Accueil MONDE 20 ans après : le massacre de Srebrenica hante encore les Pays-Bas

20 ans après : le massacre de Srebrenica hante encore les Pays-Bas

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Vingt ans après, le massacre de Srebrenica continue à hanter les Pays-Bas, qui ne cessent de s’interroger : les Casques bleus néerlandais, chargés de protéger l’enclave, auraient-ils pu en faire plus pour empêcher la mort de près de 8 000 musulmans ? Articles et émissions multiples, polémiques à répétition, poursuites judiciaires : les Pays-Bas n’ont pas tourné la page Srebrenica, alors qu’une enquête avait entraîné la démission du gouvernement en 2002. Le pire massacre commis en Europe depuis la Deuxième Guerre mondiale, qualifié de génocide par la justice internationale, a eu lieu en juillet 1995, quand les Casques bleus, faiblement armés et peu nombreux, ne peuvent empêcher la chute de l’enclave, déclarée «zone protégée» par l’ONU. Retranchés dans leur base militaire non loin de là, les Néerlandais du «Dutchbat» y accueillent quelques milliers de réfugiés avant d’en fermer les portes aux autres à cause de la «situation humanitaire». Ils laissent ensuite les Bosno-Serbes évacuer ceux qui s’étaient réfugiés sur la base.

«Confrontés à notre impuissance»
Les Pays-Bas se targuent d’une longue tradition de participation aux missions de maintien de la paix et de justice internationale, mais ils «ont été confrontés à leur impuissance», assure à l’AFP Ko Colijn, chercheur en politique et sécurité internationale à l’Institut Cligendael. De nombreux rapports estiment que les Néerlandais ont accepté la mission pour des raisons morales, sans en «examiner sa faisabilité».
Ces experts évoquent, notamment le rôle possible d’un sentiment de culpabilité, suite à la collaboration pendant la Deuxième Guerre mondiale, et des raisons politiques pour expliquer cette «erreur d’appréciation», alors qu’aucun autre pays ne désirait fournir des troupes à l’ONU. Le ministre néerlandais de la Défense de l’époque, Joris Voorhoeve, assure, lui, que les polémiques incessantes sont dues «à la tendance calviniste des Néerlandais à s’auto-flageller». «Et au pouvoir de la vidéo», ajoute-t-il, évoquant notamment, les images du commandant Thom Karremans en compagnie du chef militaire des Serbes de Bosnie Ratko Mladic : «Ces images ont choqué mais elles ne montrent pas les heures de négociations, les désaccords…»

Excuses limitées
Les survivants et familles des victimes estiment que les Pays-Bas n’ont pas fait tout leur possible pour empêcher le massacre et continuent d’exiger des excuses de La Haye. «Il faut s’excuser auprès des enfants qui ont grandi sans leur père, leurs oncles, leurs frères», assure à l’AFP Mohammed Dukovic, qui avait 17 ans à l’époque et a survécu en fuyant dans les montagnes.
Taxés de lâcheté, critiqués, les «Dutchbatters» affirment avoir fait ce qu’ils pouvaient avec des moyens «limités». «Nous avons fait ce que nous avons pu, mais nous avons été abandonnés, et beaucoup de gens ont du mal à le comprendre», assure à l’AFP un ancien membre du Dutchbat, Ludy de Vos, selon qui nombre de ses anciens collègues souffrent du syndrome de stress post-traumatique. En septembre 2013, après une bataille juridique longue de 10 ans, les Pays-Bas sont devenus le premier État tenu responsable des actes de ses soldats sous mandat de l’ONU.
Si La Haye s’est excusée fin juin pour la mort de trois musulmans, le gouvernement continue de refuser de s’excuser pour les milliers d’autres décès.
Dans une autre procédure, La Haye a néanmoins été reconnue responsable de la mort de 300 personnes évacuées de la base des Casques bleus. Jamais loin dans les esprits, Srebrenica pèse également sur la politique internationale du pays : les Néerlandais font désormais en sorte de ne devoir compter sur personne avant d’envoyer des troupes à l’étranger. Après les événements de juillet 1995, l’ONU a revu le principe des «zones protégées» et mené une étude des missions de maintien de la paix, entraînant une série de réformes, dont l’envoi de matériel adéquat. Yasushi Akashi, qui était le représentant spécial des Nations unies en Bosnie, reconnaît que le Conseil de sécurité n’avait pas non plus examiné la «faisabilité» de ses résolutions. «Nous avons envoyé des soldats pour maintenir la paix, alors qu’il n’y avait plus de paix à garder», a-t-il assuré à l’AFP.

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