Alors que le projet de loi de finances 2016 est examiné à la commission des finances et du budget de l’Assemblée populaire nationale (APN), le ministre des Finances, Abderrahmane Benkhelfa, se veut rassurant quant aux nouvelles taxes introduites dans ledit texte de loi, estimant, ainsi, que les Algériens doivent s’investir davantage dans le développement économique de leur pays, autrement dit, être «économiquement plus patriotiques». Lors de son passage au Forum de la Radio chaîne I, le ministre des Finances a affirmé que personne n’est à l’abri de la chute de la crise économique, tout en assurant, dans ce sillage, que l’Algérie, qui traverse sa troisième épreuve après celles de 1986 et 1994, peut faire face à la chute drastique des prix du pétrole, et ce, grâce aux grandes potentialités dont elle recèle. Au sujet de la fameuse opération de bancarisation des capitaux informels, le ministre a répondu à certaines voix qui la qualifient d’amnistie fiscale de «l’argent sale» qui circule dans le marché informel. Étant catégorique, il a lancé un énième appel à ces détenteurs de fonds pour déposer leur argent dans les banques, et ce, avant que les mesures de punition ne commencent à être appliquées. Aussi, l’hôte de la Radio chaîne I a assuré que l’opération se déroule dans de bonnes conditions. «Nous avons collecté en août 2015 plus d’argent, comparativement à août 2014», s’est félicité le ministre, tout en affichant son optimisme pour les mois à venir. L’argent liquide circulant dans l’informel tourne autour de 1 000 à 1 300 milliards de DA, selon la Banque d’Algérie. à cette occasion, le premier argentier du pays a incité encore une fois les citoyens, ainsi que les opérateurs activant dans l’informel à s’inscrire dans cette démarche tout en rassurant qu’il n’y « aura pas un contrôle a posteriori ou un redressement fiscal ».
Regrettant, de ce fait, que certaines parties qualifient cet argent de sale. «C’est un argent acquis par un effort déployé, ce qui ne veut pas dire qu’il n’est pas légal», précise-t-il. De surcroît, le ministre a assuré que d’autres facilités seront mises dans les mois à venir pour inciter davantage les gens à déposer leur argent. En outre, au sujet de la hausse du prix de devise dans le marché parallèle, il a indiqué que ce n’est pas dû à l’offre et la demande, niant, ainsi, toute dévaluation du Dinar. «La hausse des prix de lEuro dans le marché parallèle n’a pas de raisons économiques», a soutenu le premier argentier du pays.
La possibilité de recourir à l’endettement a été également éloignée par le ministre. «Nous ne sommes pas arrivés à ce stade», a-t-il dit. Abderrahmane Benkhelfa a insisté de ce fait pour que tous les acteurs bancarisent leur argent. «La bancarisation des ressources est une solution adaptée à la situation économique de notre pays», a-t-il affirmé.
Tablant sur une croissance de 4,5% en 2016, le premier argentier du pays a fait savoir que l’État ne reviendra pas sur sa politique sociale, jugeant que les nouvelles taxes dans le PLF 2016, répondent à la nécessité de mettre un terme au gaspillage d’électricité et du gaz, notamment, du carburant.
Ainsi, le Projet de loi de Finances 2016 (PLF-2016) propose de relever le taux de la TVA pour passer de 7%, actuellement, à 17% sur la vente du gasoil, sur le gaz naturel lorsque la consommation dépasse 2 500 thermie/trimestre et sur l’électricité lorsque la consommation dépasse les 250 kilowatt-heure/trimestre.
Avec ces augmentations, les prix des carburants vont passer à 19 DA/litre pour le gasoil, et à 25 DA/litre pour l’essence super. Pour Benkhelfa, l’État continuera à subventionner les prix de ces produits tant que la consommation est « raisonnable », mais dès que celle-ci dépasse un certain niveau, le citoyen doit payer ces nouvelles taxes. Dévoilant, à cet égard, le chiffre de 1 840 milliards de dinars, alloué aux différentes formules de subventions, ce qui témoigne, selon lui, de la volonté de l’état à aller de l’avant dans la politique de la gratuité des soins, de l’enseignement, et même des aides aux logements. «Nous allons continuer à dépenser, mais nous devons veiller à gaspiller moins (…). Nous devons arrêter de gaspiller tous ces produits et ressources qui sont soutenus par l’état : sucre, huile, farine, électricité et carburant», insiste-t-il, tout en indiquant, que seuls les riches vont ressentir cette hausse. Pour lui, si tous les Algériens s’inscrivent dans cette logique, l’état va économiser des ressources importantes dans son budget qui est déjà alourdi par les transferts sociaux. Il explique qu’en dépit de la dégringolade des cours du brut, l’Algérie dispose encore d’une marge de manœuvre pour faire face à cette situation et qu’elle n’est pas au stade d’adopter une politique d’austérité ou d’arrêter les subventions. «La politique sociale de l’Algérie est, pour le moment, maintenue grâce à la politique anticipatrice du gouvernement», explique le ministre appelant les Algériens à «apprendre à ne pas gaspiller». «Nous ne sommes pas en situation de crise et nous n’adoptons pas une politique d’austérité mais plutôt de rigueur. Nous sommes maintenant à l’abri (de la crise) mais nous devons nous préparer à une économie plus efficiente et plus forte», a soutenu le ministre. Le premier argentier du pays a, entre autres, appelé les Algériens résidant à l’étranger de faire preuve de «patriotisme économique», assurant qu’ils sont une ressource importante de devise pour notre pays. Toujours sur le volet du patriotisme économique, Benkhelfa a appelé les gens activant dans le marché informel de devise à mettre un terme à ces pratiques, qualifiant, leur argent de «sale».
Les salaires non concernés par la réduction des dépenses
Également, l’hôte du Forum de la Radio chaîne 1 a exclu la révision des salaires des mesures que prendra le gouvernement dans le cadre de la réduction des dépenses budgétaires de l’État.
S’étalant davantage sur la réduction des dépenses publiques de l’ordre de 9%, prévue pour l’exercice 2016 telle qu’annoncée par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, Benkhelfa a écarté toute réduction des salaires des travailleurs, assurant que l’impôt sur le revenu global (IRG) n’est guère envisageable, qualifiant l’information de pure intox.
Optimisation de l’utilisation des ressources
Par ailleurs, la solution pour faire face à la chute du prix du baril est «l’optimisation de l’utilisation des ressources», a insisté Benkhelfa. «Nous sommes un pays à fort potentiel de croissance, il faut donc optimiser nos ressources, afin de préserver notre épargne institutionnelle», a-t-il expliqué, tout en indiquant qu’aucune révision des subventions des produits de large consommation n’est prévue.
De surcroît, interrogé sur l’installation de la centrale des risques pour la mise en œuvre du crédit à la consommation pour les produits nationaux, Benkhelfa a indiqué que la Banque d’Algérie était en cours de travailler avec le ministère du Commerce pour mettre en place cet outil, et définir une liste des produits éligibles au crédit de consommation.
Lamia Boufassa