Pour l’ex-ambassadeur de l’Algérie en Espagne, Abdelaziz Rahabi, le revirement du gouvernement espagnol dans sa position vis-à-vis du conflit opposant le Maroc au Front Polisario sur le Sahara occidental, par l’annonce de l’alignement de Madrid sur la posture de l’occupant marocain, « touche à l’équilibre des intérêts diplomatiques » et qui va marquer «durablement et qualitativement les relations algéro- espagnoles », affirme-t-il sur sa page Facebook.
Poursuivant dans son écrit, sur la rupture de Madrid avec sa traditionnelle position sur la question sahraouie, qui faut-il le noter, la majorité du peuple espagnol manifeste un soutien inconditionnel à l’indépendance du Sahara occidental, l’ex-diplomate affirme que « la décision du chef de gouvernement espagnol Pedro Sanchez , autant que le coup de poker de Trump ou l ‘alignement inconditionnel de la France sur les thèses marocaines ne changeront fondamentalement rien au fond de la situation du Sahara occidental qui dure depuis 47 ans », lequel territoire, rappelons-le est inscrit aux Nations unies et à l’Union africaine, sur le registre des questions soumises à un processus de décolonisation. Indiquant dans sa réaction, sur l’abandon par Madrid de sa position traditionnelle, qu’une large opinion espagnole qualifie, pour rappel « de coup de couteau dans le dos », que l’Espagne met ainsi « la primauté de l’autonomie sur l’autodétermination », ce qui constitue, poursuit-il «une triple rupture dans sa position sur la question sahraouie et dans l’architecture de ses relations avec l’Afrique du Nord » précise l’ex-ministre de la Communication. Pour cet ancien diplomate « l’Espagne au prix d’une rupture avec sa position traditionnelle, souscrit aujourd’hui à une assurance du Maroc pour garantir la souveraineté territoriale de Ceuta et Melilla élevant ainsi le chantage des flux migratoires organisés et de la détresse humaine, au rang d’arme diplomatique de choix dans les relations entre les États ». Une démarche des autorités espagnoles qui n’est qu’ « un pari risqué » selon Abdelaziz Rahabi, car, explique-t-il « aucune entité au monde n’est en mesure de contenir réellement les flux de l’émigration économique en Afrique » souligne-t-il. Pour revenir sur la triple rupture dans la position de Madrid sur la question sahraouie et dans l ‘architecture de ses relations avec l’Afrique du Nord, que vient d’opérer l’Espagne en faisant sienne la position de l’occupant marocain relative « à la primauté de l’autonomie à l’autodétermination», Rahabi indique que la première rupture « représente la fin du consensus social et politique interne formé depuis 47 ans sur la responsabilité historique de l ‘Espagne franquiste dans l’abandon de Sakia el Hamra et du Rio de Oro ». Et l’engagement de l’Espagne, poursuit-il « issu de la transition démocratique à soutenir l’autodétermination du peuple sahraoui sans privilégier ni l’autonomie ni l’indépendance mais un accord entre le Maroc et le Front Polisario dans le cadre de l’ONU ».Poursuivant, il rappelle que l’Espagne « s’était même investie dans les bons offices en faveur de solutions négociées considérant à juste titre que l’histoire la prédisposait plus que la France , les USA ou l’Allemagne à cet exercice d’intermédiation entre le Maroc et le Front Polisario » écrit-il sur sa page Facebook. Quant à la deuxième rupture, celle-ci, poursuit-il « est intervenue en 2008 sous Jose Luis Rodriguez Zapatero , qui s’était aligné sur la France , auteur matériel du plan d’autonomie de 2007 » ajoutant que le prédécesseur de Pedro Sanchez à la tête de l’exécutif espagnol «s’était joint à cette démarche sans toutefois arriver à convaincre ni la classe politique espagnole ni les Sahraouis » ni même résister, note-t-il « aux oppositions de plusieurs centaines de comités de soutien au peuple sahraoui particulièrement actifs dans les municipalités socialistes.». Il est à rappeler que l’actuel chef de l’exécutif espagnol est issu du Parti socialiste PSOE comme son prédécesseur, le Premier ministre espagnol Jose Luis Rodriguez Zapatero. Concernant la troisième rupture, celle-ci « touche à l’équilibre des intérêts diplomatiques qui va marquer durablement et qualitativement les relations algéro- espagnoles marquées par la confiance et la considération mutuelles » rappelle l’’ex-ambassadeur de l’Algérie en Espagne. Des relations qui vont sans nul doute ne pas connaitre, la même portée et la tendance, d’avant vendredi dernier, date de l’annonce de l’alignement de Madrid sur la position de l’occupant marocain au Sahara occidental et son abandon ainsi de la voie de la Charte de l’ONU et de ses résolutions sur le dossier sahraoui. Pour Abdelaziz Rahabi, par l’adoption de Madrid de cette dernière posture. l’Espagne qui jusqu’avant vendredi dernier « était écoutée, consultée et respectée par toutes les parties dans la région , fait le choix de perdre son statut historique de pivot dans la recherche d’une solution juste et durable dans le conflit du Sahara occidental pour devenir partie prenante et alignée » précise-t-il dans on écrit. Pour cet ex-ambassadeur algérien à Madrid «l’Espagne perd ainsi le poids que confère l’histoire et les atouts d’une neutralité active dans une région qui représente avec l’Amérique latine et l’Europe un des piliers de son influence internationale». Indiquant que « les perspectives de solution paraissent de plus en plus incertaines car les questions de décolonisation et d’autodétermination des peuples s’inscrivent plus dans le temps historique » celles souligne-t-il , ne s’inscrivent pas «dans l’actualité en Europe dans les calculs ponctuels de géostratégie », lesquels calculs, faut-il le rappeler n’ont pas épargné les effondrements des systèmes et empires coloniaux à travers le monde, car leur chute était inévitable, en raison de la lutte et la détermination des peuples colonisés à se libérer des chaînes pour accéder à la liberté et l’Indépendance.
Karima Bennour