C’est une première dans l’histoire du Parlement national. Un député issu des rangs de l’opposition est porté à la tête de l’Assemblée populaire nationale. Le nouveau chef en poste a pour nom Slimane Chenine, élu hier à la majorité, lors d’une séance plénière consacrée au vote du successeur de Mouad Bouchareb. Ce dernier a démissionné le 2 juillet dernier suite à la pression des députés de son parti, comme à celle de la rue, qui a réclamé son départ du trône de l’hémicycle de Zighout Youcef.
Le nouvel élu président de l’APN n’est autre que le chef du groupe parlementaire de l’alliance islamiste Ennahda-Adala-Bina. L’heureux élu a dû forcer l’admiration de ses rivaux pour sortir gagnant, entre six ou sept concurrents, parmi lesquels ceux représentants les cylindrées FLN et RND, qui disposent pourtant de la majorité, à laquelle s’ajoute leurs apparentés de la coalition présidentielle ; le MPA et le TAJ.
De cette nouvelle élection, qui change complètement la configuration politique de l’APN, le consensus, dont jouissait Chenine, tout au cours de la 8e législature, a pesé favorablement en sa faveur. Preuve en est, les groupes parlementaires du RND, MPA, TAJ et les Indépendants ont fini par rallier leurs voix au député du FJD, dirigé par Abdallah Djaballah. Sur le plan politique, les positions de Chenine à l’Assemblée nationale-qui n’étaient pas forcément en droite ligne avec ses partenaires islamistes- ont fait de lui le troisième homme de l’État, un titre dont il devra en assumer la lourde charge qu’il a héritée aujourd’hui, en pleine grave crise politique de surcroît. Homme de consensus, Chenine était de la lignée idéologique de feu Mahfoud Nahnah. Non seulement pour avoir été l’un des cadres du Hamas, bien plus que ça. Dans ses positions, en effet, il a toujours privilégié la modération à la radicalité, l’intérêt du pays à l’ambition partisane et les Institutions de l’État à l’appareil politique.
Tout le monde garde en mémoire l’une de ses plus tonitruantes interventions à l’APN, faite en septembre 2017. Se tenant alors en face de l’ex-Premier ministre Ouyahia, aujourd’hui en détention préventive à la prison d’El Harrach, Chenine a fait une déclaration prophétique qui allait prédire qu’adviendrait la situation que vit notre pays aujourd’hui : «Mr le Premier ministre, ce dont vous n’avez pas parlé, ce sont les dangers qui menacent les fondements de l’État algérien et non pas seulement du système politique», dira-t-il alors pour parler d’une crise de légitimité des Institutions élues. Agé de 54 ans, Slimane Chenine est élu député en 2017, sur la liste du FJD dans la circonscription d’Alger.
Farouk Bellili