Malgré un cessez-le-feu fragile à Hodeida, la situation est toujours aussi préoccupante au Yémen, a soutenu, Tom Peyre-Costa, du Conseil norvégien pour les réfugiés, soulignant que depuis l’intervention d’une coalition arabe sous commandement saoudien en mars 2015, la situation humanitaire se dégrade.
«Quatre ans après l’engagement saoudien dans le conflit au Yémen, la guerre s’enlise, la situation humanitaire se dégrade, sans que l’espoir d’une paix à court terme ne se profile», a déclaré Tom Peyre-Costa, cité mardi par RT France, affirmant que «tant que les deux camps seront soutenus financièrement, ils continueront la guerre». Alors qu’un cessez-le feu dans le port stratégique d’Hodeida (ouest) avait été négocié dans le cadre d’un accord entre les belligérants, les forces progouvernementales et les éléments du groupe «Ansarullah» (Houthis), à Stockholm le 21 décembre 2018, sous l’impulsion de l’envoyé spécial des Nations unies pour le Yémen, Tom Peyre-Costa déplore une récente reprise de conflits sporadiques. «L’accord de Stockholm comprenait un cessez-le-feu à Hodeida, des dialogues politiques, l’ouverture de corridors humanitaires et des échanges de prisonniers. Jusqu’à maintenant, un arrêt des combats et la réduction des violences ont bien eu lieu, mais ni l’ouverture des corridors humanitaires ne s’est produite, ni les échanges de prisonniers.
Et depuis deux ou trois semaines, les combats ont repris à Hodeida dans les parties est et sud», poursuit l’humanitaire. Pourtant, la vie avait repris dans le port, les magasins avaient rouvert leurs portes, les transports s’étaient remis à fonctionner. Mais cette amélioration toute relative ne pouvait faire oublier l’intensification des attaques sur les civils dans le reste du pays, qui n’était pas concerné par l’accord. 344 civils sont tombés depuis trois mois dans les villes yéménites de Taïz et Hajjah, et au total, 800 civils ont été tués depuis trois mois. Ce chiffre correspond à un doublement des victimes civiles, remarque le porte-parole. Selon lui, l’accès à l’aide humanitaire dans le pays reste hautement problématique, puisque 80% de la population, soit 24 millions de Yéménites, a besoin d’aide humanitaire, 20 millions ont besoin de nourriture et 10 millions sont au bord de la famine, précise-t-il. Il note que, si à Hodeida, les principaux points de stockage contiennent bien du blé et autres denrées, ces dernières ne peuvent être acheminées à l’intérieur du pays.
Un bilan qui ne cesse de s’alourdir
Trois millions de déplacés, 700 000 habitants partis d’Hodeida, entre 50 000 et 80 000 victimes civiles : le bilan de cette guerre oubliée ne cesse de s’alourdir. Et l’attitude de la communauté internationale ne permet pas d’espérer une résolution rapide. «Il existe une grande hypocrisie dans ce conflit. La France, l’Angleterre et les Etats-Unis promettent des dons humanitaires énormes. Mais d’un autre coté, ils financent la guerre, et allouent plus d’argent aux bombes qu’à l’aide. A Genève, lors du plan pour le Yémen en février dernier, la France a promis 10 millions, l’Arabie saoudite 500 millions… mais qu’est-ce par rapport aux 280 milliards de dollars en dépenses militaires qui, selon nos estimations, ont été engloutis dans le conflit [depuis ses débuts]», s’interroge Tom Peyre-Costa. Lundi, les Nations unes ont annoncé que près de 110.000 cas présumés de choléra ont été recensés depuis le début de l’année au Yémen, causant 190 décès dans un pays ravagé par la guerre. Environ un tiers des 108.889 cas de choléra rapportés entre le 1er janvier et le 17 mars concernent des enfants de moins de cinq ans, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (Ocha). Cette forte hausse, qui intervient deux ans après la plus grave épidémie de choléra au Yémen, se concentre dans six provinces du pays dont celle de Sanaa, où se trouve la capitale éponyme, et celle de Hodeida, sur la mer Rouge. «La situation est exacerbée par le mauvais entretien du système d’évacuation des eaux usées dans de nombreux secteurs touchés, l’utilisation d’eau contaminée pour l’irrigation et les mouvements de population», a indiqué l’OCHA, présentant les pluies précoces comme une autre possible explication. Les maladies véhiculées par l’eau sont endémiques au Yémen. En 2017, plus d’un million de cas présumés de choléra avaient été rapportés en huit mois. Plus de 2.500 personnes sont mortes de cette épidémie entre avril et décembre 2017. Le Yémen est déchiré par un conflit dévastateur depuis l’intervention d’une coalition arabe sous commandement saoudien en mars 2015 pour soutenir des forces progouvernementales contre les éléments du groupe «Ansarullah» (Houthis). Le conflit a provoqué la pire catastrophe humanitaire au monde selon l’ONU et a fait quelque 10.000 morts. Des ONG estiment que le bilan des victimes est largement supérieur. Ce contexte a favorisé la recrudescence des cas présumés de choléra, les civils souffrant d’un manque d’accès à l’eau potable et aux soins médicaux.