L’opposition vénézuélienne et le président Nicolas Maduro ont vivement haussé le ton mardi, la première appelant l’armée et la population à la désobéissance, le second invoquant une «fraude» pour invalider un projet de référendum qui l’évincerait.
En début de soirée, l’Assemblée nationale, où l’opposition est majoritaire, a rejeté le décret présidentiel sur l’état d’exception. Les députés, qui ont voté à main levée, ont estimé que l’état d’exception «approfondit la grave altération de l’ordre constitutionnel et démocratique que subit le Venezuela». En cas de vote négatif, «nous serons, nous Vénézuéliens, dans l’obligation d’ignorer ce décret», avait averti plus tôt dans la journée Henrique Capriles, candidat malheureux à l’élection présidentielle de 2013 face à Nicolas Maduro. «Tous les actes que nous considérons nuls car ils violent la Constitution (…) ignorons-les», avait-il ajouté au cours d’une interview à la radio, appelant une nouvelle fois à descendre dans la rue dès mercredi pour réclamer un référendum en vue de destituer le président vénézuélien. M. Capriles a aussi demandé à l’armée de choisir entre la Constitution et le président Maduro. «Je dis aux forces armées: l’heure de la vérité est arrivée, celle de décider s’ils sont avec la constitution ou avec Maduro», a-t-il lancé. En face, Nicolas Maduro a annoncé que le référendum, pas «viable» selon lui, n’allait pas «aboutir» et il a accusé l’opposition de «fraude». Les autorités ont d’ores et déjà annoncé que ces défilés ne seraient pas autorisés.
A l’image de l’opposition, les experts pointent le risque «d’explosion» du pays alors que sept Vénézuéliens sur dix réprouvent la gestion de leur président, selon un sondage de l’institut Venebarometro.
«Intrusion illégale»
Coupures d’électricité quotidiennes, pillages de commerces, pénuries et lynchages: ce pays pétrolier sombre chaque jour un peu plus dans la crise politique, économique et sociale depuis la victoire d’une coalition d’opposition aux élections législatives, fin 2015. Lundi soir, le pays a fait un pas de plus vers l’autoritarisme après la proclamation de «l’état d’exception» par Nicolas Maduro, qui multiplie les déclarations à l’emporte-pièce face à une «menace extérieure» jusqu’ici mal identifiée. Mardi, il a directement accusé les Etats-Unis d’intrusion dans l’espace aérien vénézuélien la semaine dernière, et annoncé une protestation diplomatique officielle. «Notre force aérienne, notre aviation militaire bolivarienne, a détecté l’intrusion illégale à des fins d’espionnage du Boeing 700 E-3 Sentry, doté de tous les mécanismes pour exercer une surveillance électronique», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse. Washington, qui nie tenter d’influer sur le cours des événements au Venezuela, a fait part de sa préoccupation sur la situation du pays lundi. Un décret publié dans la soirée de lundi a étendu durant 60 jours les prérogatives du gouvernement en matière de sécurité et de distribution alimentaire: l’armée et la police ont désormais pour ordre de «garantir la distribution et la commercialisation des aliments et produits de première nécessité».