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Réunis à Kigali, les chefs d’État africains abordent des problèmes de fond : le bon départ pour l’Afrique ?

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La 27ème Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine (UA), qui se tient présentement à Kigali, la capitale ruandaise, fera-t-elle date dans les annales de l’organisation panafricaine ? Tout porte à le croire au vu des points inscrits à son ordre du jour et des discussions auxquelles ils ont donné lieu.

Des discussions qui révèlent une évolution profonde, et salutaire, dans les préoccupations des responsables africains. Rompant avec leurs lénifiantes et, partant, stérilisantes habitudes, en vogue jusqu’à récemment dans leurs rencontres annuelles, de se focaliser sur des généralités à caractère surtout politique, ces derniers ont, en effet, abordé cette fois-ci des thèmes présentant une importance certaine pour le devenir du continent africain. Comme le sont, pour en citer les plus discutés à Kigali, la dépendance de l’Afrique, pour le financement de son développement, des financements extérieurs, sa sous-représentation dans les organes-clés des organisations internationales, notamment au sein du Conseil de sécurité de la plus prestigieuse d’entre elles, l’ONU, à savoir, et la création d’un espace africain de libre-échange.
Des thèmes dont le règlement contribuera, à coup sûr, comme l’ont expressément déclaré tous ceux qui en ont débattu à Kigali, à renforcer la cohésion du Continent vis-à-vis du reste du monde et à assurer les conditions idoines à même d’enclencher irrémédiablement son développement sur tous les plans. Abordant le premier point, le président en exercice de l’UA, le tchadien Idriss Deby Itno, a fait part de la volonté de l’Afrique de s’affranchir au plus tôt de ce qu’il a appelé, non sans raison, faut-il le dire, « la dépendance frustrante et compromettante des financements extérieurs ». Ceci non sans reconnaître, au passage, « l’immensité du défi » que la concrétisation d’un tel objectif représente pour l’Afrique et non sans exhorter, dans le même temps, dans le souci évident de reprocher aux « défaillants» d’entre eux leurs manquements statutaires, ses pairs « à s’acquitter régulièrement et à temps de leurs contributions (financières statutaires) ». Pour mieux faire ressortir et l’importance pour l’Afrique de relever ledit défi et la nécessité pour les membres de l’UA d’une plus grande « discipline statutaire », le président en exercice de l’UA a rappelé « les grandes ambitions d’intégration économique et politique (de l’Afrique) » qui se dégagent de l’Agenda 2063 ; pour rappel, un plan d’action adopté en 2013 par l’UA, qui se propose, à l’horizon 2063, « de construire une Afrique prospère et unie, fondée sur des valeurs communes et un destin commun ». C’est quasiment la même idée qu’a voulu exprimer l’actuelle présidente de la Commission de l’UA, la sud-africaine Nkosazana Dlamini-Zuma, en déclarant que l’Agenda 2063 « vise à favoriser l’émergence d’un continent intégré, géré par ses citoyens ». Et c’est, à l’évidence, à cela – la création d’un tel espace – que vise la Zone de libre-échange continentale (ZLEC), dont la création a été décidée en 2012. Un espace pour lequel le représentant du président Bouteflika à ce 27ème sommet de l’UA, le Premier ministre Abdelmalek Sellal, a longuement plaidé lors de son intervention. Non pas uniquement du fait de la proximité initialement arrêtée de son « entrée en fonction » : l’année 2017, mais pour deux autres raisons. La première, qui rejoint les préoccupations susmentionnées des deux responsables précités, a trait à ce que représentera, une fois concrétisée, « cette importante réalisation continentale » pour le devenir du Continent et pour ses relations avec les autres ensembles existants dans le monde : la mise en place « d’une économie africaine solidaire » qu’elle (la ZLEC) supposera, permettra, a-t-il laissé entendre, à l’Afrique « de faire efficacement face aux autres blocs internationaux». Et la seconde, les éventuels blocages qui pourraient surgir dans la voie de la concrétisation de cet objectif tant souhaité ; du fait, a-t-il déclaré, «de l’appartenance simultanée d’un certain nombre d’Etats membres de l’UA à plusieurs communautés économiques régionales ».
Le renforcement de la position de l’Afrique dans le monde à travers sa représentation dans la plus importante des organisations internationales a été également abordé par Abdelmalek Sellal. Et ce, pour dénoncer ce qu’il a appelé « l’injustice historique » d’être le seul continent (…) à ne pas être représenté dans la catégorie des membres permanents du Conseil de sécurité ayant droit de véto dont elle continue « de souffrir. Une injustice qui ne peut être corrigée, a-t-il poursuivi, que si les pays africains restent solidaires et unis autour de leur récurrente revendication d’une réforme du Conseil de sécurité. Avec 54 pays membres de l’ONU et « 70% des questions que celle-ci traite annuellement», l’Afrique est en droit, selon le Premier ministre Abdelmalek Sellal, de revendiquer plus que les trois sièges non permanents qu’elle détient présentement dans le Conseil de sécurité.
En clair, de revendiquer deux sièges permanents avec droit de véto et cinq sièges non permanents. Cette focalisation des participants à la 27ème Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine (UA) sur la résolution des problèmes de fond qui entravent la marche en avant de leur continent, est perçue par nombre d’observateurs comme le signe évident d’une évolution en profondeur que connaît l’Afrique ; une évolution induite par les non moins profonds bouleversements que connaît le monde depuis, au moins, la chute du Mur de Berlin et, il faut le dire, par la prise de conscience des dirigeants africains, provoquée en partie par ces bouleversements que dans le monde d’aujourd’hui le seul statut qui est reconnu aux faibles est celui d’esclave…
Mourad Bendris

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