison estivale. Peut-on pour autant y accéder sans débourser le moindre sou ? Oui, mais à quel prix ? Un climat de sérénité semble régner sur l’étendue dorée sur cette rive algéroise, où des parents accompagnés des membres de leurs familles et des personnes particulières s’y installent confortablement à raz-le-sable et sous leurs parasols. Un cliché des plus ordinaires où s’entremêlent les multiples loisirs nautiques que se partagent les estivants, si ce n’est cette interrogation posée par certaines personnes apostrophées sur place. «On espère bien que cette gratuité puisse durer dans le temps. Qu’on ne vienne pas l’année prochaine nous faire revivre le diktat que nous subissons sur les plages», a épanché Mahmoud, père de famille. Notre interlocuteur a affirmé avoir entré gracieusement sans payer un centime. En revanche, il a précisé qu’il a payé 80 DA le ticket du parking automobile. Un prix «symbolique», a estimé pour sa part un agent policier, chargé de signaler tout mouvement pouvant inquiéter la sécurité des visiteurs. L’homme en tenue civile, équipé d’un talky-walky, est rejoint par son responsable hiérarchique. Interrogé cet officier de la Police a indiqué pour sa part que ses services s’occupent tout aussi de veiller au respect de la loi. «Nous exigeons aux exploitants l’autorisation de gestion de la plage. Telle est notre mission sur les lieux. Quand aux prix des services fournis ici, cela ne nous regarde pas», a expliqué notre interlocuteur. En plus du prix du ticket du parking, les autorités de la wilaya d’Alger ont affiché sur une pancarte placée à l’entrée de cette plage, les services payants pour éviter aux estivants de se faire arnaquer par des personnes indélicates. En effet, pour un kit composé d’un parasol, d’une table et de quatre chaises, le visiteur qui désire s’en équiper débourse la somme de 500 DA. Visiblement, cette mesure est appliquée à la lettre, du moins dans les plages qui se situent dans les parages. D’ailleurs, le même constat est relevé à quelques encablures de là. C’est le cas de l’autre plage dénommée «La Fontaine» et celle dite «La Jeunesse». Des agents enfilant des gilets qui portent l’inscription «wilaya d’Alger» ou encore des policiers en tunique bleue semble déterminés à mettre en application la consigne des pouvoirs publics. Seulement, faut-il encore que la culture du tourisme et la qualité de service soient mises en avant, afin d’assurer aux estivants bien-être et béatitude.
Farid Guellil

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