Accueil Culture+ «Captain America» ou «Batman v Superman» ? Le match

«Captain America» ou «Batman v Superman» ? Le match

0

Images tirées de « Batman v Superman » et de « Captain America: Civil War ». Images tirées de « Batman v Superman » et de « Captain America: Civil War ».

Sortis à quelques semaines d’intervalle, «Captain America: Civil War» et «Batman v Superman: L’aube de la justice» illustrent parfaitement la guerre que se livrent Marvel Studios, créateur des Avengers et propriété de Disney, et DC Comics, qui appartient au groupe Time Warner. Comparer ces deux blockbusters était trop tentant: voici, en trois temps, un match Marvel contre DC.

L’histoire
Sur bien des points, les scénarios de «Batman v Superman» et de «Captain America: Civil War» se ressemblent. Les deux films mettent en scène l’affrontement de deux héros aux profils opposés: d’un côté, des personnages doués de capacités surnaturelles (Superman, le fils de Krypton, et Steve Rogers, le «Captain America» rendu surpuissant par le sérum du docteur Erskine), de l’autre, des playboys milliardaires qui utilisent leur argent et leur intelligence pour se construire un costume et un personnage (chez Marvel, Iron Man, alias Tony Stark et chez DC, Batman, l’avatar nocturne de Bruce Wayne).
Les deux productions sont marquées par les exigences de leurs univers respectifs. Côté DC Comics, «Batman v Superman» n’est pas simplement le récit de l’affrontement entre les deux champions maison: le film de Zack Snyder introduit une armée de nouveaux personnages, beaucoup plus obscurs pour un public européen moins féru de comics que les fans américains. Wonder Woman tient un rôle de premier rang, mais Aquaman, The Flash et Cyborg font une apparition fugace, qui jette les bases du prochain film «Justice League», voué à devenir le «Avengers» de DC. Chez Marvel, «Captain America: Civil War» arrive au bout d’une longue série de films qui ont familiarisé le public avec la plupart des personnages. Le film introduit cependant Black Panther, un nouveau venu, et, plus périlleux, orchestre le retour de Spider-Man, un héros qui connaît là sa troisième incarnation en quinze ans.
Malheureusement pour «Batman v Superman», la comparaison avec «Captain America : Civil War» n’est guère flatteuse. Le film de DC Comics ressemble à une succession de scènes sans rapport – la première heure est déconcertante – au point que le spectateur peut se demander ce qu’il fait là. Même si le film de Marvel Studios paraît à bien des égards contraint par les impératifs industriels de la machine Disney, il reste assez habile. Il fait le pari de construire patiemment – la moitié du film – les causes et les éléments déclencheurs de cette «guerre civile», si bien qu’elle parait inéluctable. Il prend aussi le temps d’offrir une scène toute en légèreté pour passer l’obstacle le plus dangereux, l’arrivée inattendue de Spider-Man. Le troisième «Captain America» a de surcroit le mérite d’éviter les incohérences catastrophiques qui minent «Batman v Superman», et de ne pas commettre les incroyables fautes de goût du film de Zack Snyder.

Les personnages
Sur le papier, le match est déjà joué. Superman et Batman sont les deux superhéros les plus populaires dans le monde -si l’on en croit Google Trends, qui analyse le volume de recherches, ces deux personnages écrasent nettement Captain America et Iron Man. Batman, porté dans les comics par des auteurs de renom qui ont poussé le personnage dans ses retranchements, a connu au cinéma une résurrection devant la caméra de Christopher Nolan. L’affaire a été plus compliquée pour Superman, dont l’incarnation sur grand écran dans «Superman Returns» avait déçu en 2006. Il n’en demeure pas moins que l’alter ego de Clark Kent est sans doute le plus emblématique de tous les superhéros.
Pourtant, Marvel n’est pas forcément en position de faiblesse. Alors que le film rival doit faire oublier le Batman incarné Christian Bale, «Captain America: Civil War» présente un univers dans lequel les acteurs évoluent depuis 2008. Robert Downey Jr., indissociable d’Iron Man, a toujours une présence incomparable. Chris Evans, lui, est un Captain America solide.
Dans «Batman v Superman», les choses sont plus compliquées. Ben Affleck ne démérite pas en Bruce Wayne/Batman, mais Henri Cavill n’est pas un Superman vraiment convaincant. Il faut dire qu’entre entre les mains de Zack Snyder, Superman est devenu un héros sombre et violent. Dans «Man of Steel», le film réintroduisant son histoire en 2012, le réalisateur avait choqué certains fans avec une scène dans laquelle Superman brise la nuque de son adversaire, une solution quelque peu radicale, bien loin de l’ambiance bon enfant des films avec Christopher Reeve. Un plan de «Batman v Superman» dans lequel on voit Batman faire le même geste a d’ailleurs fait polémique, puisqu’il s’agit d’une rupture directe avec la règle de conduite que se fixe le personnage: ne pas tuer.
Quant aux antagonistes, là encore, leurs qualités respectives illustrent les divergences profondes entre les deux films. Daniel Brühl incarne dans «Captain America: Civil War» un homme dévoré par la vengeance, qui à certains égards est beaucoup plus touchant que la moyenne des «superméchants» qui rêvent de détruire la planète. Dans «Batman v Superman», Jesse Eisenberg est un Lex Luthor dont on ne comprend pas vraiment les motivations, encore moins le génie maléfique. Il paraît la plupart du temps dépassé par son propre plan et se révèle beaucoup plus agaçant qu’inquiétant.

Les scènes d’action
Les deux films sont un véritable festival de scènes tournées sur fond vert, bourrées d’effets spéciaux. Dans le cas de «Captain America», les frères Russo, réalisateurs de «Civil War» comme du film précédent, «Le Soldat de l’Hiver», ont tenté de se rapprocher du véritable cinéma d’action. Les combats sont d’autant plus réussis que le capitaine Rogers se bat d’une manière assez rudimentaire, qui donne aux affrontements un enjeu physique beaucoup plus concret. L’inévitable poursuite en voiture est impressionnante, mais c’est la confrontation de tous les personnages qui fait logiquement figure de point d’orgue. Dans un aéroport déserté -ça tombe bien, le film insiste assez lourdement sur les victimes collatérales des activités des Avengers- les héros font une longue démonstration de leurs aptitudes à la démolition. «Civil War» réussit la prouesse de glisser dans cette baston dantesque des enjeux et des émotions un peu plus profonds que ce dont on a l’habitude chez Marvel, sans abandonner totalement sa légèreté de ton, ni céder à la tentation de la dévastation à grande échelle. Il n’y a guère qu’une tour de contrôle qui s’effondre, ce qui est un véritable effort de sobriété lorsqu’on pense à la ville transformée en projectile dans «Avengers 2: l’ère d’Ultron». Dans «Batman v Superman» apparaît également une volonté de ne point choquer le spectateur soucieux du destin des millions de civils pris bien malgré eux dans l’affrontement des superhéros. La scène d’introduction, qui revisite la fin de «Man of Steel», est réussie car très impressionnante. Pour la suite du film, en revanche, la mégalomanie visuelle de Zack Snyder aboutit à une surenchère, que le film nous invite à cautionner en expliquant sottement que la bagarre se déroule dans des quartiers vidés de leurs habitants. La débauche d’effets spéciaux, comme dans les deux grandes scènes d’action de «Man of Steel», dessert le propos. On finit par se désintéresser sincèrement de ce qui se passe à l’écran, dont il ne ressort qu’une pénombre bruyante troublée d’éclairs lumineux.

Le verdict
«Captain America: Civil War» partage beaucoup des contraintes qui transforment «Batman v Superman» en expérience désagréable. Pourtant, le film de Marvel est mieux écrit et mieux réalisé. On voit mal comment il pourrait réaliser un moindre score au box office que son rival.

Article précédentLes supporters de la JSM Béjaïa mettent en garde les joueurs
Article suivantFeraoun participe au SMSI 2016 à Genève