Les étudiants marcheront aujourd’hui, comme chaque mardi, à travers le pays. Un 26e acte de mobilisation qui, par coïncidence, intervient un certain 20 août, dont la date rappelle le Congrès de la Soummam de 1956, qui devra, encore une fois, inspirer la manifestation de la communauté estudiantine.
Malgré la période des vacances marquée cette année par des pics de chaleur et la grande canicule, le mouvement de protestation des étudiants ne baisse pas après six mois de mobilisation continue. Pour le 26e mardi, la manifestation des étudiants coïncide avec la commémoration du 63e anniversaire du Congrès de la Soummam (20 août 1956). Un acte majeur qui a structuré la Révolution algérienne organisé la lutte pour l’Indépendance pour lui donner une assise nationale et révolutionnaire, une visibilité sur le plan international, et projeter sur les fondements de l’État algérien post-indépendant. Donc, le congrès de la Soummam est un évènement historique qui pourrait inspirer et donner une nouvelle impulsion au Mouvement populaire en marche depuis le 22 février dernier, dont les acteurs craignent, face à l’absence d’une solution à la crise, un essoufflement. À Alger, les étudiants s’affairent à battre le pavé pour la 26e fois de suite, en empruntant le parcours ordinaire de la Place des martyrs jusqu’à la Place Maurice Audin pour atteindre l’esplanade de la Grande Poste. Comme il était d’usage depuis maintenant deux mois, les citoyens devraient rejoindre l’action des étudiants, à l’invitation de ces derniers, qui défileront sous les mêmes slogans scandés chaque vendredi et revendiquant un État de droit, la libération des détenus et plus de démocratie et de libertés individuelles.
Comme le Congrès de Soummam a été l’acte qui a doté la Révolution nationale d’organes représentatifs et de porte-paroles, les Algériens, aujourd’hui, les étudiants notamment, aspirent à voir de véritables leaders émerger pour pourvoir négocier avec le Pouvoir pour traduire sur le terrain les revendications du Mouvement, pour aller vers une nouvelle République et la mise en place d’un État de droit et de justice sociale. Une nouvelle initiative de dialogue a été lancée, en l’occurrence le panel pour la médiation et le dialogue, qui a désigné aussi un nombre de personnalités rapprocher les points de vues entre partis politiques et société civile, par cette démarche initiée par les autorités a été vite contestée par le Hirak. Les manifestants reprochent à l’instance de Karim Younès d’être trop aux côtés de la présidence et du pouvoir, et de négliger la question des détenus ; beaucoup de manifestants et d’étudiants ont été interpellés et emprisonnés pour port de l’emblème amazigh, en plus de la détention du moudjahid Lakhdar Bouregrâa. Samedi dernier, une dizaine d’étudiants ont envahi la salle abritant une rencontre du Panel dans la rue Larbi Ben M’hidi et ont rappelé à l’adresse des présents leurs revendications et leur refus de se voir représenter par des syndicats et organisations estudiantines réputées beaucoup proches du Pouvoir et des partis politiques, dont aujourd’hui les premiers responsables sont en prison pour des faits de corruption. Il est aussi à noter que le coordinateur du panel de dialogue ne jouit pas de popularité chez les manifestants. Au contraire, son nom a été décrié et hué moult fois par les marcheurs qui criaient : « Karim Younès, il n’y aura pas de vote ! ». Reste à savoir l’attitude que réservera cette semaine les étudiants au staff de Karim Younès qui a prévu des rencontres dans toutes les wilayas avec des étudiants, associations de la société civile et partis politiques. Le nom et les portraits du moudjahid Lakhdar Bouregrâa, qui se trouve en prison, sont brandis par les étudiants à l’occasion de chaque marche de mardi, pour réclamer sa libération immédiate.
Pour renforcer ce lien marquant cette convergence de luttes entre le passé (la Révolution de libération nationale) et le présent (la mobilisation citoyenne pacifique pour une nouvelle République), l’Organisation nationale des moudjahidine (ONM) a rappelé récemment que le chef historique de la wilaya IV, Lakhdar Bouregâa, a été chargé, au lendemain du congrès de la Soummam, entre autre par les chefs historiques Larbi Ben M’hidi, Abane Ramdane et Ouamrane de « contribuer à la formation militaire et politique des jeunes étudiants qui venaient de rejoindre la Révolution ».
Dans leur action d’aujourd’hui, les étudiants ne manqueront pas, à travers les slogans et banderoles qu’ils brandiront, de rependre les luttes de leurs aïeux. Une manière de donner un nouveau souffle à la mobilisation. Hamid Mecheri