L’Union européenne a franchi un pas décisif dans la gestion des 210 milliards d’euros d’avoirs souverains russes immobilisés depuis le début de la guerre en Ukraine.
Jeudi 11 décembre, les ambassadeurs des Vingt-Sept ont trouvé un accord sur l’une des propositions de la Commission européenne visant à établir une base juridique durable au gel de ces actifs, condition indispensable au lancement d’un prêt de reconstruction en faveur de Kiev. L’accord, adopté malgré l’opposition de la Hongrie et de la Slovaquie, doit encore être formellement validé dans le cadre d’une procédure écrite ce vendredi en fin d’après-midi. Le texte adopté par les ambassadeurs de l’UE interdit explicitement tout transfert des actifs à la Banque centrale de Russie et précise les modalités dans lesquelles la décision d’immobilisation pourrait être révoquée. Il vise ainsi à prémunir l’Union contre un scénario redouté : devoir restituer, en quelques jours, plusieurs centaines de milliards d’euros à Moscou à la suite d’une décision arbitrale ou d’un jugement défavorable.
La Belgique, où sont conservés l’essentiel de ces actifs via l’institution financière Euroclear, a toutefois émis une réserve, concernant l’utilisation de l’article 122 du Traité sur le fonctionnement de l’UE (TFUE), un instrument prévu pour répondre à des situations d’urgence économique. L’Italie a également formulé une réserve et n’a pas encore précisé sa position dans le cadre de la procédure écrite qui doit s’achever aujourd’hui. Dans le même temps, la Banque centrale russe a entamé une procédure en justice contre Euroclear. L’affaire a été portée devant un tribunal d’arbitrage à Moscou, précise l’agence de presse russe Tass. Selon les médias publics russes, la plainte sera déposée vendredi, la somme revendiquée étant composée du montant des avoirs gelés et de l’indemnisation du manque à gagner.
Une telle décision aurait des dommages irréparables
Moscou considère comme illégales les sanctions internationales à son encontre, notamment le gel de ses avoirs, et qualifie leur utilisation de vol. Euroclear n’a pas souhaité réagir dans l’immédiat mais un porte-parole a déclaré que la société « se bat actuellement contre plus d’une centaine de recours juridiques en Russie ». Une décision possible du Conseil de l’UE de geler définitivement les avoirs russes en Europe causerait des dommages irréparables à l’Union européenne, a déclaré le Premier ministre hongrois Viktor Orban. « Aujourd’hui, les Bruxéliques traversent le Rubicon. À midi, un vote écrit aura lieu et causera des dommages irréparables à l’Union. Le sujet du vote est les avoirs russes gelés, sur lesquels les États membres de l’UE ont jusqu’à présent voté tous les six mois et adopté une décision unanime », a écrit Orban sur le réseau social X.
Aujourd’hui, le Conseil de l’UE devrait approuver une décision écrite de gel permanent des avoirs russes en Europe.
« Avec la procédure d’aujourd’hui, les Bruxéliens abolissent l’exigence d’unanimité d’un seul trait de stylo, ce qui est clairement illégal », a noté Orban. Il a rappelé que le vote a lieu « moins d’une semaine avant la réunion du Conseil européen ».
« Avec cela, l’État de droit dans l’Union européenne est remplacé par le régime des bureaucrates. En d’autres termes, une dictature brrusselienne s’est installée », a-t-il écrit.
R. I.
