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Turquie : manifestations d’envergure contre Erdogan

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Des manifestations d’envergure se sont déroulées, hier, contre Erdogan, à la suite de la mort d’un adolescent de 15 ans, dans le coma depuis qu’il avait été blessé par la police, lors de la fronde antigouvernementale de juin 2013. D’autres affrontements ont opposé la police à près d’un millier d’étudiants de l’université technique du Moyen-Orient (ÖDTU) à Ankara, un bastion de l’opposition. Les forces de l’ordre ont fait usage de canons à eau pour déloger les manifestants qui bloquaient une artère de la Capitale. La mort de Berkin Elvan porte à sept le nombre de personnes tuées, lors de la fronde qui a fait vaciller le régime islamo-conservateur à la mi-2013. Un policier avait aussi perdu la vie pendant ces événements qui ont fait plus de 8 000 blessés. Le chef de l’État, Abdullah Gül, a exprimé devant la presse sa «consternation» après la mort du jeune homme et présenté ses condoléances à sa famille. Il a aussi appelé «chacun à tout faire pour éviter que cela ne se reproduise». L’ONG Human Rights Watch a dénoncé le «problème endémique» de la violence policière en Turquie et exigé une enquête «pour déterminer qui a tiré sur Berkin». La contestation contre un régime qui a glissé vers une autocratie qui n’a absolument rien à voir avec les professions de foi démocratique du Premier ministre turc, empêtré dans un scandale politico-financier, a pris une nouvelle ampleur, ravivée aussi par la diffusion d’un nouvel enregistrement pirate sur les  »affaires » d’Erdogan et sa famille. Cette nouvelle affaire sort après qu’Erdogan eut menacé de bloquer Facebook et Youtube dans son pays, après la diffusion d’une première série d’enregistrements pirates le mettant directement en cause dans des malversations et la corruption, sur ces plateformes. La question à Ankara et Istanbul est : la diffusion de ces nouveaux enregistrements vont-ils coûter sa tête à Erdogan ? Dans cette conversation téléphonique diffusée sur Internet, Reza Zarrab, un entrepreneur d’origine irano-azerbaïdjanaise explique à son homme de confiance, un certain Abdullah Happani, que l’ancien ministre de l’Économie, Zafer Caglayan, se serait plaint de n’avoir pas reçu les 10 millions d’euros promis en contrepartie de l’arrangement d’un marché public. La voix attribuée à Zarrab se dit “très surprise” que l’ex-ministre n’ait pas reçu sa commission étant donné que cette somme est sortie des caisses de sa compagnie. Caglayan et trois autres ministres, membres de l’AKP, Parti islamiste de la Lumière au pouvoir depuis 2002, ont perdu leur siège dans le cabinet d’Erdogan après un coup de filet policier lancé le 17 décembre 2013, mettant en cause pour corruption et malversations son fils, et plusieurs dizaines de personnalités proches du régime. Zarrab a, lui aussi, été arrêté et inculpé avant d’être remis en liberté la semaine dernière avec l’ensemble des autres manifestants. Ainsi et à moins de trois semaines d’un scrutin municipal sous haute tension, les dizaines de manifestations spontanées hostiles au Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, vont serieusemnt compliquer la tâche à un Premier ministre, qui s’est engagé à quitter la politique si son Parti perd les élections. Ce qui est peu probable, selon les estimations des instituts de sondages turcs, mais l’on voit mal comment il pourrait continuer à gouverner avec cette accumulation des affaires. Erdogan a mis à la retraite les juges qui avaient mis le doigt sur les agissements délictueux de ses proches. Dans les documents de la police, également “assainie” par Erdogan, Caglayan est accusé d’avoir reçu plusieurs dizaines de millions d’euros de commissions, de Zarrab. Erdogan, qui dirige sans partage la Turquie depuis douze ans, doit savoir, lors des élections municipales du 30 mars, s’il peut rester. Dans un enregistrement téléphonique piraté, Erdogan ordonnait en personne à son fils Bilal de dissimuler de fortes sommes d’argent et évoquait une commission jugée insuffisante versée par un groupe industriel. Erdogan accuse ses ex-alliés de la confrérie du prédicateur musulman Fethullah Gülen, réfugié aux Etats-Unis, d’être à l’origine des enquêtes judiciaires qui visent ses proches pour précipiter sa chute, non seulement à la veille des élections municipales, mais aussi dans la perspective de la présidentielle d’août prochain, que le Premier ministre comptait investir. Ces casseroles l’ont rattrapé et le doute sur sa probité et morale islamique a gagné des militants de l’AKP.

M. B.

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