Les chauffeurs de taxi menacent de débrayer dans toutes les wilayas si les autorités publiques ne mettent pas des mesures pour régler la situation des « licences de moudjahidine » et aussi l’annulation des « contraintes bureaucratiques » sur les indemnisations, décidées par le président de la République au profit des professions impactées par l’épidémie de Covid-19.
Mercredi dernier, la Coordination des chauffeurs de taxi de la wilaya d’Alger, affiliée à l’UGTA, a adressé une lettre au ministre des Transports, Lazhar Hani, pour lui faire part de son refus des conditions « contraignantes et injustes » exigées par la Commission mixte installée pour la circonstance pour bénéficier des indemnisations pour la période de non-travail subie en raison du coronavirus. En juillet dernier, l’État a décidé d’allouer un salaire mensuel de 30 000 DA aux chauffeurs de transports en commun de personnes, les receveurs et les chauffeurs de taxi pour les aider à subvenir à leurs besoins après l’arrêt de leurs activités dans le cadre des mesures de prévention visant à endiguer la propagation du coronavirus. Cette décision, a été accueillie avec grande satisfaction et bonheur des taxieurs. Mais nous étions pleinement surpris par la décision de la commission mixte interministérielle de 12 septembre qui exige que le chauffeur de taxi doit être à jour dans ses cotisations avec la CASNOS. Cela, à notre sens, contredit les instructions de président de la République, qui n’a pas évoqué l’obligation de se conformer à la sécurité sociale », nous a expliqué hier, Sid Ali Aït Lhocine, membre du bureau de la CCTWA. « Nous avons espéré que les dossiers à formuler pour en bénéficier de ces indemnisations soient identiques ou les mêmes dossiers que nous avons remis pour l’aide de 10 000 DA consacrée aux familles impactées par le Covid-19. Mais ils nous ont exigé de prouver notre cotisation à la CASNOS pour l’année dernière et cette année 2020. Cette condition privera près de 90 % des taxieurs d’en bénéficier », a-t-il poursuivi. La sécurité sociale est, depuis des années, un véritable problème pour les chauffeurs de taxi. La CCTWA avait proposé à maintes reprises l’ouverture d’un dialogue avec le ministère de tutelle afin d’arriver à un accord réglant définitivement ce problème. « Mais la bureaucratie et les dirigeants de secteurs issus de l’ancien système n’ont pas permis de conclure un accord », a regretté le représentant syndical. Ce dernier réclame aussi des explications et précisions de la part des autorités concernées pour le cas des transporteurs inter-wilayas qui se trouvent sans travail depuis plus de sept mois, le gouvernement n’ayant pas décider encore la reprise de ce secteur. À l’origine aussi de la colère des taxieurs, le problème des licences de moudjahidine qui s’est posé encore durement depuis la période de confinement. « Une grande partie des chauffeurs de taxi, que je peux situer à 98 %, ont vu leur contrat de location des licences de moudjahidine – renouvelables chaque 12 mois – terminés durant cette période de coronavirus. La majorité des taxieurs exercent désormais sans licence d’exploitation, c’est-à-dire illégalement, car ils n’ont plus de quoi payer les ayants droit, propriétaires de ces licences », se désole Aït Lhocine. Il affirme que les taxieurs ne veulent plus revivre le spectre de diktat des propriétaires de ces licences de moudjahidine, et qu’ils exigent dorénavant des licences administratives remises par le ministère de tutelle. L’idée de mener un débrayage national général intervient plusieurs mois de « faux espoirs » et de frustration dans le secteur quant à un proche règlement issu de leurs doléances. « Si les indemnisations devraient arriver en 2021 ou 2022 à cause des lenteurs administratives, cela servira à quoi ? Nous avons subi de grosses pertes que l’on ne peut chiffrer. Des taxieurs ont même vendu leurs véhicules et d’autres ont contracté des dettes. Nous avons serré la ceinture et montré très compréhensifs de la situation sanitaire dans le pays, mais notre patience à des limites, il faut savoir que des familles n’ont pas travaillé depuis plus de sept mois », s’est offusqué Sid Ali Aït Lhocine. Il assure : « Cette fois-ci nous n’allons pas nous taire. Il y aura un grand débrayage et nous allons demander l’intervention de président de la République ». Sur la date du mouvement de protestation des taxieurs, il a affirmé que la CCTWA mène une concertation avec les autres coordinations UGTA des autres wilayas pour fixer une date commune de protestation afin « de rendre de la considération à cette importante corporation du secteur des Transports ».
Hamid Mecheri