Les faits confirment la volonté affichée par l’Algérie de faire de l’Italie le hub gazier pour l’Europe. À partir de la semaine prochaine, 4 milliards de m3 de gaz supplémentaires seront livrés par Sonatrach à ENI et à ses autres partenaires italiens. Depuis le début de l’année, 13,9 milliards de m3 ont été livrés par l’Algérie à l’Italie, dépassant de 113% les volumes prévisionnels.
D’ici la fin de l’année, six milliards de m3 supplémentaires de gaz algérien seront livrés à l’Italie. Les milieux spécialisés estiment que cette décision renforce encore les liens historiques entre l’italien, ENI et le groupe pétrolier algérien, Sonatrach. Ils rappellent que l’approvisionnement de l’Italie en gaz algérien a été au centre des entretiens qu’a eu le président Abdelmadjid Tebboune, avec son homologue italien, Sergio Matarella, et le président du Conseil, Mario Draghi. Les deux parties avaient convenus de booster le partenariat énergétique entre les deux pays. Pour accroître ses stocks de gaz, l’Italie compte sur le doublement des approvisionnements reçus d’Algérie, en application des accords passés entre Sonatrach et ENI. L’Italie considère l’Algérie comme «un fournisseur fiable». Tout récemment, la société énergétique italienne Eni a annoncé que les approvisionnements en gaz de Gazprom étaient à un niveau inférieur de 11 millions de mètres cubes à l’approvisionnement moyen de ces derniers jours. En même temps, depuis le 11 juillet, jusqu’au 21 juillet, le « North Stream », principale voie d’approvisionnement en gaz russe vers l’Allemagne, est fermé pour effectuer des travaux de maintenance programmés. Cet arrêt temporaire du pompage de gaz de la Russie vers l’Europe a été annoncé au début de ce mois par Nord Stream, la société chargée de l’exploitation du gazoduc « North Stream » qui relie la Russie à l’Allemagne via le fond de la Baltique. Dans cette situation, le Canada a été contraint de restituer à l’Allemagne une turbine à gaz nécessaire au gazoduc Nord Stream 1, contournant les sanctions anti-russes, à la grande déception du régime ukrainien. «Les sanctions contre la Russie causent beaucoup plus de dommages précisément aux pays qui les imposent», a déclaré le président russe Vladimir Poutine, le 8 juillet.
De nombreux indices montrent que la crise du gaz s’est installée en Europe. L’incertitude concerne la durée de cette crise et son impact sur la vie quotidienne des habitants des pays de l’Union européenne, cet hiver. Certains pays comme le Danemark, la France et les Pays-Bas ne reçoivent plus de gaz russe, ayant refusé de payer leurs factures en roubles. Afin de se passer du gaz russe, le président français, Emmanuel Macron, prépare l’opinion à des restrictions dans la consommation énergétique.
En Grèce, les médias rapportent la déclaration faite hier par le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis qui fait savoir que le gouvernement grec envisage le gazoduc trans-adriatique (TAP) et le gaz naturel liquéfié (GNL) pour combler le déficit d’approvisionnement énergétique au cas où la Russie déciderait de réduire ou d’interrompre complètement l’approvisionnement en gaz de l’Europe. La part du gaz russe dans l’approvisionnement de l’Union européenne (UE) est passée de plus de 40 % en 2021 à 20 % en juin 2022, selon des experts.
Cette conjoncture a hissé l’Algérie au rang d’acteur énergétique majeur dans le bassin méditerranéen en tant que fournisseur de pays européens durement frappés dans leur approvisionnement en gaz russe, par le retour de boomerang des sanctions qu’ils ont eux-mêmes prises contre la Russie dans le cadre de la solidarité du bloc atlantiste autour des États-Unis. Dernièrement, Sonatrach et le groupe énergétique français, Engie, ont signé un accord à Alger portant livraison de gaz naturel via le gazoduc Medgaz au client français. En même temps, l’Algérie reste un fournisseur fiable de l’Espagne.
M’hamed Rebah
