Le projet de réforme du Baccalauréat, qui sera remis le 24 août prochain au Premier ministre, alimente d’ores et déjà les appréhensions des islamistes, qui dénoncent une volonté de vouloir porter atteinte à la souveraineté nationale, et à ce qui est appelé communément «les Constantes nationales».
Même si le contenu de ce projet n’est toujours pas rendu public, et en se basant sur des informations non officielles, selon lesquels le projet comporterait une proposition d’introduction du français comme langue d’enseignement des matières scientifiques, dans le Secondaire, les islamistes et les conservateurs, qu’ils soient dans le milieu associatif ou dans les cercles politiques, se sont levés comme un seul homme pour dénoncer un «danger» qui menacerait «l’Identité nationale». C’est dans le sillage de ces réformes que le président du Front du changement, Abdelmadjid Menasra, estime que les différentes réformes qui ont touché le système éducatif n’ont pas comblé les lacunes existantes. Pour lui, les réformes entamées par la ministre du secteur, Nouria Benghebrit, «ne sont pas claires». «Elles ont été élaborées en cachette, l’on dirait qu’elles sont secrètes», a-t-il indiqué hier, lors du forum du changement organisé par son parti, à Alger.
Pour le président de ce parti, la ministre a oublié que l’«École algérienne n’est pas laïque». «Voulant s’inspirer de l’expérience française, Benghebrit ne fait que copier l’expérience française, qui est la seule au monde à avoir une école laïque», a averti Menasra, qui accuse la ministre de servir des agendas extérieurs. «Il est inadmissible que les matières liées à l’Identité soient déconsidérées», a encore précisé le chef de ce parti politique. Abordant la question des consultations avec les partenaires sociaux, entamés par la tutelle, il y a quelques mois, Menasra a estimé que celles-ci devaient être élargies aux partis politiques. Et pour cause, «la réforme de l’École est l’affaire de tous les Algériens». Plus sévère à l’encontre de la première responsable du département de l’Éducation, l’ancien ministre de l’Industrie, dans le gouvernement Benbitour, a affirmé que «lesdites consultations avaient pour but de faire taire les Syndicats». Tout en affirmant que les recommandations fournies par les partenaires sociaux n’ont guère été prises en considération par la tutelle, Menasra a souligné que les critiques, dont a fait objet Benghebrit, sont avérées «bien fondées». «La ministre n’a fait que prendre des décisions individuellement, ce qui a démontré son échec». L’accusant d’être installée afin de servir des agendas occidentaux, Menasra est allé jusqu’à la qualifier de la «grande» servitrice de la France. Par ailleurs, revenant sur le fameux scandale des fuites des sujets au Baccalauréat, le président du Front du changement a regretté que, jusqu’à ce jour, les résultats de l’enquête n’ont pas été rendus publis. «Seuls, deux responsables se sont exprimés quant à ce scandale ayant ébranlé l’Algérie. Il s’agit de Benghebrit qui a accusé des mains étrangères, et de Ahmed Ouyahia qui a accusé les islamistes. Mais, hélas, personne n’a fourni des explications claires quant à ces accusations. Où sont les preuves?», s’est-t-il interrogé.
D’autre part, Menasra a dénoncé la politique de Benghebrit qui, selon lui, vise à «tuer à petit feu» l’École algérienne. Même si la ministre a toujours appelé à algérianiser le manuel scolaire, le président du Front du changement n’a cessé de charger la ministre. Pour lui, il y a une «réelle volonté de supprimer l’Identité nationale». «La religion, l’Histoire et les langues, arabe et amazighe, sont les fondements de l’identité algérienne. Dans la mesure où l’on supprime ces trois fondements, l’Algérie perdra ses repères», a-t-il encore alerté.
Pour ce qui est de la réduction des jours d’examen à trois, il estime que «la démarche n’est qu’un argument avancé, afin de justifier la suppression de ces matières des Constantes nationales». Par ailleurs, il a signalé que la volonté de d’occidentalisation de l’École peut avoir des conséquences désastreuses sur la stabilité, de tout le pays. En effet, pour lui, «les Algériens ne se révoltent pas seulement contre la pauvreté, mais aussi contre la volonté de supprimer ses repères». Pour Menasra, la réforme de l’École en général et du Baccalauréat, en particulier, n’est qu’une «énième» tentative de vouloir frapper et déstabiliser le pays. Enfin, il appelle à plus de sagesse et de transparence dans le traitement des réformes, et à entamer de vraies négociations avec les partenaires sociaux et politiques.
Lamia Boufassa