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Œuvre artistique du chanteur Idir : Une «projection de la culture locale dans l’héritage universel»

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L’œuvre artistique du chanteur Idir, décédé samedi dernier, constitue une «projection de la culture locale dans l’héritage universel», a considéré lundi Abderrezak Dourari, enseignant-chercheur au département de langue et culture amazighe (DLCA) de l’Université Mouloud-Mammeri de Tizi-Ouzou (UMMTO).

Cette projection s’illustre «à travers sa quête de cette dimension universelle dans son propre vécu culturel et dans son rapport critique à la culture algérienne et son questionnement permanent sur la nécessité de la faire évoluer pour faire ressortir cet aspect universel contenu en elle», a souligné l’Universitaire dans une déclaration à l’APS. Pour ce faire, le chanteur, a-t-il ajouté, a construit son œuvre artistique sur «deux grandes perspectives qui ont constitué le fil conducteur de l’ensemble de son œuvre, à savoir, la démocratisation de la culture algérienne et sa critique profonde».
Cette démocratisation du fait culturel chez Idir, «passait par le rejaillissement à la surface des considérations identitaires, culturelles et anthropologiques algériennes contenues dans son fond historique riche et complexe à travers une quête de son amazighité», qui a marqué toute son oeuvre, a-t-il expliqué.
Quant à sa critique profonde, à l’instar de son compatriote Mouloud Mammeri, de la culture algérienne et particulièrement kabyle dans laquelle il a vécu, elle a consisté à «tenter de pousser les esprits à remettre en question certains éléments de pensée considérés comme constitutifs de cette culture et les amener à adopter une posture d’ouverture», a-t-il précisé. Rappelant sa première chanson «Vava Inouva» par laquelle il a acquis les coeurs et les esprits, Dourai a observé qu’elle reflète «une des premières quêtes universelles et humaines de recherche de sécurité et de protection contre les forces invisibles du mal et les contingences de la vie (lwahch lghaba), à travers la complainte de la fille Ghriva». M. Dourari, fait remarquer, à ce titre, que «ce prénom même n’est pas anodin et contient une charge sémantique profonde dans la culture kabyle où il est attribué à une fille ayant perdu son père et qui exprime cette recherche d’une protection paternelle (Vava Inouva), un sentiment que l’on retrouve chez tout être humain». L’autre question «essentielle et pesante» qui a constitué «une idée d’arrière plan» dans l’ensemble de l’oeuvre du chanteur, a poursuit l’universitaire, est «la place et la condition de la femme dans notre société et la nécessité de sa libération de la persistance de certaines idées et croyances». Il relèvera, à ce propos, que dans son dernier album, «Lettre à ma fille», l’artiste appelle à «la consécration et la reconnaissance de l’humanité de la femme qu’il place sur un même pied que son frère.
(Ayeli azizen am tasa, ur seqar yifikm gmam/ Ma fille, toi la prunelle de mes yeux, ne te dis jamais que je préfère ton frère à toi)». Il se pose, également, à travers son texte que décortique l’universitaire en «père garant de la justice entre ses enfants de sexes différents face à l’emprise encore tenace d’idées de patriarcat et d’exhérédation des femmes», et aussi, en libérateur de son individualité (ma yhemlikem win tehemladh mlas ayen igessaram, nek ghuri sehlen lumur awid kan ad yaks tlam/ Si celui que tu aimes t’aime aussi, partages avec lui ses rêves, car pour moi les choses sont simples, pourvu que les choses vont bien).

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