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Renforcer les entreprises publiques au lieu de les brader

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Par Ali El Hadj Tahar

Le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, a indiqué que le gouvernement mène actuellement des réformes pour renforcer les capacités des entreprises du secteur public, en examinant, au cas par cas, leurs situations, sans écarter la possibilité de céder celles qui ne parviennent pas à évoluer.
« Il existe des entreprises publiques qui méritent d’être renforcées. D’autres qui n’arrivent pas à évoluer et à faire des réformes, nous sommes en train de voir comment les reprendre, ou bien les céder », a dit M. Djerad qui n’écarte donc pas l’éventualité de brader certaines d’entre elles comme cela a été fait depuis les années 1980. Fierté du pays, les entreprises publiques économiques (EPE) (industrielle ou commerciale) créées au lendemain de l’Indépendance se comptaient par milliers au point où même le Département d’État américain n’en connaissait pas le nombre en 2018, alors que plus de 1200 avaient déjà été liquidées. Créé de toutes pièces après l’Indépendance, cet outil disposait de 70 zones industrielles et de grands complexes industriels en pétrochimie. La part de l’industrie au PIB n’a pas cessé d’augmenter avec comme objectif de réduire l’apport des hydrocarbures aux recettes du pays. Elle atteignait près de 20% il y a deux décennies de cela.
Alors qu’en 1962, le pays a hérité d’une économie fondamentalement agricole et mono-productrice (vini-viticulture), les EPE assuraient les emplois à 2 606 618 personnes en 1983. Tous ou partie des besoins du pays étaient assurés par la production de ces sociétés qui couvraient tous types de secteurs, des hydrocarbures aux minerais, industries mécanique et électrique, matériaux de construction, industries chimiques, industries agricole et alimentaire, textiles et cuirs. Soixante secteurs étaient couverts par ces industries, dont certaines avaient commencé à exporter, ayant atteint un certain niveau d’excellence.
Aucun prétexte ne peut justifier le bradage, au privé, de sociétés nationales. L’ouverture du capital doit être envisagée sans complexe d’autant que certaines ont commencé à le faire depuis longtemps, même si cela ne s’est pas toujours fait au profit du sociétaire public comme l’a montré l’aventure d’El-Hadjar avec Arcelor Mittal ou de l’ENAD qui a complètement fini par être avalée ou presque par l’Allemand Henkel. Il n’est pas logique de dire qu’un opérateur privé sache faire mieux qu’un gestionnaire étatique. La rémunération des chefs d’entreprises doit être posée et ― pourquoi pas ? ― Même les parapluies en milliers ou millions d’euros à leur départ. M. Djerad, qui dit ne pas faire de différence entre secteurs privé et public, doit décider qu’ils aient les mêmes droits. Il est clair qu’aujourd’hui aucun maire, aucun wali, aucun secrétaire général n’osera demander des meubles, du ciment ou des briques à un chef d’entreprise, puisque cette espèce de profiteurs a mis des entreprises sur le carreau, mais l’ingérence politique a aussi fait des dégâts, notamment avec la Gestion socialiste des Entreprises qui a donné plus de poids au syndicat qu’au P-DG et fait de certains travailleurs des rentiers.
Il est indéniable qu’Air Algérie, par exemple, a fait les frais de cette politique. Les deux décennies passées ont été catastrophiques pour les EPE, désavantagées par l’État et l’administration qui ont privilégié un secteur privé plus conciliant en matière de passe-droits et pots de vin. Des géants étatiques ont ainsi été cassés, et aujourd’hui des entreprises turques, chinoises et autres, qui n’avaient pas notre savoir-faire il y a trente ans, raflent nos marchés du bâtiment et des travaux publics. L’ANP a réussi à redynamiser les entreprises qui allaient faire faillite faute de débouchés, et cela prouve que ces entreprises sont fiables lorsqu’elles bénéficient des mêmes droits que le privé. Les chiffres montrent que rares, par contre, sont les entreprises privatisées qui ont réussi le pari.
A. E. T.

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