Abderrezak Makri, leader du Mouvement pour la société de la paix (MSP), a réitéré hier, son appel à reporter l’échéance présidentielle de 2019, «le temps de permettre à toutes les parties d’arriver à un consensus qui évitera bien des dangers au pays».
Dans un entretien au quotidien «El-Khabar», il a relevé «des tentations de succéder à Bouteflika» chez une partie des personnalités du sérail et aussi «la confusion et l’opacité dans le camp de l’opposition dans sa perception de cette échéance. Deux facteurs qui empêchent ce consensus, très nécessaire, à en croire Makri, pour définir les contours de ce rendez-vous électoral de 2019 et aussi pour redonner du souffle à l’initiative de son parti. N’empêche qu’il a irrité ses collègues dans l’opposition, eux, qui appellent à faire barrage à un nouveau mandat ou d’en finir carrément avec «la Continuité» pour le président de la République. Lorsqu’il a été interrogé sur la question, Makri a sèchement taclé, et le Pouvoir, et les responsables de l’opposition : «L’idée d’un candidat du consensus est acceptée de tous, par le Pouvoir en place et aussi une large partie de l’opposition. Le problème c’est que nous n’arrivons pas à mettre en œuvre l’idée». «Dans l’entourage du Président, plusieurs personnalités veulent lui succéder, tandis que dans l’opposition, le débat n’a pas été posé avec acuité à cause du manque de confiance dans les garanties du pouvoir», a-t-il poursuivi. Pour Makri, si l’on organise la présidentielle dans la date fixée, cela ne ferait qu’accroître l’exaspération au sujet de ce scrutin. «Aller aux élections sans consensus est porteur de dangers. L’idée de consensus est acceptée de tous, mais elle pourrait être contrariée par le manque de temps. C’est pour cela que nous avons proposé l’idée de reporter l’élection présidentielle d’une année au maximum. Cela permettra à toutes les parties de dégager un consensus qui évitera bien des dangers au pays», a-t-il défendu. Parmi les éléments de son initiative qui continuent toujours à lui attirer les pires critiques, son appel, l’été dernier, à l’institution militaire de s’ingérer dans les affaires politiques, c’est-à-dire, à intervenir pour choisir le prochain président de l’État. Alors, Makri croit-il encore en son appel à l’Armée ? Makri, qui incarne la ligne dure dans sa formation islamiste, considère que «l’Armée pourrait intervenir pour imposer un nouveau président», mais il critique : «si elle choisit un militaire cela signifierait le retour à la militarisation de l’État». Pour expliquer, il met au clair son opinion. «Nous voulons une personnalité civile à la Présidence, tranche-t-il, Nous ne voyons pas d’inconvénient à ce que ce soit un ancien militaire reconverti dans la politique depuis longtemps, mais qu’une personnalité saute de son poste de militaire pour se reconvertir subitement en civil qui veut diriger le pays, cela est inacceptable». Cela dit, si Makri admet une «certaine ambigüité» dans la sphère décisionnelle à la Présidence, il n’accorde pas beaucoup de crédit à la théorie d’une dualité entre l’institution militaire et le président de la République, mais il ne manque pas decritiquer les gens du Président. «L’absence d’informations sur les intentions du Président a fait naître des ambitions dans son entourage. Plusieurs personnalités proches du chef de l’État et soutenues par des cercles d’influence se voient aptes à lui succéder», a-t-il fait savoir. Ce qu’il en pense du dernier message du Président, où est évoqué : «des aventuristes», «des manœuvres infâmes» et «ceux qui tiennent le bâton par le milieu» ? Makri pense qu’il s’agit «de mises en garde destinées à des parties au sein du pouvoir». Il commente : «toutes les personnalités du système qui aspirent à succéder à Bouteflika sont des personnalités dictatoriales, qui, de plus, n’ont aucune compétence pour la gestion de l’économie et constituent un danger pour le pays, pour la démocratie et pour le MSP».
Hamid Mecheri