«C’est peut-être un résultat injuste, mais dans le football, si vous marquez et pas l’autre, vous gagnez»: Fernando Santos a l’habitude des critiques sur son Portugal, dominé par le Maroc mercredi malgré sa victoire (1-0). Deux ans plus tôt, il avait ainsi remporté l’Euro-2016… C’est tout le paradoxe du Portugal de Cristiano Ronaldo, une sélection riche en joueurs de talent et très fins techniquement, comme Bernardo Silva (Manchester City) par exemple, et qui pourtant est régulièrement critiquée pour le peu de spectacle proposé.
«Savoir être vilain»
«Jouer, être beau… De temps en temps, il faut savoir être vilain !», plaide auprès de l’AFP l’entraîneur champion de France 2012 avec Montpellier, René Girard. «On est resté un peu sur notre faim, mais moi j’ai regardé le côté agressif, sur le plan défensif, de cette équipe qui, avec Ronaldo mais aussi Bernardo Silva, a quand même un gros potentiel offensif.» Moches, ces Portugais ? «Ils jouent efficace, ils ont gagné l’Euro comme ça», rappelle Girard. Car en 2016, les hommes de Fernando Santos avaient gagné le premier trophée majeur de ce pays fan de foot après trois matchs nuls en phase de groupe, contre l’Islande, l’Autriche et la Hongrie. C’était après un succès pénible contre la Croatie en huitièmes de finale (1-0 a.p.), que Santos avait assumé de gagner sans spectacle: «Cela nous importe peu que ce soit spectaculaire ou pas. Certaines fois vous jouez de manière peu spectaculaire et vous gagnez, d’autre fois, vous jouez de manière très spectaculaire et vous perdez».
Santos pas satisfait
Après le match contre le Maroc mercredi, Santos a certes renvoyé dans leurs cordes des journalistes affirmant que la victoire portugaise n’était pas méritée, mais il s’est aussi montré très critique quant à la prestation de ses troupes. «Nous avons de très bons joueurs mais nous avons manqué d’intensité. Nous avons des joueurs qui ont la qualité technique et la rapidité, nous avons bien débuté mais ensuite cela a été plus compliqué, a relevé le coach de 63 ans. Il y a eu beaucoup de passes ratées, une dynamique lente après le premier quart d’heure. Notre équipe est forte, mais nous devons progresser, nous devons faire mieux que ça pour avoir davantage de possession par exemple.» «Il peut ne pas être complètement satisfait, mais justement il va pouvoir corriger le tir», observe pour sa part l’ancien coach du Paris SG, Guy Lacombe. «L’avantage c’est que les joueurs en sont conscients, comme en sont conscients les Français par exemple, et cela permet à l’entraîneur de pouvoir pointer du doigt ce qui va, ne va pas… Le Portugal peut faire bien mieux que ce qu’on a vu, même si je les ai trouvés très bon défensivement», a insisté Lacombe.
Régime d’exception pour CR7
«On sait qu’il faut faire beaucoup mieux, qu’il faut jouer mieux, et essayer de garder plus le ballon, a concédé Bernardo Silva après la rencontre. Mais à la fin on a gagné le match, on est contents». Les Portugais acceptent d’autant plus de souffrir dans le jeu qu’ils savent qu’ils peuvent compter sur l’atout maître Cristiano Ronaldo, quatre buts en deux matchs dans ce Mondial. «L’action de l’entraîneur va être d’amener tous les joueurs à accepter qu’un joueur soit un peu en retrait sur certaines actions, ou traité un peu différemment, comme l’est Ronaldo, observe encore Guy Lacombe auprès de l’AFP. Et ils l’acceptent d’autant plus que le joueur est efficace». Efficace, un peu comme le «gagner moche» en 2016.