Les drogues, toutes formes confondues, saisies au cours des quatre premiers mois de l’année en cours ont connu une hausse pour le moins inquiétante, au moment où l’Algérie ne semble pas encore fixée sur une stratégie à mettre en place pour lutter efficacement contre ce phénomène ravageur de la société. Ainsi, les chiffres publiés, hier par l’APS, auprès de l’Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie (ONLDT), illustrent aussi bien la hausse de consommation du kif que celle des drogues dures comme la cocaïne. Ils sont en effet près de 12 tonnes de résine de cannabis à être saisies durant les quatre premiers mois de 2019. Soit une hausse de 9,55% par rapport à la même période de l’année 2018. Ce qui correspond, en d’autres termes, à une quantité saisie de 11 953,512 kg de résine de cannabis, dont 37,94% au niveau de la région Ouest du pays, précise l’ONLDT, dont le bilan est établi sur la base des rapports des services de lutte contre les stupéfiants relevant de la Gendarmerie nationale, de la Police et des Douanes.
Selon le même bilan, 30,83% des quantités saisies ont été enregistrées dans la région Sud du pays, 9,97% dans la région Est et 21,26% dans le Centre du pays.
Près de 18% de hausse pour la cocaïne
S`agissant des drogues dures, la quantité de cocaïne saisie a fortement augmenté, passant de 1 708,526 grammes durant les quatre premiers mois de l’année 2018 à 303 272,279 grammes à la même période de 2019, soit une hausse de 17 650,52%! selon le même bilan. La quantité d`héroïne saisie a légèrement augmenté (4,10%), passant de 17,526 grammes à 18,245 grammes durant la même période de référence.
Quant aux substances psychotropes, le bilan relève une augmentation de 67,93% des quantités saisies, passant de 591 098 à 992 653 comprimés.
Mehdi Isikioune
LUTTE CONTRE LA DROGUE : L’Algérie ne dispose toujours pas de stratégie
Le président de la Fondation pour la promotion de la santé et du développement (FOREM), le Pr. Mustapha Khiati a tiré, hier, la sonnette d’alarme sur la consommation de la drogue en Algérie, précisant, dans cette optique, que ce phénomène est devenu une véritable menace pour la société.
Il déplore, également, lors de son passage au Forum du journal « El-Moudjahid », à l’occasion de la célébration de la Journée internationale de lutte contre la drogue, le fait qu’il n’existe pas de volonté politique réelle pour lutter contre la drogue dans notre pays. Le même responsable reconnaît, dans ce sillage que la forte consommation de drogue par les jeunes est inquiétante, soulignant qu’aujourd’hui le nombre de consommateurs a connu une nette augmentation : « cela est remarquable, aussi par l’augmentation du nombre d’arrestations et de criminalité et l’extension du réseau de consommation et de distribution de drogue », a-t-il ajouté. Aussi, au cours des débats, l’orateur s’est attardé sur la nécessité de revoir la politique de la lutte contre la drogue et aussi de repenser à une stratégie efficace pour lutter contre la drogue qui représente, aujourd’hui, un grand danger pour nos jeunes et notre société. Également, il a déploré, à ce sujet, que la stratégie nationale « actuelle » de lutte contre la drogue pour la période 2018-2022 n’a jamais été publiée : « d’autant plus qu’on est en 2019 », s’exclame t-il encore. Ainsi et dans le même ordre d’idées , l’invité du Forum a évoqué l’importance de revoir la mission de l’Office national de la lutte contre la drogue, précisant toutefois que ce dernier doit dépendre du premier ministère : « comment peut-on expliquer que cet office qui était dépendant du premier ministère soit mis au niveau du ministère de la justice », a-t-il martelé, toute en préconisant, ainsi que cet office, qui a été installé, officiellement en 2002, soit ouvert à la société civile.
Pr. Khiati plaide pour la création d’un observatoire national
Khïati a également relevé, lors de cette rencontre, l’importance de la prévention et de la sensibilisation contre ce fléau ainsi que la mise en place d’un Observatoire national contre la drogue : « un système d’alerte permettant de renforcer la lutte contre la drogue », a-t-il fait observer. Expliquant ainsi que : «Cette structure permettra, donc de dépister toute nouvelle drogue introduite sur le marché et, aussi, d’informer rapidement toutes les personnes concernées à savoir : les services de sécurité, les hôpitaux, les spécialistes, …..pour lutter contre la drogue … parce qu’on sait , aujourd’hui, de plus en plus de trafiquants ont tendance à recourir à des laboratoires clandestins pour la préparation de produits qui sont hautement toxiques et délétères pour le cerveau… il faut lutter contre ces pratiques ! », a-t-il expliqué encore. De son côté, le maître de conférence en psycho-clinique et vice-présidente de la FOREM, Sabrina Gahar, a mis en relief l’importance de la recherche scientifique pour la lutte contre la drogue : « Cela va nous permettre de trouver les solutions et aussi faire des propositions ou encore apporter des plans prévisionnels préventifs par rapport à cette problématique », a-t-elle tenu à préciser. Et de préconiser: « De même, il faut former les addictologues qui peuvent travailler avec les addictes ou les consommateurs de drogues ».
M. I.