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RÉSOLUTION 2797 ADOPTÉE PAR LE CONSEIL DE SÉCURITÉ DE L’ONU SUR LE SAHARA OCCIDENTAL : L’Algérie renverse la table

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Le Makhzen ne doit pas jubiler car la résolution N° 2797, votée par le Conseil de sécurité, est loin de considérer son plan d’autonomie des territoires sahraouis sous souveraineté marocaine, comme unique solution au conflit du Sahara occidental.
Elle insiste sur le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et appelle les parties en conflit à des négociations directes dans le cadre de la charte des Nations unies et des résolutions du Conseil de sécurité. Cette résolution, et même si elle est en deçà des attentes du peuple sahraoui et de l’Algérie, est un camouflet aux visées de ceux qui espéraient enterrer 52 ans de lutte du peuple sahraoui pour arracher son indépendance, en faisant du plan franco-marocain le seul cadre qui permettra à Rabat d’annexer le Sahara occidental.
Il faut rappeler, dans ce cadre le rôle joué par la diplomatie algérienne qui a réussi à rééquilibrer le texte du projet de résolution présenté le 22 octobre dernier par les États unis et qui ne faisait pas mention au droit du peuple sahraoui à l’autodétermination. Au prix de négociations et consultations marathoniennes, l’Algérie a réussi, par deux fois à pousser le porte-plume, les États unis, à réviser le texte de la résolution. Il faut rappeler, dans ce cadre, que la diplomatie algérienne avait réussi, avant l’ouverture des débats sur le dossier du Sahara occidental, à déjouer un piège tendu par les promoteurs du plan d’autonomie du Sahara occidental sous souveraineté marocaine. La déclaration du secrétaire d’État américain Witkof qui avait évoqué un plan américain de paix entre l’Algérie et le Maroc qui serait mis en œuvre dans un délai de 60 jours.

Le conflit est entre le Maroc et le Polisario
En fait ce plan visait à faire de l’Algérie une partie du conflit du Sahara occidental pour la présenter, avec ce statut, lors des débats du Conseil de sécurité. La réaction de la diplomatie algérienne qui avait rappelé que la rupture avec le Maroc était une décision souveraine dictée par les actes inamicaux et hostiles du voisin et n’avaient aucun lien avec sa position de soutien à la lutte du peuple sahraoui qui est une position immuable née du principe du soutien exprimé par le peuple algérien à toutes causes justes. C’était la première bombe désamorcée par la diplomatie algérienne qui avait réussi à priver le Maroc et ses soutiens d’un sérieux atouts avant les débats du Conseil de sécurité. L’autre coup de maitre réalisé par la diplomatie algérienne est le refus de voter le texte de la résolution qui ne reflétait pas les lignes de la proposition élargie présenté par le front Polisario. En refusant de voter, elle exprimait une position de principe tout en laissant la porte ouverte devant l’adoption du texte pour ne pas compromettre le sort de la Minurso qui a vu son mandat prolongé d’une année et non trois mois comme le souhaitait le Maroc. Mieux encore le rôle de la Minurso pourrait même se voir, à la faveur des dispositions de cette résolution, renforcé puisque la nature de ses missions doit s’inscrire dans le cadre du droit international, la charte des Nations unies et de l’appréciation du secrétaire général de l’Onu. Et sur ce point, l’élargissement des prérogatives de cette mission au contrôle des droits de l’Homme dans les territoires occupés est aujourd’hui envisageable n’en déplaise au Maroc et ses soutiens.   

Le retour au droit international  
L’Algérie a déjoué la manœuvre américaine qui visait à faire sortir le plan de résolution du conflit du cadre légal en imposant dans le texte adopté le retour au droit international dans la résolution du conflit. La diplomatie algérienne n’a pas cédé devant les pressions occidentales et a maintenu la ligne de principe de sa politique étrangère, à savoir la défense des peuples opprimés et le soutien à leur droit à l’indépendance. C’est pourquoi, le Maroc ne doit pas crier victoire car le texte adopté ne considère son plan d’autonomie des territoires que comme une option négociable, parmi tant d’autres, entre lui et le front Polisario, représentant du peuple sahraoui dans le cadre du droit international.
Grace à ses efforts, la diplomatie algérienne a réussi à apporter des modifications sur quatre axes du projet de résolution américaine. Le premier axe est que la solution doit impérativement passer par le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination, ce qui est une reconnaissance explique du droit du peuple sahraoui à disposer de son sort. Le plan d’autonomie est devenu dans le texte adopté une option et puisque la nouvelle formulation souligne la nécessité de parvenir à « une solution politique définitive, mutuellement acceptable, garantissant au peuple du Sahara occidental son droit à l’autodétermination », faisant ainsi de ce droit un objectif fondamental en soi, et non plus une conséquence secondaire d’une option prédéterminée. À cet effet, un amendement essentiel a été introduit, appelant l’Envoyé personnel du Secrétaire général des Nations unies à « mettre en œuvre les résolutions antérieures du Conseil de sécurité », replaçant ainsi le processus politique dans son cadre juridique originel. Cela « ressuscite » même les résolutions précédentes adoptées par le Conseil de sécurité et qui reconnaissait au peuple sahraoui le droit à l’autodétermination que le Maroc avait ignorées, voire vidées de leur signification.

Neutraliser le narratif du Makhzen
La nouvelle mouture adoptée affirme que la solution doit être conforme à la Charte des Nations unies. L’Algérie a réussi à modifier le projet de résolution qui imposait initialement la thèse marocaine comme unique base de la solution au Sahara occidental. Le texte final adopté, la solution définitive doit être mutuellement acceptable et conforme aux buts et principes de la Charte des Nations unies, tout en garantissant le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination. Encore une gifle au Maroc.  
Le troisième axe concerne le recul de « l’autonomie » comme unique option, les références à cette proposition marocaine ayant nettement reculé dans la version finale. Alors que le projet initial la qualifiait de « cadre unique », le texte final la décrit comme simple « base » de discussions, soulignant qu’elle « peut représenter » une solution envisageable, et non pas l’unique solution. La résolution finale a également ajouté un paragraphe accueillant favorablement « toute proposition constructive des deux parties », ouvrant officiellement la voie à d’autres options et plaçant la proposition du Front Polisario sur la table des négociations. Le quatrième axe concerne l’importance du rôle de la MINURSO. L’une des améliorations substantielles obtenues a été la prorogation du mandat de la MINURSO pour une année complète, jusqu’au 31 octobre 2026, contre seulement trois mois dans la version initiale, ce qui contredit les objectifs pour lesquels a œuvré le Maroc, qui a toujours remis en cause la MINURSO pour écarter l’option référendaire et promouvoir l’autonomie comme solution unique et définitive. Cette prorogation d’une année constitue une réaffirmation claire de l’importance du rôle de la MINURSO dans le soutien au processus politique et la préservation de la stabilité dans la région, tel que mentionné dans le texte final, qui insiste sur « l’importance de respecter le cessez-le-feu et d’éviter toute action susceptible de compromettre le processus politique ».

La Minurso et l’immuable autodétermination
La diplomatie algérienne a réussi à replacer le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination comme base de négociations avec la puissance coloniale. Elle a réussi à inscrire toute action relative à ce dossier dans le cadre du droit international et la charte des Nations unies. Par son refus de voter, elle a exprimé ses réserves concernant la teneur du texte adopté tout en laissant la porte ouverte vers la prolongation du mandat de la Minurso que la première mouture vouait à la disparition en ne lui accordant qu’un délai de 3 mois comme le souhaitait le Maroc.  Maintenant que le Conseil de sécurité à défini un cadre de règlement du conflit du Sahara occidental, le Maroc et ceux qui le soutiennent auront-ils le courage politique d’aller vers des négociations avec le Front Polisario pour définir un mode d’organisation du référendum d’autodétermination ou ruseront-ils comme d’habitude ?
Slimane B.

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