Pour passer les frontières et séjourner en Tunisie, les ressortissants algériens n’ont besoin que de leur passeport ou leur carte d’identité. Cependant, les Algériens résidents en permanence sur le territoire tunisien doivent détenir un passeport et s’assurer qu’il est toujours en validité.
Ce dernier sert à entrer en Tunisie et à demander un titre de séjour, une mesure toujours exigée même pour les résidents algériens de longue durée et leurs enfants qui, pour certains d’entre eux, n’ont jamais mis les pieds en Algérie. Avec l’introduction de biométrique dans les représentations consulaires algériennes à l’étranger, la communauté algérienne ressente un grand soulagement après avoir longtemps souffert des lenteurs des procédures administratives. Les Algériens résidents en Tunisie peuvent désormais renouveler leur passeport et autres documents près de chez eux, du plus proche consulat algérien de leur situation géographique, mais seulement en voilà un bémol qui vient gâcher tous les efforts : avoir le S12 est synonyme de grande galère. Chakib Djouhri, membre de la communauté algérienne en Tunisie et ancien membre de la commission parlementaire algéro-tunisienne, a pointé ce paradoxe lors de son intervention, hier, au Forum du Courrier d’Algérie. Pour ce diplômé de l’ENA (École nationale d’administration) et spécialiste en Administration centrale, se délivrer ce document de S 12 devient même impossible pour les familles algériennes établies en Tunisie depuis des générations. Les familles en question sont obligées de prouver et de présenter des extraits de naissance attestant que le père et le grand-père sont algériens. Or, « comment pourrait-on trouver un grand parent né dans les années 1800 ? Comment dire que ce parent est bien natif de Annaba et non pas de Skikda ou de Guelma ? Dans la plupart des cas, c’est ce genre de problème auquel sontconfrontés les ressortissants algériens en Tunisie », a expliqué Djouhri. Une injustice, que Djouhri affirme interpeller « en vain » les pouvoirs publics en Algérie à maintes reprises, et qui s’ajoute aussi à un autre problème de même taille. En effet, les ressortissants algériens en Tunisie ne comprennent pas pourquoi ils doivent payer leur passeport plus cher au niveau des représentations diplomatiques nationales qu’en Algérie. Alors que le timbre fiscal du passeport algérien est fixé à 6 000 DA (équivalent 30 euros), les services consulaires le délivrent à 178 dinars Tunisien (DT) (63 euros). Ce qui est « hors portée » pour un ménage moyen. « Les ressortissants algériens en Tunisie doivent toujours en disposer d’un passeport valide même s’ils n’ont pas l’intention de voyager en Algérie. C’est obligatoire pour renouveler le titre de séjour et aussi pour inscrire ses enfants à l’école et entamer les différentes démarches administratives. Donc, si une famille est composée de 5 enfants, le père de famille doit dépenser pas moins de 1 000 DT pour 7 personnes. C’est énorme et quasi-impossible sans recourir à un crédit bancaire », a souligné Djouhri. Mais, les ressortissants algériens établis en Tunisie n’ont pas de problèmes pour être en règle uniquement en dehors des frontières, certains les accompagnent même à l’intérieur, en Algérie. «En tant que communauté algérienne établie en Tunisie, nous avons aussi des préoccupations une fois rentrés en Algérie. Nous avons enregistré même ces dernières années des problèmes chez beaucoup de catégories de personnes, notamment les étudiants qui ont effectué leur cursus éducatif en Tunisie. Ils rencontrent de plus en plus de difficultés pour avoir le droit de s’inscrire ou poursuivre des études supérieures en Algérie, dans la recherche et la post graduation», regrette Djouhri. Le même interlocuteur déplore aussi le fait que la même catégorie «n’a pas accès au système des bourses d’études nationales ou destinées à l’étranger». Et cela commence avec l’absence d’informations sur ces bourses pour les étudiants qui veulent s’informer. « Arrivés en Algérie, ces jeunes étudiants sont livrés à eux-mêmes. Leur seul tort est d’avoir un diplôme tunisien. On continue encore à les considérer comme des étrangers, mais est-il logique que le simple fait d’être titulaire d’un diplôme tunisien fait de toi un citoyen étranger dans ton pays ? », s’interroge Djouhri. « Il faut les accompagner au lieu de les laisser aller chercher dans les couloirs des administrations et se perdre dans les problèmes d’équivalence de leur diplôme, seuls devant une bureaucratie galopante. Le ministère de l’Enseignement supérieur doit faire un travail vis-à-vis de cette communauté », ajoute le même responsable. Une grande partie de la communauté algérienne résidente en Tunisie se voit empêcher de poursuivre des études supérieures là-bas, « ce qui est logique », tranche Djouhri, qui estime que « les hautes études en Tunisie sont réservées aux Tunisiens, car un poste de doctorant équivaut à un poste d’enseignant dans les universités tunisiennes ».
Hamid Mecheri